La chimie au coeur de la révolution nanométrique
par Morgan Hermes
lundi 14 mai 2012
Les avancées technologiques de ces dernières décennies, en particulier dans les domaines de la physique et de la chimie nous ont révélé un nouveau monde à portée de main : celui des Nanosciences. Son exploration s’étend à une multitude de domaines et foisonne de possibilités applicatives. Je vous propose, de vous immerger à travers ces quelques lignes, au cœur d’une réalité qui nous dépasse.
Frontière entre le monde classique et le monde quantique, le Nanomonde est la nouvelle terra icognita sur laquelle l’homme fonde tous ces espoir. Pas plus grand qu’un milliardième de mètre, cette échelle est devenue observable depuis quelques décennies en particulier avec l’aide de microscopes de plus en plus puissants comme le MET (Microscopie Electronique à Transmission).
Deux principales voies existent pour travailler à cette échelle. Une voie dite de « haut en bas » (TOP-DOWN) qui consiste en l’extrapolation des techniques de micro-électroniques à l’échelle nano : c’est l’apanage de la Physique mesoscopique. Ou à l’inverse une approche de « bas en haut » (BOTTOM-UP) qui appréhende l’échelle nano à partir de l’échelle atomique. Dans ce cas, l’étude d’agrégats moléculaires ou de macromolécules (molécules de taille nanométrique) à géométries plus ou moins complexes, appelés nano-objets ou nanoparticules, relèvent de la Chimie.
Cette dernière voie est probablement celle qui a le plus bel avenir, car elle dispose d’une myriade de « briques chimiques », léguées par plus d’un siècle de recherche et de synthèse de molécules. Le chimiste d’aujourd’hui ne se contente pas de créer de nouvelles « briques » mais devient un véritable architecte, générant des structures inédites, induisant des propriétés particulières, et localisé à une échelle infiniment petite ! Les applications possibles sont innombrables et vont des secteurs de l’énergie, au textile, à la catalyse, en passant par l’environnement et la médecine.
Afin d’illustrer cet état de fait et la synergie créée autour de ce domaine, voici un exemple de nanoparticule synthétisée récemment : « mechanised silica nanoparticule » (MSNP). Il s’agit de particules de silice qui font une centaine de nanomètre de diamètre. Elles ont la particularité de présenter une porosité contrôlée, qui va permettre de les utiliser comme « véhicule », dans le cadre d’une nouvelle approche pour la délivrance de molécules bioactives. Dans ce cas précis, il s’agit de l’utiliser pour la double délivrance d’insuline et d’une molécule activant sa sécrétion par le pancréas (adénosine monophosphate cyclique), pour les malades souffrant de diabète. Ainsi une fois dans le corps du malade, le contact du glucose ou d’un autre saccharide avec la nanoparticule provoque la libération de ces deux molécules de manière contrôlée.
Cet exemple qui n’est encore qu’à l’état de pure recherche académique montre toutefois la considérable étendue des possibilités offertes par la nano-chimie. La recherche dans ce domaine continue à progresser de manière exponentielle et il est certain qu’elle amènera à des découvertes aussi palpitantes qu’utile à l’humanité.
Références :
Wautelet M. et coll. ; Les nanotechnologies, Dunod, 2003.
Corriu R. ; Trong Anh N. ; Chimie moléculaire, sol-gel et nanomatériaux, Les éditions de l’école polytechnique, 2008
Cotì K. K. ; Belowich M. E. ; Liong M. et coll. ; Mechanised nanoparticles for drug delivery, Nanoscale, 2009, 1, 16–39.
Zhao Y. ; Trewyn B. G. ; Slowing I. I. ; Lin V. S.-Y. ; Mesoporous silica nanoparticle-based double drug delivery system for glucose-responsive controlled release of insulin and cyclic AMP, J. Am. Chem. Soc., 2009, 131, 8398–8400.