Une nouvelle mesure pour l’emploi des jeunes

par Carreau G
mercredi 25 août 2010

Pour la fin de l’année, les missions locales se sont engagées auprès de l’état pour signer prés de 10 000 engagements de mission pour des Services Civiques (SC). Bien que les motivations qui ont conduit à cette mesure sont louables, les modalités de mise en œuvre, ainsi que les conditions méritent qu’on se penche dessus. Un petit zoom sur cette mesure.

De quoi s’agit-il ? Le Service Civique est une mesure prise par le gouvernement en ce début d’année 2010 pour aider à sortir de la crise. L’objectif est de valoriser le parcours des jeunes pour faciliter leur accès à l’emploi, tout en leur permettant de réaliser une mission d’intérêt public auprès d’une association, d’une ONG, d’une collectivité territoriale…

L’engagement dure entre 6 et 12 mois et permet à celui qui s’engage de bénéficier d’une « gratification » de base de 441 euros par mois. Il est possible, sous certaines conditions de toucher jusqu’à 641 euros par mois. La mission a une durée qui va de 24h à 48h, la durée moyenne (cf site du Service Civique, rubrique FAQ) étant de 35 heures. Cette gratification ne peut pas être cumulée avec les allocations chômage, ou le RSA. Mais elle peut tout à fait se cumuler avec des études ou un job. Pour ceux qui ont des journées de 40 heures…

Pour l’année 2010, l’objectif une fois la mesure mise en place est de réaliser 10 000 engagements. Par la suite, l’état table sur un modeste objectif de 75 000 SC par an. En comptant bien évidement sur le concours des missions locales et des points informations jeunesses, qui sont déjà largement sollicités pour mettre en place le RSA jeune, le plan Rebond, les contrats CIVIS… ce, avec des moyens amplifiés certes, mais uniquement pour l’année en cours. Il semble évident que nous serons sorti de la crise d’ici là.

Le SC en tant que tel est une mesure, qui, dans un monde parfait, servirait de tremplin à des jeunes tout en leur donnant un moyen de subsistance. Moyen de subsistance qui devient essentiel lorsque l’on constate que le chômage des jeunes frôle les 25% des actifs de 15 à 24 ans ; contre 6% des 50 ans et plus (statistiques 2009 - avant crise - de l’Observatoire des Inégalités). La plupart de ces jeunes n’ayant le droit à aucune rémunération, qu’ils soient en situation de rupture familiale, ou pas :

- Les droits au RSA jeune ne s’ouvrent qu’après deux ans d’expérience professionnelle au cours des trois années passées. Avec 34% des actifs de 15 à 24 ans qui occupent un emploi précaire, je vois mal comment, et surtout en combien de temps, un jeune peut parvenir à débloquer ces droits là.

- Les jeunes ont la possibilité de signer un contrat d’accompagnement CIVIS, qui permet d’ouvrir droit à 1800 euros (exceptionnellement en cette année de crise : 900 euros l’an passé) réparti sur l’année. Autant dire qu’il faut penser à se serrer la ceinture.

- Pour toucher l’aide au retour à l’emploi (ARE), il faut avoir travaillé un minimum (6 mois), qui malgré tout n’est pas toujours facile à atteindre.

Autrement dit, la « gratification » de 2.29 à 6.67 euros de l’heure sera bienvenue pour quantité de jeunes actifs, qui finalement, n’ont pas mieux.


Cette mission sera, aux dires de l’état, reconnue grâce au passeport orientation et au livret de compétence. Heureusement d’ailleurs qu’il y aura cette reconnaissance, permettant à des jeunes de faire leurs premières armes dans le monde du travail, pour ensuite vendre cette expérience lors d’entretiens d’embauche. Deux points sont à remarquer :

1 : Les deux portefeuilles de compétences, ne sont toujours pas officiellement mis en place par les pouvoir public. Et quand bien même ils le seraient, les entreprises, cabinets de recrutement et autre, n’en ont jamais entendu parler.

2 : Les missions que les jeunes auront à réaliser doivent être très spécifiques : (vu sur le site officiel) : coordination de la campagne de pommes pour la fabrication de jus de pommes, aide à la resocialisation et re-scolarisation des enfants Haïtiens… bien que je ne doute pas de l’aspect humain et citoyen de ces missions, l’intérêt professionnel peut être dur à déterminer.

Quand bien même, un jeune qui sort de ses études pour ensuite réaliser une mission de ce type, aura-t-il plus de facilité à décrocher un premier emploi stable, que le jeune qui sort tout juste des études, avec des connaissances « fraiches » ? La question mérite d’être posée.

Par ailleurs, étant donné qu’il est assez difficile de vivre avec un SMIC actuellement en France, je vois mal comment un jeune, consommateur par nature, pourrait s’en sortir entre son loyer, ses charges, un peu de nourriture quand même, avec, au grand maximum 640 euros ! Ces missions ne sont donc destinées qu’à des jeunes ayant des parents pouvant les aider ou les entretenir ? Il fallait bien évidement une mesure de plus pour lutter contre la précarisation des familles aisées, qui, heureusement, ne seront pas imposés sur ces revenus là. C’est évident que les parents des jeunes en difficulté seront eux aussi présent, surtout dans les quartiers dit « sensible » où le chômage est le plus élevé.


Chacun est juge de la pertinence, de l’utilité, et des modalités d’application de cette mesure. Cependant était ce bien le meilleur moyen de lutter contre les problèmes qui touchent la jeunesse : précarisation, absence de perspective, absence de repère, difficultés sociales parfois extrême, difficultés à obtenir un emploi valorisant… ?


Lire l'article complet, et les commentaires