Réponse à trois arguments des pro « lega-legalización » du cannabis

par Lalo
mercredi 11 juillet 2012

Suite à la lecture d’une lettre d’un gendarme défendant la légalisation du cannabis dans les Inrocks, j’ai eu envie d’exprimer mon point de vue (les phrases en italiques ne sont pas spécifiquement tirées de sa lettre mais de certains commentaires et de ce que j’entends sur le sujet en général).

1). Le cannabis n’a pas ou très peu d’effets néfastes sur la santé ou la vie sociale. Enfin, faut pas en abuser quoi

Généralement ce sont des fumeurs de joints occasionnels qui t’assènent cette vérité. Bien dans leur peau, le cannabis leur permet de se détendre après une journée de boulot ou lors d’une soirée entre amis. Ils martèlent que cette drogue( ?) douce n’a pas d’effets négatifs sur leur santé ou sur leur vie sociale, contrairement à ce que voudraient nous faire croire certains médecins, politiques ou autres. Certes, consommer du cannabis comporte moins de risques que consommer des drogues dites dures. Pourtant la consommation de cannabis est loin d’être anodine (cf un rapport de l’assemblée nationale contenant des études scientifiques de différents pays). Il s’agit d’un produit psychoactif, qui peut donc entrainer des états psychotiques suite à une consommation intensive. Mais une des particularités du cannabis est que son effet varie considérablement en fonction des consommateurs (c’est d’ailleurs ce qui rend difficile l’élaboration d’une charte d’effets produits par sa consommation) et une personne peut démarrer une psychose en ayant consommé une faible dose de cannabis. De plus, le cannabis peut créer une dépendance : "en 2002, le nombre de prises en charge sanitaire de consommateurs de cannabis représentait 15 % des prises en charge globales de toxicomanes". (toujours selon le rapport).

[Mais ! L’alcool et le tabac agissent aussi sur le cerveau et entrainent des dépendances, me direz-vous. Patience, ce point sera développé dans la seconde affirmation.]

Ces heureux utilisateurs de cannabis n’ont pas conscience que beaucoup d’autres sont victimes de ses effets négatifs. Le repli sur soi, la paranoïa ou la perte de mémoire (à court-terme pour cette dernière, certes) sont loin d’être des symptômes inventés par les détracteurs du cannabis.A l’adolescence, de nombreux jeunes ont la possibilité de tester cette drogue. Cela peut avoir des effets positifs pour eux : ils vont se sentir libérer et vont avoir moins de mal à s’ouvrir aux autres. Sauf que certains, sur le long-terme, risquent de s’isoler socialement ou d’aller chercher dans des drogues dures de nouvelles sensations. Parce que oui, c’est une réalité, les jeunes d’aujourd’hui ne se contentent pas de tester les effets du cannabis mais sont à la recherche de « toujours plus », du fait de leur propres envies mais aussi sous la pression du groupe, pour paraître « cool et sans peur ». Le tabac est une porte ouverte sur le cannabis, qui lui-même est une porte ouverte aux drogues dures. (et non je ne suis pas une vieille réac’ de 50 ans pour affirmer ça, j’ai 22 ans et je constate ce que je vois au sein de ma génération…)

Alors tant mieux pour l’ado relativement bien dans sa peau, qui quelques années plus tard sera revenu de toutes ses expériences psychédéliques sans trop de dommages collatéraux, et qui « se contentera » de fumer du cannabis. Mais pour le jeune plus fragile psychiquement, c’est moins sûr que ce retour « à la normal » se fera sans encombres ou se fera tout court.

 

2. La société est hypocrite : l’Etat met en vente légalement cigarettes et alcool, qui tuent des milliers de personnes chaque année, et ne légalise pas le cannabis, pourtant moins dangereux et consommé pas un grand nombre de français.

Votre opinion par rapport à cette affirmation dépendra surtout de si vous considérez le cannabis dangereux ou non (question déjà développée dans le premier paragraphe). Je rajouterai tout de même qu’en effet, le cannabis tue moins que le tabac et l’alcool, mais comme vu plus haut, il n’en reste pas moins dangereux. En passant, fumer du cannabis endommage plus les poumons que fumer du tabac (du fait de la plus grande inhalation).

 

Ensuite, la première partie de cette affirmation est pour moi un contre argument. L’Etat s’en met déjà plein les poches grâce aux industries de la mort telles que l’alcool et le tabac, autant ne pas récidiver avec le cannabis ! Je pars du principe que le gouvernement est censé protéger les citoyens. Légaliser quelque chose de nocif, qui en plus peut mener à avoir un comportement à risque (conduire après avoir fumé un joint etc) n’est pas rendre une société meilleure. Et ce n’est pas parce que l’alcool et le tabac sont deux fléaux légaux qu’il faut venir en rajouter à notre société.

 

De plus, d’un point de vue pratique cela me semble peu viable. Si le cannabis est légalisé (ce qui implique donc que les circuits de production et de vente soit relativement encadrés), nul doute qu’il y aura des trafics parallèles permettant d’offrir du cannabis moins chers que celui proposés sur le marché légal. Il n’y a certes pas de trafic d’alcool, mais la contrebande de cigarettes existe bel et bien…

Au lieu de vouloir absolument dépanaliser le cannabis parce que consommé par un grand nombre, je serais plus pour effectuer un travail de prévention auprès des jeunes, pour justement essayer de réduire cette consommation. Une des grandes questions à se poser est : pourquoi ce besoin de se droguer ? Pourquoi ce besoin d’échapper à la réalité ? C’est sûr que la société de consommation actuelle, fruit du capitalisme qui est le moteur de notre économie, n’aide pas à l'épanouissement personnel...

 

3. Consommer ou non du cannabis engagera la responsabilité de chacun.

Ah, ce serait un peu comme avec l’alcool : les gens sont assez responsables pour ne pas prendre leur voiture après avoir bu. Ou pas. Pas grand choses à rajouter que je n’ai déjà dit plus haut (cf l’Etat a pour rôle de protéger les citoyens.). Il n’est pas question ici de les infantiliser en les empêchant d’exercer leur libre arbitre, mais tout simplement de ne pas autoriser la vente d’une substance dangereuse. Les personnes s’initiant au cannabis pour la première fois sont (très) jeunes. Du fait même de leur manque de maturité et de leur désir d’opposition à l’autorité, propre de l’adolescence (qui se traduit souvent par des comportements à risques), ce serait hypocrite d’attendre de la part de cette tranche d’âge un comportement responsable… (par comportement responsable j’entends une consommation occasionnelle et non chronique, la non prise du volant après avoir fumé un joint etc). Si le cannabis est légalisé, bon courage aux campagnes de prévention routière (vu comment le gouvernement galère à diminuer le nombre de morts dû à l’alcool sur les routes…).

 

A ce stade de mon argumentation, je me rends compte que la principale source de désaccord entre les « pour » et « contre » sa légalisation est basée sur l’intime conviction des gens concernant la dangerosité ou non du cannabis. Je pense que cette conviction dépend en grande partie du vécu des personnes et de ce qu’elles tiennent pour vrai. C’est pourquoi j’ai l’impression que malgré tous les débats qu’il pourra y avoir, le consommateur occasionnel bien dans sa peau soutiendra toujours la légalisation, tout comme la personne ayant fait l’expérience des aspects plus sombres du cannabis aura tendance à être contre. Il faudrait de nouvelles études scientifiques (encore trop rares sur le sujet) pour mieux connaître les effets du cannabis et faire avancer le débat.

Pour ma part, je considère que la consommation « heureuse » de beaucoup de personnes ne peut cautionner la dépénalisation du cannabis, au vu du risque (certes plus minime mais existant tout de même) pour certaines personnes de subir des effets négatifs. Sans diaboliser le cannabis, on ne peut pas se permettre de légaliser sa consommation, une légalisation envoyant le message officiel mensonger (et notamment à l’adresse des plus jeunes) que le cannabis est un produit anodin. Après la réalité étant que de nombreux jeunes en consomment malgré l'interdiction, il faudrait, comme dit plus haut, réfléchir sur ce besoin de drogue douce et mettre en place une prévention de qualité.


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