Google Phone contre iPhone

par Charles Bwele
vendredi 26 septembre 2008

Des objets nomades à l’internet mobile via les systèmes d’exploitation, tout laisse présager d’intenses fleurets mouchetés ou un choc de titans entre Google et Apple.

Alien versus Predator

Réponse directe et très prometteuse au iPhone, le premier Android – ou G1 signé Google, T-Mobile et HTC – devra faire nettement mieux pour concurrencer le bijou techno made by Steve Jobs. Analyse comparative des deux super-gadgets.

Le clavier virtuel du iPhone et sa sensibilité intelligente sont certes une merveille d’innovation, mais les claviers classiques du Blackberry, du Treo et du G1 sont nettement plus confortables a fortiori pour les dégénérés du jeu vidéo mobile... Du calme, ce n’est qu’un sarcasme. Prêts ? Combattez ! Ce confort digital a un prix : le G1 est beaucoup moins compact que le iPhone dans la poche frontale de votre jean. Un pouce levé pour la batterie du G1 aisément plus remplaçable que celle propriétaire du iPhone.

Ce dernier dispose d’une mémoire intégrée de 8 ou 16 Go – à quand une version 32 Go ? – tandis que le G1 n’a qu’une mémoire initiale de 192 Mo heureusement livrée avec une carte SD d’un 1 Go... Hissant son prix final à une altitude « quasi-iphonique » : 179 $ contre 199 $ pour le bébé d’Apple. Si Google et HTC veulent réellement faire d’Android un omniphone digne de ce nom, une mémoire nettement plus étendue avec un meilleur rapport qualité-prix sera indispensable.

Le G1 fournit d’emblée les services googléens GPS (Maps, Street View) associés à une boussole interne qui n’a certes aucune utilité immédiate pour le nomade urbain, mais le deviendrait s’il se trouve en territoire plus ou moins inconnu. Nul doute que plusieurs geeks dériveront ingénieusement son usage à l’image des mash-up dans la géolocalisation. L’application Shopsavvy du G1 offre une interactivité sans pareil : en photographiant le code-barre d’un produit avec la caméra 3 millions de pixels, Android ouvre un onglet d’arrière-plan et propose des liens web commerciaux offrant ce même produit à différents prix ainsi que la géolocalisation des points de vente les plus proches. Ici, le lien commercial contextuel qui fait la force de Google a été raffiné en hyperlien physique commercial à l’image du code QR nippon. Magistral.

La quasi-totalité des applications Google en ligne sont accessibles hors ligne au G1 (sauf Google Maps du fait de sa configuration netware inhérente). Le calendrier intégré d’Android n’est qu’une stricte reproduction du très apprécié Google Calendar. En outre, l’utilisateur peut synchroniser à volonté ses données Google Apps (courrier, traitement de texte, tableur, etc.) dans son mobile et sur le web. Une fonctionnalité très pratique en cas de rupture/d’indisponibilité du réseau. Avec son Macintosh, Apple fut le pionnier des ordinateurs personnels multitâches. Apparemment, cette philosophie n’imprègne que très peu son iPhone. Basculer d’une application à l’autre et copier/coller des données deviennent un jeu enfant avec Android. Sur ce point, Windows Mobile et Apple devront prendre de la graine.

À ce jour et ce quoi qu’on en dise, le iPhone est une solide pôle position et le sex-symbol du mobile multimédia. Rien de tel côté Android qui propose néanmoins un lien direct vers la boutique e-musicale d’Amazon. Reposant complètement sur de l’open source, le gPhone aura donc tôt ou tard son lecteur multimédia polyvalent (type VLC ?). De quoi en finir avec la préalable conversion de fichiers audio/vidéo avant transfert vers le iPhone...

Télécodes

En fait, Android ce n’est pas seulement un produit Google + HTC + T-Mobile, c’est d’abord le cœur du consortium Open Handset Alliance initiée certes par Google, mais fédérant une trentaine de sociétés de téléphonie et de technologie dont Audience, Broadcom, China Mobile, Intel, eBay, KDDI, Motorola, NTT DoCoMo, NVIDIA, Qualcomm, Samsung, Sprint Nextel, Synaptics, Telecom Italia, T-Mobile et Texas Instruments, pour ne citer qu’eux. C’est surtout une plate-forme open source dont l’atout-maître réside dans les multiples innovations qu’en feront les développeurs libres.

Android connaîtra-t-il une croissance explosive à la iPhone ou une robuste expansion organique ? Dans tous les cas, Google a toutes les ressources financières et technologiques pour patienter et se repositionner. Avec ce modèle mobile open source, drastique rupture dans le monde plutôt austère des télécoms, la firme de Mountain View vise simultanément Windows Mobile, Java Mobile Edition, Apple, Nokia et RIM (concepteur du Blackberry). Vaste programme.

LG et Samsung manufacturant respectivement les « pseudo-iphoniques » Vu et Instinct rattraperont difficilement Apple en focalisant sur les interfaces et en délaissant les couches logicielles. Google a vite compris que la bataille contre Apple (et Windows Mobile) se gagnera surtout sur le terrain du code et a complètement rénové sa machine virtuelle Dalvik et son compilateur bytecode « qui a un gros air, une saveur et une odeur de Java sans pour autant cloner Java », ceci afin de s’éviter les foudres de Sun Microsystems et d’orienter les développeurs en terre connue. En investissant seulement 10 millions de dollars dans le premier championnat Android de programmation et développement (thèmes 2008 : applications GPS et hardware open source), Big White inflige une leçon d’ingéniosité et d’ouverture à Big Apple versant dans une approche plus onéreuse, plus sophistiquée et plus hermétique des applications mobiles

Les équipementiers pourraient facilement dériver la plate-forme Android pour leur propre compte. Cependant, tout porte à croire que la firme de Mountain veut essentiellement acquérir une domination cognitive dans la conception de mobiles multimédia et reproduire son hégémonie publicitaire du web dans l’internet mobile ; des statistiques récentes de l’Union internationale des télécommunications démontrant que les services de données représentent actuellement plus de 20 % des revenus des opérateurs mobiles de par le monde. Deus ex machina : Google Brother mobile tombe à point nommé...

Les opérateurs télécoms n’ont qu’à bien se tenir : entre Youtube et Picasa, leur plafond mensuel à 1 Go de données provoquera bientôt quelques éruptions volcaniques auprès de leurs abonnés. Ce n’est guère un hasard si T-Mobile - membre de l’Open Handset Alliance et premier démonstrateur du G1 - a récemment aboli ce plafond, estimant que ses clients doivent pleinement disposer des capacités de leurs mobiles Android et de son réseau 3G.

D’une certaine façon, si le iPhone fut le Spoutnik des mobiles multimédia, Android pourrait bien devenir le Soyouz...

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