HADOPI, c’est fini … une censure qui fait du bien !

par Olivier from Madinina
mercredi 10 juin 2009

Soyons clair : la censure partielle de cette loi par le Conseil Constitutionnel est une excellente nouvelle pour notre démocratie dans une période où nos dirigeants semblent attachés à limiter nos libertés sur Internet. Même si elle était attendue, cette censure fait du bien. Dans les faits, et malgré les gesticulations d’un gouvernement aux aboies sur ce sujet, la loi se retrouve bel et bien enterrée. Explications.

1- Le principe de la riposte graduée imposait aux ayants droits de forts investissements pour détecter les IP « contrevenantes » sur les réseaux P2P. Il semble évident que ces derniers vont réfléchir à deux fois avant d’investir dans un système qui n’aura plus qu’une influence très mineure sur le téléchargement. Ils préfèreront probablement utiliser ces fonds à engager des poursuites médiatiques au coup par coup, plutôt que de faire de la prévention.
 
2- Mme Albanel annonce qu’elle va faire modifier la loi pour que la décision de sanction soit effectivement prise par l’autorité judiciaire. Elle semble oublier qu’il existe déjà (via la DADVSI) un arsenal juridique punissant la contre façon et que la justice risque d’être très réticente à devoir prendre en charge un nombre important de dossiers liés à l’absence de sécurisation d’une ligne Internet. Même s’il semble qu’une volonté soit affichée de créer une quinzaine de tribunaux d’instance affectés aux problèmes du droit d’auteur, cette mesure risque d’être mal interprétée après les fermetures de tribunaux de R. Dati et l’engorgement inextricable de la justice française. La logique du "deux poids, deux mesures" pourrait être très mal vécue par les magistrats et la population.
 
3- Aujourd’hui, il semble que les perdants mélangent tout : ils annoncent les uns après les autres que si le juge sanctionne, se seront les sanctions prévues pour la contre-façon, alors que la loi ne parle (UNIQUEMENT) que de manquement dans la sécurisation de la ligne. Il ne s’agit donc pas de modifier cette loi, mais de tout reprendre à zéro. Il va falloir introduire le délit de non sécurisation de ligne et lui affecter la seule sanction de coupure de la ligne tout en ne s’appuyant que sur l’adresse IP comme preuve. Encore un système bancal qui ne mènera nulle-part.
 
4- Si le gouvernement va au bout de son idée (confier à un juge le pouvoir de sanction) il va se retrouver confronté à la faiblesse, maintes fois reconnue en matière pénale, de la preuve liée à la seule adresse IP. Des avocats auront vite fait de se spécialiser dans le domaine et d’arriver à de nombreux non-lieux qui ne feront qu’enterrer un peu plus (si c’est possible) ce dispositif. Comment un juge va-t-il accepter de limiter un (nouveau) droit constitutionnel sur une preuve aussi mince et aussi difficile à démontrer ? La justice va-t-elle engager des procédures de perquisition/saisie pour une peine maximale encourue aussi "légère". Mme Albanel envisageait 1000 coupures de lignes par jour, comment l’Hadopi va-t-elle justifier le tri entre les dossiers fournis au juge et ceux qui ne le sont pas ?
 
Bref, il semble que le navire Hadopi gîte au delà du raisonnable et qu’il serait bien plus utile de remettre tout à plat en parlant, enfin, de la seule vraie question : quelle rémunération pour les artistes dans un monde de plus en plus dématérialisé ?
 

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