Découverte d’un gisement de reptiles marins dans l’archipel du Svalbard.

par Thucydide
mardi 10 octobre 2006

L’archipel de Svalbard, plus connu sous son nom français de Spitzberg, est un ensemble d’îles appartenant à la Norvège et situées au-delà du cercle polaire arctique.

Haut lieu de la pêche baleinière par le passé, il est à présent celui de la découverte d’un important gisement de fossiles des équivalents jurassiques des baleines : les ichtyosaures et plésiosaures. Ces reptiles géants hantaient les mers de l’ère secondaire. Les seconds ne disparurent qu’à la fin du crétacé, en même temps que les dinosaures auxquels ils ne sont pas apparentés -même si, dans l’imagerie populaire, tous les gros reptiles du secondaires sont des "dinosaures".

Le gisement nouvellement découvert comporte les squelettes de 7 ichtyosaures et 21 plésiosaures, une mine d’informations sur certains des animaux les plus étonnants du Mésozoïque, ou ère secondaire. Leur plan d’organisation était bien différent de celui des célèbres dinosaures, et leur disparition sans descendants (contrairement aux dinosaures, qui survivent sous la forme des oiseaux) est une perte pour la faune actuelle.

Ainsi, les ichtyosaures représentaient une énième variation de la nature sur le mode du gros organisme nageur se nourrissant d’autres poissons. Comme les requins, tarpons, thons, espadons, coryphènes, dauphins et baleines, les ichtyosaures se caractérisaient par leur taille élevée (pouvant dépasser 15 m), leur corps profilé et hydrodynamique propulsé par une nageoire caudale. A l’instar des poissons et des requins, cette nageoire caudale était verticale, alors qu’elle est horizontale chez les cétacés. A cette différence près, les ichtyosaures étaient en bien des points semblables aux dauphins, dont ils occupaient la niche écologique. Le plus grand d’entre eux, d’une vingtaine de mètres, était Shonisaurus de la fin du Trias.

Mais ce plan d’organisation, qui est un cas d’école classique pour l’illustration du phénomène de "convergence évolutive", cher aux évolutionnistes et taxinomistes, est encore surpassé en étrangeté par celui des plésiosaures, précisément parce que ces derniers sont restés uniques en leur genre. Contrairement aux ichtyosaures, et à la plupart des vertébrés nageurs, qui se propulsent par les mouvements de leur colonne vertébrale prolongée en une queue puissante, les plésiosaures utilisaient leurs nageoires comme ailerons, en un "vol aquatique" semblable à celui des tortues marines actuelles, ou encore des manchots, ou même de certains oiseaux aquatiques tels que les pingouins. Mais contrairement aux tortues ou aux manchots, dont les membres postérieurs sont peu développés et ne remplissent qu’une fonction de gouvernail, les plésiosaures possédaient des pattes arrière développées en ailerons presque aussi gros que les antérieurs. Tout porte à croire que ces ailerons participaient activement à la propulsion, selon un schéma de "vol aquatique" à quatre membres, dont nous ne possédons pas de modèle actuel. Même celui des otaries et des morses, avec leurs quatre ailerons, ne leur correspond pas vraiment, car il constitue une sorte d’amalgame du modèle tortue et du modèle phoque.

Les plus grands plésiosaures étaient Kronosaurus, d’environ 10-13 mètres de long et dont le crâne était plus imposant que celui d’un tyrannosaure, et Liopleurodon, qui aurait allègrement dépassé les 20 mètres. Tous deux étaient les équivalents mésozoïques des prédateurs actuels que sont les épaulards et les cachalots, se nourrissant de proies de grande taille -poissons, reptiles marins, céphalopodes. Kronosaurus et Liopleurodon étaient les représentants les plus spectaculaires du groupe des pliosaures, dont le cou tendait à se raccourcir à l’instar de celui des cétacés. Une autre branche, celle des élasmosaures, se caractérisait au contraire par un coup "de cygne" extrêmement long et terminé par une tête proportionnellement minuscule.

C’est dire si toute nouvelle découverte de ces étranges créatures est importante pour la connaissance de nos faunes passées. Les squelettes mis au jour au Svalbard fourniront de précieuses indications sur la biologie des ces êtres disparus, que la magie des images de synthèse, telles celles des documentaires de la BBC anglaise, permet de faire revivre avec un réalisme toujours accru.


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