Prostitution : Abolition 2012 veux l’interdire, le STRASS s’y oppose

par Michaux Jérémi
samedi 12 mai 2012

En ces temps de débats politiques, il en est un qui suscite toujours beaucoup de discution. C'est celui de la pénalisation des clients de la prostitution avec en toile de fond son interdiction. Les deux camps font valoir leurs arguments.

A l’occasion de la campagne présidentielle le débat sur la pénalisation des clients de prostitués a refait surface. L’objectif des associations qui soutiennent ce projet est à terme l'interdiction de cette activité. 

 
Pour fêter les 66 ans de la fermeture des maisons-closes, une conférence a été organisé le 13 avril par le collectif Abolition 2012. Les associations qui le compose prônent la pénalisation des clients et non plus des prostituées qu’elles considèrent comme des victimes. Sans concession, elles remettent en cause, « le plus vieux métier du monde ».
 
L’expression est vivace dans la bouche de ceux qui désire le statuquo mais sonne comme une aberration dans celle des abolitionnistes. « Si une mauvaise chose à prospéré pendant des millénaires, doit-elle continuer encore et encore » lance à la salle Tiphaine Duche dans un monologue théâtral « à la Sofia Aram ».
 

Elle poursuit : « Si demain mesdames votre patron vous donnait une bonne poignée de vulve en lieu et place de la traditionnelle poignée de main matinale, qu’est-ce que cela changerait ? »

La salle conquise apprécie l’ironie de la séduisante jeune femme. Elle explose l’applaudimètre durant les cinq minutes que dure sa performance puis reprend son sérieux pour présenter la présidente de l’association Du Nid. Femme entre deux âges, elle inspire le respect, son propos est affirmé.

Elle évoque le premier pas franchi dans la remise en cause de la prostitution et l’interdiction des maisons closes moins d’un an après la fin de la seconde guerre mondiale. Cette loi éditée il y a 66 ans aujourd’hui est le prétexte au rassemblement de plus de 40 associations sous le collectif Abolition 2012 à l’occasion de la présidentielle. 

Cette loi Marthe Richard à pris le nom d’une ancienne travailleuse du sexe dont les activités d’espionnage l’emmèneront à côtoyer Mata-Hari, à devenir aviatrice et à obtenir la légion d’honneur des mains de son amant, alors ministre. Par la suite elle deviendra le sujet de plusieurs biographies et maire d’un arrondissement parisien.

C’est alors, qu’auréolé de faits de guerres néanmoins contestés, elle se battra pour la fermeture des maisons closes. Pourtant moins de cinq ans plus tard, elle reviendra sur sa position prétextant avoir été instrumentalisée par ses appuis politiques. Elle ne changera pas d’avis jusqu’à sa mort en 1982. 

C’est donc la Marthe de la deuxième partie de sa vie qui intéresse les responsables d’associations conviées à s’exprimer devant la cinquantaine de personnes présentes. Essentiellement composé de femmes, l’audience est totalement acquise à la cause féministe et rien d’étonnant à cela. Comme je l’apprendrai plus tard, les membres d’associations de prostitués se sont vus refusés l’accès.

La teneur des interventions n’en est pas moins intéressante notamment celle du Collectif féministe contre le viol. Sur un échantillon de 90 prostituées, près de 100% d’entres elles auraient subit une agression sexuelle durant l’enfance. 73% par leur père. C’est notamment sur ces chiffres que s’appui Abolition 2012 qui milite pour déresponsabiliser pénalement les prostitués et au contraire interdire le recours à leurs services.

« Payer pour une relation c’est l’imposer à quelqu’un qui ne la désire pas » selon Maudy Piot de Femme pour le dire, femme pour agir.Cette dernière évoque un sujet dont on entend de plus en plus parler, celui des aidants sexuels qui dispense un plaisir sexuel à des handicapés.

Là encore la position de son association pour les femmes handicapés est la même : « On s’intéresse à leur sexualité et c’est bien mais de la mauvaise manière car les aidants ne sont pas la solution […] 90% des demandes sont masculines, vous vous en doutez !

Une dispute sur le sujet avait d’ailleurs éclaté avant le début de la conférence entre une féministe et un homme en fauteuil roulant. L’homme reprochant à plusieurs associations présentes de s’opposer au projet de remboursement des aidants sexuels par la Sécurité Sociale. Ses arguments avaient été balayé par la femme : « visiblement vous avez vos deux mains, ça ne vous suffit pas » ?

On s’en doute, l’autre axe de bataille mené par le collectif est la lutte pour l’égalité homme/femme car 99.6 % des « prostitueurs » comme elles les surnomment seraient des hommes. 

 
 
Morgane Merteuil
 
Pas touche à mon client
 
Morgane Merteuil est la secrétaire générale de l’association Strass qui lutte pour les droits des prostitués. Elle manifestait son opposition devant l’entrée de la conférence « Abolition 2012 ».
 
Pourquoi vous opposez-vous à une loi qui pénaliserait le client mais affranchirait les prostitués notamment en cas de racolage ?
 
Parce que sous couvert de s’attaquer au client, on s’attaque aux prostitués car sans clients, pas de prostitués. L’objectif de ce collectif est d’interdire tout bonnement la prostitution. Ce n’est pas la solution. On l’a vu aux Etats-Unis pendant la prohibition, le commerce de l’alcool est devenu souterrain mais n’a pas disparu. Après la fermeture des maisons closes en 1946 ce serait pousser un peu plus vers la clandestinité des dizaines de milliers de personnes. Les outils législatifs existent déjà pour encadrer l’activité des prostituées.
 
Pourquoi manifestez-vous aujourd’hui contre ce collectif ?
 
Parce que les associations qui le composent considèrent la prostitution comme une violence en soi. Elles sont dans une vision très romantique du sexe. Selon elles une sexualité sans désir serait forcément une violence car elles font l’amalgame entre désir et consentement. Dire aux personnes concernées que ce qu’elles vivent, c’est de la violence et qu’elles le regretteront plus tard, c’est du paternalisme. On revendique être responsable de notre corps et savoir ce que l’on en fait.
 
La prostitution n’est-elle pas plus souvent une contrainte qu’un véritable choix ?
 
Vous croyez que c’est un choix d’être caissière dans un supermarché ou serveuse dans un bar. Il y a effectivement des prostitués qui vivent leur travail avec violence et c’est le rôle d’association comme la nôtre de tout mettre en œuvre pour qu’elles puissent se réorienter professionnellement. Mais beaucoup d’entres nous préfèrent se prostituer que d’exercer d’autre métier car on y trouve des avantages comme être son propre patron, avoir beaucoup de temps libre…
 
Propos recueillis par Jérémi Michaux

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