Procès Scientologie : la justice française sera-t-elle partisane ou indépendante ?

par JL ML
lundi 14 novembre 2011

Très important, ce procès contre l’Eglise de scientologie qui se tient jusqu’à la fin novembre 2011 à Paris. Il s’agira de voir si la justice française participe à la « lutte contre les sectes », non fondée juridiquement, ou si elle constitue bien une instance indépendante se réglant sur le droit, et non la passion ou la rumeur.

Les faits : les deux principales structures de la Scientologie française, le Celebrity Centre et sa librairie SEL, condamnées en première instance à de lourdes amendes pour "escroquerie en bande organisée", et cinq scientologues, qui avaient écopé d´amendes et de prison avec sursis, sont rejugés par la cour d´appel de Paris jusqu´au 1er décembre 2011.

D’un côté, un mouvement qui se dit religieux : « L´Église de Scientologie est une religion qui existe depuis 50 ans dans notre pays. Elle compte des dizaines de milliers de scientologues en France, des millions dans le monde et plus de 9000 églises, missions et groupes sur les 5 continents ».

En face, le pouvoir et ses instances de lutte contre les minorités spirituelles. Et non pas non les familles, comme le pouvoir et les médias tentent de le faire croire. En effet, étrangement, il n’y a aucune victime dans ce procès : le dernier plaignant encore présent au précédent procès s´est depuis désisté.

Dans un communiqué, l’Église de scientologie remarque : « Sans l’intervention de l’exécutif et du dispositif mis en place pour influencer les magistrats dans notre pays en ce qui concerne les affaires de minorités religieuses et de conviction, l’affaire aurait dû en rester là ».

Protéger le monopole pharmaceutique ?

Demeurent cette fois-ci seulement deux parties civiles : le Conseil national de l´ordre des pharmaciens et l’Unadfi, association spécialisée dans la lutte contre les sectes.

L’Unadfi, contrairement à l'image qu'elle tente de faire passer, ne représente aucunement les familles. C’est une association gouvernementale de fait, financée en quasi totalité par les finances publiques, et non par des adhérents provenant de "victimes" des sectes : en 2006, sur plus de 600 000 € de subventions, elle n’avait pas dépensé un centime dans son budget "aide aux victimes". Idem en 2007.

Sur le site de Cap Lc, on peut lire la brochure : « Les fonds publics sont-ils utilisés dans l´intérêt général ? » On découvre les sommes importantes que reçoit cette association comparées à ce que reçoivent d´autres associations. Par exemple, Fondation Abbé Pierre : 437 000 € pour 10 972 membres actifs, contre Unadfi : 622 172 € pour seulement 290 membres actifs !

L’Unadfi sert en fait de paravent à la Miviludes, ce qui permet à cette dernière de faire faire par d'autres le travail d'incitation à la haine des minorités tout en prétendant, elle, « agir dans le respect des croyances ».

Bien qu’ayant été déboutée au premier procès, l’Unadfi s´est représentée. L´Église de scientologie l’a assignée en justice pour « appel abusif ».

« Seule une aide internationale peut remédier à cette discrimination institutionnalisée »

La Miviludes et l’Unadfi ont depuis longtemps développé de multiples actions envers les différents corps constitués, élus locaux, administratifs, magistrats, etc., pour les « sensibiliser à la problématique sectaire ». En réalité, pour diffuser leur seul point de vue négatif, fermé à toute critique et à toute observation contradictoire, et discriminant la nébuleuse spirituelle et thérapeutique. Représentant l’État directement et indirectement, elles sont dans tous les lieux de pouvoir, à la fois juges et parties. Et notamment dans ce procès.

« Aujourd’hui, explique la scientologie dans un communiqué, le dossier étant toujours aussi vide, la Direction des affaires criminelles et des grâces [ministère de la justice] a été jusqu’à publier une circulaire [le 19 septembre 2011, soit juste avant le début du procès] destinée aux magistrats. En plus de leur donner des instructions pour poursuivre avec acharnement certaines minorités religieuses, cette circulaire enjoint ces mêmes magistrats de travailler en partenariat avec l’Unadfi, alors que cette association est la partie opposée à l´Église dans ce procès, jetant ainsi à bas toute possibilité de justice équitable pour les mouvements concernés, dont l´Église de Scientologie. Cette circulaire illégale a fait l’objet d’une plainte [le 10 octobre 2011] devant le Rapporteur spécial sur l’indépendance des juges de l’ONU. Cette ingérence de l’exécutif dans le pouvoir judiciaire est une pression indue et revendiquée sur les magistrats de Cour d’appel. »

Pour le mouvement, seule une aide européenne ou internationale peut aujourd’hui « remédier à [cette] discrimination institutionnalisée ». Une aide qui commence à se manifester d’ailleurs de plus en plus clairement.

Les membres du Congrès américain, dans une lettre adressée au premier ministre français, datée du 28 octobre 2011, et cosignée par les présidents du groupe d’étude sur la liberté religieuse dans le monde du Congrès, écrivent : « Nous sommes inquiets du fait qu’il n’y ait aucune chance de réelle justice pour ces mouvements (mouvements religieux minoritaires, ndt) et ceci apparaît comme une intervention directe du pouvoir exécutif pour influencer et diriger les décisions des magistrats dans les affaires délictuelles ».

Précisions : Je précise que je ne soutiens ni ne combats l’Église de scientologie. Je ne me prononce pas sur sa culpabilité ou son innocence. En revanche, je défends son droit à une justice équitable, ce qui paraît ne paraît pas forcément assuré dans le procès en cours, comme on peut le comprendre en lisant l’article. Mais la justice sait faire montre de sursauts d´indépendance, d’impartialité et de conscience. Attendons donc ses conclusions.

Je précise également que j’approuve le principe d’une veille sur les "dérives sectaires". Encore faudrait-il au préalable définir ces termes juridiquement. Et que cette veille s´exerce sur toutes les composantes de la société. Y compris sur les familles où l´on compte une femme tuée tous les trois jours par son compagnon et 100 000 viols par an... Et que cette veille ne soit pas menée comme aujourd’hui, de façon arbitraire, non scientifique ni républicaine, jamais contradictoire, essentiellement répressive et sans être contrôlée par personne.


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