Le fossé numérique se creuse davantage
par Michel Monette
mardi 4 avril 2006
Un rapport qui montre tout le chemin à accomplir
Les technologies de l’information et des communications (TIC) sont plus concentrées dans les pays riches qu’il y a dix ans. De plus, l’accès à Internet demeure inabordable pour la vaste majorité des habitants des pays en voie de développement. Trop loin, trop cher, Internet ne favorise pas l’émergence d’un contenu original dans la grande majorité de ces pays.
Ce constat, on peut le lire dans le World Information Access Report for 2006, un rapport produit par une équipe du département de communication de l’Université de Washington.
Les auteurs du rapport mettent en garde contre le mirage que constitue un plus grand accès à Internet dans les pays qui y étaient peu rattachés il y a dix ans.
S’il est vrai que les opportunités de se connecter au réseau des réseaux sont plus élevées dans la plupart des pays du monde, en revanche les ordinateurs personnels, hébergeurs et serveurs sécuritaires sont plus concentrés dans un plus petit nombre de pays qu’en 1995.
Selon le rapport, la tendance vers une meilleure distribution des TIC, que l’on pouvait constater entre 1995 et 2000, s’est même inversée entre 2000 et 2005.
À titre d’exemple de la disproportion dans la distribution des TIC, le Congo comptait à peine 17 000 ordinateurs en 2005, les États-Unis plus de 220 000 000. Toujours la même année, dans plus de 47 pays il y a moins de 100 000 ordinateurs.
Côté serveurs, plus de 142 pays en ont moins de 10 000. À eux seuls, les États-Unis ont 36% des serveurs au monde (27 500 000 serveurs).
Pire, le type de connection Internet disponible défavorise nettement les pays les plus pauvres
Le coût de l’accès est aussi une barrière. Dans les mégapoles que sont Le Caire et Lagos, par exemple, le coût d’une heure d’accès équivaut à 20% du salaire moyen quotidien. À Manille et Séoul, l’accès est moins coûteux, mais il équivaut tout de même à 5% du salaire moyen quotidien.
Ajoutons à cette disproportion le fait que le contenu culturel local accessible sur le Web est beaucoup plus élevé dans les pays riches que dans les pays en voie de développement. Les populations de ces pays qui ont les moyens de se payer un accès Internet doivent donc payer plus cher pour un contenu culturel local moindre.
L’Inde et la Chine sont l’exception dans le monde en développement. Le nombre d’habitants qui y ont accès à Internet s’est accru considérablement, de même que le nombre de serveurs.
Un dernier constat plus positif de ce rapport : les ONG ont accru leur utilisation des TIC dans les pays en voie de développement, et cet accroissement a eu pour effet d’augmenter leur autonomie de fonctionnement, alors que dix ans plus tôt elles étaient beaucoup plus dirigées depuis les pays riches.
Howard, P. N. (2006). World Information Access Report. Seattle, WA : World Information Access Project, Department of Communication, University of Washington.