IPv6 : 10 ans, déjà...

par Mael Le Hir
mardi 14 février 2006

« IPv6, trois lettres et un chiffre qui tardent à changer le monde. Cela fait plus de dix ans qu’on parle de ce système quasi illimité, qui attribue des adresses aux ordinateurs connectés, mais toujours rien dans les tuyaux du Réseau des réseaux. » (Le Monde du 8 février 2006).

Qu’est-ce que le protocole IP ?

IP (Internet Protocol) est l’un des protocoles fondateurs d’Internet, c’est-à-dire de l’interconnexion de machines et de réseaux. Il est chargé du bon acheminement de bout en bout des paquets de données.

Pourquoi IPv6 ?

Actuellement, la version d’IP implantée sur Internet est la v4. Elle permet théoriquement 6 milliards d’adresses, mais des problèmes peuvent commencer à apparaître à partir de 160 millions d’adresses utilisées. Le milliard d’internautes actuels doit donc se partager la plupart du temps des adresses temporaires. D’autant qu’un certain nombre d’adresses appartiennent (sans être utilisées) aux acteurs historiques d’Internet (premières universités reliées, industriels, etc.). Bref, le nombre d’adresses disponibles est de moins en moins en phase avec les besoins qui se multiplient pour différentes raisons :

Outre qu’il peut être une réponse au manque d’adresses (aspect quantitatif), IP a d’autres avantages (qualitatifs) : il permet de nouvelles fonctionnalités comme l’auto-configuration (« plug-and-play »  : une machine nouvellement connectée au réseau peut acquérir automatiquement une adresse IPv6 pour communiquer avec ses voisins et avec le reste de l’Internet). En outre, les extensions d’IPv6 permettent des applications plus adaptées aux utilisateurs : multicast, mobilité, qualité de service, sécurité seront plus facilement mis en œuvre.

Chronique d’un protocole toujours annoncé

“Le protocole Internet IPv4 a été élaboré dans les années 1980 par et pour les chercheurs. Cela représentait un faible nombre d’utilisateurs, d’équipements et d’applications et, donc, un faible besoin en adresses IP”, précise Mohsen Souissi (Afnic).

Le colloque « Où en sommes-nous d’IPv6  », qui s’est tenu en 2002, affirmait qu’IPv6 était d’ores et déjà présent dans les diverses régions du monde, avec de nombreux points d’interconnexion dans le monde (Paris, Amsterdam, Munich, Londres, Chicago, Los Angeles, New-York, Santa Clara, Palo Alto, San José, Tokyo, et également en Corée, à Singapour...).

Pourtant, IPv6 reste pour ainsi dire confidentiel. Pourquoi ? “Parce que les États-Unis estiment qu’il n’y a toujours pas de vrai marché. Et pour cause, ils détiennent les trois quarts des adresses IP de la planète, et ne ressentent pas la pénurie que connaissent l’Asie, l’Afrique et, dans une moindre mesure, l’Europe. Les États-Unis ont joué un rôle de frein énorme. Seuls deux pays ont franchi le pas, aujourd’hui, le Japon et la Corée du Sud. IPv6 est en plein déploiement en Asie, notamment avec la Chine, dont les projets sont gigantesques et dépasseront, en volumes, tous les pays du monde”, analyse Mohsen Souissi.

En France, une Task Force a été créée pour essayer de faire prendre conscience de l’importance du protocole IPv6 pour Internet dans les prochaines années. Mais, sans autres moyens que des bonnes volontés et des listes de diffusion, il est difficile, voire impossible, de faire comprendre aux politiques ou aux décideurs les enjeux de cette technologie.

La solution pourrait alors s’appeler Microsoft. IPv6 sera “natif” dans le prochain système d’exploitation Windows Vista et, ainsi, la technologie pourra se propager.

Bref, c’est urgent, et l’urgence est affirmée depuis longtemps, à moins de considérer que le réseau s’est déjà adapté à cette situation et que les systèmes de traduction d’adresses (NAT) compensent tant bien que mal le manque d’adresses IP publiques.


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