Sarkozy sonne la retraite

par olivier cabanel
mardi 13 avril 2010

Les élections régionales passées, Nicolas Sarkozy, craignant que cela puisse plomber le scrutin s’il le faisait avant, a décidé maintenant de s’attaquer aux retraites.

La France d’en bas est heureuse d’apprendre que tout ça va être débattu, que les syndicats seront reçus, écoutés…mais seront-ils entendus ?

Pour l’instant la concertation est mal partie, et le gouvernement ne semble pas prêt au dialogue. lien

Le projet gouvernemental est clair : allonger l’âge de la retraite, et faire financer les retraites par les plus pauvres, puisqu’ils sont plus nombreux.

Choix discutable.

En effet, prolonger l’âge de la retraite ne va pas arranger les comptes du chômage.

Celui-ci vient de passer la barre des 10%, et en prolongeant les années de travail, cela aura pour effet de priver encore plus de français de travail.

Comme les seniors sont souvent, (avec les plus jeunes), les plus touchés par le chômage, cela va plomber encore plus les finances des Assedic, et celles de la sécurité sociale. lien

C’est ce que défend entre autres l’économiste Jacques Généreux qui prône le maintien de la retraite à 60 ans.

Il argumente qu’il vaut mieux augmenter les ressources des populations âgées.

Pour ce faire il préconise une légère augmentation du taux de cotisation (0,4 à 0,5 % par an d’ici 2050.

Ensuite, il propose de modifier « l’assiette » en cotisant sur 100 % de la valeur ajoutée (au lieu des 60% actuels) ce qui permettrait alors de baisser le taux de cotisation. lien

Pour lui, allonger la durée de cotisation reviendra fatalement à diminuer les pensions.

Un autre système existe, celui qu’à développé José Pineras au Chili, la retraite par capitalisation.

10% de votre salaire capitalisé de 20 ans à 65 ans permet de dégager une retraite sure et importante. lien

Sauf que dans les cas de chômage, le travailleur ne peut compter sur la solidarité des autres.

Des améliorations ont été trouvées, et même si aujourd’hui certains commencent au Chili à critiquer ce système, il faut reconnaitre que ce pays est passé de la 71ème position (sur 72), à la 5ème position, des pays le plus libre économiquement au monde.

Quant au système des « fonds de pension », la crise financière en a montré les limites.

La situation actuelle française est complexe.

Il y a d’abord une large inégalité sur le montant des retraites.

Les premiers privilégiés sont les patrons.

Mieux que le slogan sarkozyste qui promettait de « travailler plus pour gagner plus », en voici un nouveau : « ne plus travailler pour gagner plus  ».

La preuve ? Lindsay Owen Jones, (ex l’Oréal) récolte 3,4 millions d’euros par an soit 283 000 euros par mois. Il est suivi de près par Antoine Zacharias (ex-PDG de Vinci) qui touche 183 000 euros mensuels, puis Igor Landau (ex-président du directoire d’Aventis) qui perçoit 150 000 euros mensuels.

En « queue de peloton », on trouve Edouard de Royère ex-PDG d’air liquide, (116 000 €), Daniel Bernard, ex-président de Carrefour (100 000 € mensuels), et Bertrand Collomb, ex-PDG de Lafarge qui doit se contenter de 83 333 € mensuels... lien

Voyons qui sont les autres privilégiés.

Les salariés du privé qui gagnent aujourd’hui plus de 11 540 € par mois bénéficient d’un complément de retraite.

Mais le régime étant déficitaire l’AGIRC (association générale des institutions de retraite des cadres) puise dans « le pot commun » ce qui fait que 3,9 millions de cadres paient pour les salariés privilégiés. lien

Un autre économiste, Thomas Piketty à un angle de réflexion différent.

Considérant qu’il y a 200 régimes différents de retraite en France, il propose une fusion générale des régimes, provoquant la disparition des régimes spéciaux.

Le principe qu’il imagine est simple : Plus on travaille longtemps, plus la retraite est importante, mais en contrepartie, on part à la retraite quand on veut.

Pour lui, fixer un même âge de la retraite pour tout le monde n’a pas de sens, tout doit dépendre de la pénibilité du travail. lien

Un artiste…un universitaire, pourra désirer travailler au-delà de 70 ans, mais un conducteur de poids lourds risque de trouver le temps long.

Le montant de la retraite est donc fonction de la masse salariale, avec comme seul inconvénient, c’est que le niveau des pensions peut baisser, mais que par contre, le système est toujours à l’équilibre. lien

Ils sont nombreux à dénoncer les inégalités devant la retraite. Aujourd’hui la retraite à 50 ans avec 9000 € par mois à été approuvée pour 340 fonctionnaires de l’union européenne. lien

Quant aux 129 très hauts fonctionnaires de l’UE, ils croulent sous les privilèges : pour gagner 70% de leur dernier salaire, il leur suffit de 16 ans de présence, et même un passage plus court leur donne droit à de belles pensions.

Tel Jacques Barrot, qui après 5 ans de mandat recevra bientôt près de 5000 € mensuels.

D’autres inégalités existent au plus haut niveau de l’état, du président de la république, aux députés, en passant par les ministres, et tous les conseillers, fonctionnaires gouvernementaux.

les retraites pour ces nantis ne posent aucune angoisse.

Le cumul des retraites étant autorisé, Jacques Chirac est à 31 000 euros mensuels  lien , et Sarkozy n’est pas à plaindre (23250 €).

Quant à la retraite des fonctionnaires, elle est d’une injustice flagrante tant sur le montant que sur les autres avantages, puisqu’après avoir effectué 15 ans de service, les fonctionnaires peuvent être admis à la retraite. lien

L’inégalité perdure entre les hommes et les femmes et il est prioritaire de la rééquilibrer. lien puisqu’elle est de 44% inférieure à celle des hommes. lien

Elle perdure aussi pour les retraites agricoles puisqu’elles sont parfois 50% plus basses. lien

La moyenne paysanne est de 780 € alors que la moyenne française est de 1250 €.

A ce stade de la réflexion il faut constater que les retraites les plus importantes (283 000 € par mois), sont 362 fois plus importantes que la retraite la plus basse. lien

Pour les salaires, comme pour les retraites, l’inégalité semble être devenue la règle.

D’après Eurostat, la France est l’un des pays les plus inégalitaires pour les revenus des plus de 65 ans. lien

Lorsque l’on sait que le seuil de pauvreté est fixé à 880 €, on constate que l’inégalité est flagrante.

Il serait donc temps de remettre en place de la justice sociale et de réduire les inégalités si l’on veut sortir les retraites de l’impasse actuelle.

Mais Sarkozy voudra-t-il battre en retraite ?

Car comme disait mon vieil ami africain :

« On n’écrase pas deux fois de suite les testicules d’un aveugle ».

Dessin de Faujour, avec l’aimable autorisation de l’auteur. © Faujour-Iconovox


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