Fukushima... bye les robots

par olivier cabanel
vendredi 17 avril 2015

Décidément, Tepco joue de malchance, il pensait avoir trouvé une parade à la situation inextricable rencontrée : tenter de comprendre ce qui se passait au cœur des réacteurs fondus…trouver la trace du corium en balade, et tout ça grâce à un robot.

Il était question début mars 2015 de retrouver le corium perdu, et une mesure originale avait été tentée : utiliser les rayons cosmiques afin de pratiquer des tests…

Il s’agissait d’utiliser des particules élémentaires, appelées muons, lesquels auraient permis de déceler la présence du combustible dans le réacteur, pratique qui avait permis de localiser le combustible dans les piscines de refroidissement.

Ces cousins des électrons ont la faculté de traverser librement de nombreux matériaux, mais ils peuvent être stoppés par des substances à haute densité, et ils auraient pu permettre de produire une image de la présence du combustible nucléaire dans le réacteur. lien

Peine perdue, la tentative a échoué et la seule certitude qu’ont les exploitants du site, c’est que les réacteurs 1,2 et 3 ont fondu, et que personne ne peut dire où sont passés les coriums. lien

Alors il fallait tenter autre chose : les robots, puisque toute intervention humaine est impossible : dans cet environnement dangereux, les radiations tuent dans l’heure.

Sauf qu’on sait, depuis Tchernobyl, que les robots, aussi sophistiqués soient-ils, ont une électronique qui ne résiste pas longtemps aux niveaux élevés de radioactivité.

Et puis, même si on retrouvait un jour ces coriums, on ne voit pas très bien comment il serait possible de les récupérer, étape pourtant essentielle pour commencer le démantèlement.

Comme l’expliquait Jean-Pierre Petit lors d’une communication : « le robot est resté sur place, K.O. Arrivé au bord du cratère, il a fonctionné pendant une seconde, puis s’est arrêté ». lien

Ce qui n’empêche pas le groupe « INTRA » (groupe d’intervention robotique sur accidents » de tenter à mettre au point une dizaine de robots pour intervenir dans le cas d’un accident nucléaire en France.

Ces robots ont un prix, et il est question d’une dépense de 4 millions d’euros annuels.

Les animateurs de l’Intra avaient envoyé en 2011, 130 tonnes de matériel à Fukushima, et avait proposé à Tepco les robots français, mais ce dernier a préféré la technologie américaine développée par IRobot. lien

À la mi-avril, Tepco a donc tenté d’envoyer un robot dans le réacteur dévasté de l’unité n°1, afin de tenter de localiser le corium…mais finalement, le robot a cessé toute activité le 10 avril dernier.

Ce qui a permis à l’exploitant nucléaire de déclarer laconiquement en utilisant une magnifique langue de bois : « la technologie des robots pour récupérer le corium devrait être développée » : ces robots avaient été mis au point par Hitachi, qui assurait qu’ils étaient capables de fonctionner pendant environ 10 heures, même exposés à d’importants rayonnements. lien

Pourtant, au bout de 3 petites heures, le robot à cessé de fonctionner.

Sur ce lien, une courte vidéo résumant l’accident, y compris comment les robots devaient intervenir.

On peut légitimement se poser une question : n’aurait-il pas été plus intelligent de mettre au point des robots capables de travailler dans un environnement si difficile, au lieu de construire à tout va des centrales nucléaires, sans se donner les moyens de pouvoir intervenir en cas d’accident majeur ?

Pour la 1ère fois, Tepco à présenté, le 13 avril, des images inquiétantes de l’intérieur du réacteur n°1, confirmant que la radioactivité qui règne dans l’enceinte se mesure de 6 à 25 sieverts/heure, ce qui entraînerait la mort d’un homme en moins d’une heure, et sur ce lien, on peut voir les images peu rassurantes qu’a réussi à prendre le robot, prouvant que plus de 4 ans après la tragédie, rien n’est terminé.

À la seule vue de cette courte vidéo, on comprend bien que rien n’est maitrisé, et que la radioactivité continue de se dégager du site dévasté, sans qu’il soit possible de l’empêcher.

Aujourd’hui, la situation continue donc de se dégrader, les fuites radioactives se multiplient, l’eau polluée continue de s’accumuler dans les plus de 800 réservoirs, des milliers de sacs de terre souillée représentant 200 000 tonnes s’entassent sur des hectares, des dizaines de milliers de japonais sont privés de leur habitation, installés dans des baraquements de fortune, dans des zones encore polluées pour longtemps, alors que l’état japonais les encourage à retourner dans leurs maisons…

Quant aux 70 milliards que l’état Japonais a avancés à Tepco, il pourrait bien devoir attendre 30 ans pour les récupérer… lien

En France, le petit monde du nucléaire continue aussi à s’enfoncer dans la crise, financière mais aussi sanitaire.

Financière, puisque chacun sait que la dernière technologie vantée par les lobbys, les EPR, commencent à couter très cher, et est en grande partie responsables de la quasi faillite de l’entreprise nationale Areva.

En Finlande, ou à Flamanville, les délais et surtout les prix, ont explosé.

Flamanville devait être opérationnel en 2012…on envisage aujourd’hui 2017…et la facture est passé de 3 milliards d’euros à 9 milliards. lien

Ce dépassement de facture est d’autant plus dommageable que le contrat signé avec la Finlande stipulait que tout dépassement des 3 milliards convenus serait à la charge d’Areva, donc de la France, actionnaire majoritaire de l’entreprise (86%)…

La perte record atteindrait les 5 milliards d’euros, et le réseau « sortir du nucléaire » alerte les conséquences à venir de ce gouffre financier, lequel sera, de toute évidence payé par les consommateurs. lien

Mais ce n’est pas tout, des « anomalies » ont été découvertes pour la cuve de Flamanville, or la cuve est l’organe essentiel de la centrale.

C’est l’ASN (autorité de sureté nucléaire) qui a fait cette découverte, constatant la présence d’une zone « présentant une concentration importante en carbone et conduisant à des valeurs de résilience mécanique plus faibles qu’attendues ».

Ces zones à problème concernent le fond de la cuve et le couvercle de celle-ci, et Areva a proposé à l’autorité nucléaire de procéder à une nouvelle campagne d’essais…mais on ne voit pas très bien pour quelles raisons la situation pourrait changer ? lien

En tout cas, il semble bien que l’ASN soit prête à suspendre le chantier, tant la question cruciale d’une défaillance de la cuve reste posée, Pierre-Franck Chevet, président de l’autorité, ayant qualifié de « sérieuse, voire très sérieuse » l’anomalie de la cuve de l’EPR, affirmant que si les nouveaux tests confirment ce qui a été découvert « je ne vois pas d’autres solutions que de la changer ». lien

Or, il faut savoir que cette cuve a été posée en janvier 2014, et qu’elle est déjà raccordée et soudée aux tuyauteries du circuit primaire de refroidissement.

Un changement de cuve repousserait un peu plus la date de mise en service, et ferait grimper un peu plus la facture. lien

Quant aux vieilles centrales françaises, 5 d’entre elles sont pointées du doigt par l’ASN, il s’agit de Chinon, Bugey, Cattenom, Belleville, Cruas-Meysse.

Dans son dernier rapport, l’autorité de surveillance les note défavorablement et réclame une mise à niveau importante de l’outil industriel, ce qui aura un prix. lien

Voila qui risque de ne pas faire les affaires des consommateurs français, lesquels doivent s’attendre à voir leur facture d’électricité faire prochainement quelques bonds.

En effet, les experts de la Cour des Comptes ont fait les calculs : pour un cout final du chantier à 8,5 milliards (dépassés aujourd’hui), le prix serait de 107 €/MWh…à comparer avec les 77 € de l’éolien, ou les 76 € du solaire photovoltaïque (prix moyen 2017). lien

Pour aller un peu plus loin, il faut savoir que le prix de l’électricité, sur le marché de gros, est quasi inférieur de moitié à celui qui concerne les installations nouvelles, ce qui veut dire qu’une nouvelle centrale nucléaire ne pourra jamais être rentabilisée, à moins d’augmenter drastiquement le prix du KW, et du coup les énergies renouvelables et propres deviennent compétitives par rapport aux énergies fossiles et sales. lien

Et pourtant, le gouvernement continue à traîner les pieds pour mettre en place la transition énergétique, d’autant que ce sont maintenant le Sénat et l’Assemblée nationale qui s’affrontent sur le thème, le Sénat ayant retiré la date butoir de réduction du nucléaire à 50% en 2025. lien

C’est donc peut-être le moment pour les consommateurs avisés de changer de fournisseur d’énergie, ou de produire leur propres énergie, d’autant qu’EDF n’est pas l’entreprise la mieux placée comme on peut le constater sur ce lien.

Comme dit mon vieil ami africain : « l’oiseau né dans une cage croit que voler est une maladie  ».

L’image illustrant l’article vient de mirror.co.uk

Merci aux internautes de leur aide précieuse

Olivier Cabanel

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