Vitrines de Noël : la magie s’en est allée
par Fergus
vendredi 19 décembre 2014
Comme chaque année, les vitrines animées des Grands magasins de Paris attirent de nombreux visiteurs dans les semaines qui précèdent les fêtes. Le rituel semble immuable, et pourtant quelque chose a changé au fil du temps...
Cela faisait plus de 30 ans que nous n’étions pas retournés voir les vitrines animées des Galeries Lafayette et du Printemps. La dernière fois que nous nous y étions rendus, c’était pour accompagner notre fils, alors âgé de 5 ou 6 ans. Depuis, de multiples évènements, trop souvent tragiques ou déprimants, se sont succédé dans l’actualité durant ces décennies qui ont vu notre société se transformer comme jamais auparavant tout au long de son histoire. Malgré son fondement mercantile, il est toutefois une tradition sympathique qui n’a pas changé d’un iota depuis cette époque et qui perdure en venant égayer le quartier de l’Opéra dans la grisaille de l’hiver : celle des animations de Noël mises en place dans les vitrines des Grands magasins de la capitale pour les fêtes de fin d’année afin d’attirer les chalands aux portes de ces antres de la consommation.
Dimanche dernier, c’est en compagnie de nos petits-enfants que mon épouse et moi avons pris le métro, direction la station Chaussée d’Antin, pour leur faire découvrir les animations installées dans les vitrines des Grands magasins du boulevard Haussmann. Pas facile, même en ce dimanche matin, de progresser dans la cohue pour permettre aux enfants d’accéder à ces vitrines, mais on y parvient malgré tout, pour le plus grand plaisir des petits, tout heureux de voir d’aussi près se déhancher et grimacer autant de surprenantes peluches.
À l’évidence, le spectacle plait aux enfants, particulièrement celui qui est donné par les automates des Galeries Lafayette, nettement plus attirants que les réalisations du Printemps, à la fois plus banales et trop centrées sur la promotion de la marque Burberry. Mais si le spectacle plait aux enfants, force est de reconnaître que mis à part de rares bambins, ils n’ont pas, de nos jours, ce regard ébloui qu’avaient autrefois les gamins qui découvraient le monde imaginaire et féérique des vitrines de Noël. Un monde si éloigné de ce qu’ils connaissaient de la vie qu’ils restaient longtemps immobiles, les yeux brillants devant les vitrines, fascinés par les expressions des personnages, par la débauche des couleurs et par les mouvements des automates.
Aujourd’hui, rien de tel. Certes, les enfants sont toujours contents d’être là, et certains – notamment parmi les plus petits – sont manifestement ravis ; mais à de rares exceptions près, leurs yeux ne pétillent plus du même éclat que naguère, et les animations ne suscitent plus de leur part les mêmes cris d’enthousiasme. Trop tôt habitués aux jouets électroniques spectaculaires, aux jeux vidéo d’héroic fantasy ou aux effets spéciaux des films d’animation en 3D, les enfants passent désormais en revue les vitrines sans s’y attarder avec l’émerveillement que manifestaient naguère au même âge leurs propres parents, voire leurs grands-parents*. Il faut se rendre à l’évidence : avant même d’avoir atteint leur sixième anniversaire, les gamins de 2014 sont déjà très largement blasés pour la plupart d’entre eux.
On se prend alors, avec une once de nostalgie, à regretter de ne plus voir dans leurs yeux le bonheur de cette parenthèse enchantée dont nous avons gardé le souvenir. Les vitrines de Noël sont pourtant toujours là, mais la magie s’en est allée au pays des pixels !
* La première vitrine de Noël de Paris date de... 1909 ; consacrée au thème du Pôle Nord, elle avait été installée sur la rive gauche, au Bon Marché. La généralisation des animations dans les vitrines des Grands magasins de la capitale date, quant à elle, de 1947. Depuis cette année-là, la tradition ne s’est jamais démentie.