Sauver l’agriculture française !
par Christophe Bugeau
mercredi 10 février 2016
Nous assistons à nouveau à des protestations des agriculteurs qui se retrouvent pour nombre d’entre eux quasiment acculés à la faillite. Alors que des négociations sont en cours avec la grande distribution pour trouver un accord sur des prix permettant le maintien de l’activité, n’est-il pas temps de changer de direction et de revoir notre politique agricole ?
Nous assistons aujourd’hui à un énième épisode où les agriculteurs sont pris à la gorge. Le nombre d’exploitation a diminué de moitié en 20 ans et il est tombé à moins de 500 000. Nous allons sûrement devoir prendre des mesures fortes pour arrêter l’hémorragie et empêcher de nouvelles faillites d’agriculteurs sinon notre tissu rural va finir de s’étioler. Nous risquerions de voir mise en cause notre autonomie alimentaire qui a toujours été un impératif pour tous les gouvernements français d’après-guerre.
Le problème de fond vient de la position de force des acheteurs qui parviennent entre les grossistes (souvent des centrales d‘achat appartenant aux grandes surfaces) à prendre une marge de 60-70 % alors que les agriculteurs sont soumis à une concurrence internationale qui les contraint à ne percevoir que la portion congrue.
Il sera nécessaire de prendre des mesures de long terme (voir http://christophebugeau.fr) pour recentrer les exploitations sur des productions à forte valeur ajoutée, utilisant moins de pesticides et de se déclinant en appellations d’origine contrôlée. Mais en attendant des pressions fortes doivent être faites sur les circuits de distributions.
Il est nécessaire de limiter la marge des grossistes et revendeurs à 50 % du prix hors-taxe auquel les produits non transformés sont vendus aux consommateurs. Cette limitation des marges permettrait aux producteurs de percevoir 50 % de leur côté et non les 30-40% actuels qui ne couvrent pas les charges. Et cela éviterait aux grandes surfaces d’avoir envie de se fournir à l’étranger car ces dernières ne couvriraient alors plus leurs frais.
Cette mesure valable pour les fruits et légumes, le lait comme la viande concernerait un grand nombre d’agriculteurs, éviterait d’avoir une hausse des prix des consommateurs car cela obligerait les grandes surfaces à limiter leurs bénéfices. Ces dernières sont en situation de force ce qui oblige leurs fournisseurs à se soumettre de facto au prix qu’ils proposent.
Lorsque l’on a affaire en économie à une situation où un petit groupe d’acheteur fait face à un grand nombre de vendeur, il s’agit d’un « oligopsone » l’inverse d’un petit groupe de producteurs (un oligopole). Dans les deux cas, il est du devoir de l’Etat d’intervenir pour rétablir un juste équilibre du marché !
Il est normal que les agriculteurs puissent vivre dignement de leur activité tout en continuant d’assurer une alimentation de qualité et notre autonomie alimentaire qui sera certainement mise à mal avec une population mondiale en croissance constante.