Implications éthiques des nouvelles technologies de l’information

par Michel Monette
mercredi 2 mai 2007

Les nouvelles technologies de l’information évoluent à un rythme tel que les législations et les organisations ont peine à s’adapter. Jusqu’où aller dans le traitement des données personnelles ? Qu’est-ce qui est acceptable en matière de biométrie, de surveillance électronique, d’identification par radiofréquence, de géolocalisation ? Et le Web sémantique, avec son potentiel de biais linguistiques, mais aussi de communication de données personnelles de machine à machine, que faire pour qu’il soit inclusif et que le contrôle de nos données personnelles ne nous échappe pas ? L’Unesco vient de publier une étude qui fournit des éléments de réponse à ces questions : mettre en place des principes infoéthiques qui guident la prise de décision.

L’étude intitulée “Ethical Implications of Emerging Technologies” a été préparée par Mary Rundle et Chris Conley de l’ONG Geneva Net Dialogue, un projet conjoint de Harvard Law School’s Berkman Center for Internet and Society (Berkman Center) et de Stanford Law School’s Center for Internet and Society (CIS).

L’originalité de cette étude est de partir des diverses technologies en fonction des divers problèmes qu’elles soulèvent, ensuite de dégager des principes infoéthiques, de revoir les technologies en question à la lueur de ces principes, puis de formuler une série de recommandations pour mettre en place les principes infoéthiques.

La partie à mon sens la plus intéressante de l’étude est celle qui dégage les principes infoéthiques à partir principalement de la Déclaration universelle des droits de l’homme : Infoethics Goals for Neutral Technologies (pages 11 à 27). On a souvent tendance à oublier la Déclaration alors qu’on devrait s’y référer constamment pour établir ses jugements sur le respect de nos droits fondamentaux.

Qui ne connaît pas les risques que posent la biométrie et les puces à radiofréquence (l’étude est éclairante sur ces risques) ? Si nous sommes plus sensibilisés à ces risques, qu’en est-il de ceux que posent les nouveaux outils de gestion de l’identité numérique censé faciliter les transactions en ligne ? (Qu’est-ce que l’identité numérique ?)

N’y a-t-il pas danger, comme le soulignent les auteurs de l’étude, de voir deux ou trois entreprises contrôler le gros des identités numériques ? Microsoft, IBM et Novell sont des gros joueurs dans cette offre d’outils permettant de gérer notre identité numérique en fonction de nos divers besoins. Certes, ces outils comportent des aspects positifs en terme de respect de la vie privée et de sécurité. Cependant, le phénomène de concentration des fournisseurs de ces outils demeure préoccupant.

Que se passera-t-il si un des gros joueurs, disons Microsoft, abuse de la confiance des dizaines, voire des centaines de millions de personnes, qui utiliseront ses outils. La chose n’est pas impossible. Mais il y a pire. Les auteurs citent Kim Cameron, celui qui est en tête du développement des outils d’identité numérique et diverses formes d’accès sécurisés chez Microsoft :

Beyond the abuse of power there are other equally chilling possible futures - involving the potential relationship between human kind and machine intelligence. I realize people are not likely to want to discuss this because it is too forward thinking, but the two actually can mutually reinforce each other in truly frightening scenarios.

J’espère que je vous ai mis suffisamment l’eau à la bouche pour aller lire l’étude. L’Unesco annonce la sortie en ligne de la version française pour le mois... d’avril 2007. Cela ne saurait donc pas tarder. En attendant, vous pouvez comme moi lire la version en anglais qui est écrite dans un langage accessible à tous.

Mary Rundle et Chris Conley, Geneva Net Dialogue, Ethical Implications of Emerging Technologies : A Survey. UNESCO : Paris, 2007. Texte intégral


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