Un petit monde Fantastique
par Benji
vendredi 20 janvier 2017
Certains milieux font du diplôme l'élément central. Il est difficile de définir son identité sociale en dehors de ce critère. Heureusement, un petit monde fantastique existe où aucun CV n'est demandé.
En 1984 David Lodge écrivait « small word » traduit en français par « un tout petit monde ». Cet ouvrage a remporté un immense succès en décrivant le monde très fermé des enseignants-chercheurs.
J’évolue dans ce petit monde depuis maintenant 10 ans. Ce qui frappe c’est que ce cercle très fermé ne vous considère qu’en fonction de votre CV. Quel que soit votre interlocuteur, la première question que l’on vous pose est : « tu as soutenu ta thèse où » et la seconde « et tu as eu quelle mention ». On attribue donc un « pedigrée » à chacun en fonction de quelques critères objectifs : nom du directeur de thèse, école doctorale fréquentée, mention obtenue et articles publiés dans les revues classées. J’ai fini par croire que les individus existaient par leur CVs et leur diplôme.
Jusqu’au jour où j’ai intégré un autre monde, parallèle celui-là. Loin des contraintes académiques, un petit monde fantastique s’est construit, au sein d’un endroit atypique : un sauna. Ce qui stupéfait au premier abord c’est qu’on ne vous demande jamais votre diplôme, encore moins votre mention. Dans cet endroit réservé à la détente, les individus se croisent, se parlent sans a priori. Situation surprenante, il semblerait, que toutes les CSPs (catégorie socio-professionnelle) soient représentées. Comme je n’ai jamais pu m’empêcher d’investiguer sur les parcours des uns et des autres, j’ai découvert des profs, professions libérales, élus, ouvriers et employés. Mais là, pas de hiérarchie. Tout le monde sourit à tout le monde et chacun raconte sa vie, un peu comme au café du commerce.
J’ai une tendresse particulière pour ces gens qui ne font pas de manière. Ceux qui acceptent l’autre sans barrière. J’ai d’abord trouvé la situation curieuse et je me suis demandée pourquoi ce petit monde parallèle en est arrivé à voir se développer une tribu dont les membres sont liés les uns aux autres par un lien imperceptible. L’absence de code vestimentaire (tout le monde est en maillot de bain) facilite vraisemblablement la communication de mon petit monde fantastique. Dans ce petit monde, il est possible de croiser toute type de personne. Ce microcosme représente la société toute entière. J’ai beaucoup peiné à trouver ma place dans mon petit monde professionnel. Au contraire, j’ai été accueillie à bras ouverts par mon nouveau petit monde fantastique, ma nouvelle tribu. La construction d’une identité passe aussi par la découverte de chemins parallèles…
Au final, ce monde est plus proche de celui décrit par JJ. Goldman : « c'est un tout petit monde où s'abritent nos saisons petite boule ronde sous les ailes d'un avion et partout des gens qui dansent pour oublier un instant la nuit et le silence et les peines du présent » que de celui de David Lodge.