POLICE : questions de calibre

par Jacobin
dimanche 31 juillet 2016

N’étant pas expert en armes à feu et en armes de service, tout expert en ces domaines est chaleureusement invité à venir mettre son grain (de poudre, hahaha).

Sans être expert en arme à feu, on peut néanmoins se demander ce qui est passé par la tête de l’équipe qui a décidé des calibres et armes règlementaires pour les forces de l’ordre.

La question se posait déjà dès la transformation du bon vieux MR73, 357 magnum en Sig 9mm parabellum. Elle explose d’évidence après la tragédie de Nice.

Rappel. Hormis les brigades spéciales comme la BRI, le RAID, GIPN, GIGN ou autres, qui utilisent à peu près tous les calibres de la terre inférieurs au 300 de marine, les forces de police et de sécurité se voient maintenant dotées de calibre 9mm parabellum.

C’est sûr, c’est très pratique financièrement d’uniformiser les modèles, le para permet de mettre plus de cartouches dans le chargeur, est moins lourd et moins volumineux qu’un bon gros pistolet MR73 en 357magnum et il est tout à fait adapté aux missions….. de guerre. Par contre, son utilisation en police pose quand même un tas de questions.

D’abord, contrairement à ce qu’on croit, tirer au 357mag est moins violent qu’au para. Le recul y est sensiblement plus « ouaté » et la détonation ne vous défonce pas le tympan comme le para. J’invite tout un chacun à aller dans un club de tir vider un barillet du premier et un chargeur du second pour constater l’évidence. Et le stress de tir, surtout en situation d’urgence, n’est pas anodin pour des gars qui ne pratiquent qu’un chargeur tous les trois ans, et encore, avec un casque et des lunettes. A coup sûr, la visée en situation réelle ne pourra que s’en trouver perturbée.

L’autre problème, est que le para traverse sans s'arrêter. Quand vous tirez en situation de foule, votre balle pourra transpercer deux personnes avant de s’arrêter dans la troisième.. Et si vous tirer en intérieur, c’est l’enfer sur terre qui se déchaine car votre balle rebondira partout comme au flipper et vous prierez, à ce moment-là, pour que le plafond soit bien moelleux. Le 45 (11,43mm) lui, a la politesse de s’arrêter dans le premier corps rencontré. Raison pour laquelle les vieux bandits l’aimaient affectueusement. Mais le 45 c’est cher, c’est gros, c’est lourd, ça fait mauvais genre et… c’est démodé. Oui, oui, même chez les brutes, on a une âme de midinette parfois.

L’autre problème, et c’est probablement le pire au regard des évènements de Nice, c’est que le 9 para, ça pète, ça saigne, ça transperce mais ça n’arrête pas. Des agents du FBI traumatisées par leurs Glocks 17, 19 et 26 en para, on supplié Smith et Wesson de leur créer un calibre aussi discret et pratique que le para mais avec les qualités d’arrêt de cible et d’arrêt de projectile du 45. S&W a donc créé le 40SW, du 10mm en fait. Et le FBI est content, ses agents n’auront plus les tympans crevés, et ne vivront plus la scène typique où tout le monde est par terre, la tête sous les mains, les balles rebondissant sur murs, sols, et plafonds, transperçant les corps innocents tandis qu’un tireur fou continue de flinguer à tout va alors qu’il a déjà été transpercé par plusieurs 9 para.

Visiblement, cet aspect des choses a échappé aux décideurs de notre pays.

Mais il y a pire. Si un 9 para n’offre aucune garanti d’arrêter une homme immédiatement et sans tuer trois passants en même temps, on imagine bien qu’il est totalement inefficace pour arrêter une voiture ou… un camion. Et là, même le 40SW risque d’être léger. Encore une fois, le para est un calibre de guerre, à très courte portée dans une situation où transpercer plusieurs types et d’avoir des balles qui rebondissent de partout n’est pas gênant et est même plutôt souhaité. Surtout qu’en cas de guerre, l’utilisateur du para est entouré de plein de types usant de différentes possibilités d’arrêt, allant de quinze coups de 7.62 à la seconde jusqu’au lance-roquette anti char portatif.

Pour de la police de voirie, au quotidien, le para est bien trop violent, puissant, incontrôlable et ...faible. Pourquoi dés lors ne pas s’en tenir au bon vieux 7.65 tout à fait adapté à cette mission. D’ailleurs, n’est-on pas en train de créer des munitions spéciales police hors de prix pour tâcher, médiocrement de palier à l’inconvénient des balles incontrôlables ? Et alors où est l’argument comptable ? Mais il est vrai que tout comme le 45 chez les voyous, le 7.62 est… démodé chez les bleus. Le 7.62 ? pffff la honte hé, pfff. Ben oui, on en est là.

Maintenant, à l’instar de beaucoup de polices US, pourquoi, lors de barrages avec véhicules, ne pas disposer à l’intérieur de ceux-ci de bons vieux fusils à pompe ou automatiques calibre 12 (le AA-12 peut disposer de 100 cartouches dans son camembert, ça en fait des gros trous) avec une puissance d’arrêt incomparable. Les municipaux de Nice, équipé d’un ou de fusils de calibres 12 auraient pu arrêter sur place le camion, ne serait-ce qu’en lui explosant les pneus, choses impossible à faire avec du 7.62 ou du 9. D’ailleurs, après avoir vidé leurs chargeurs, ils se sont retrouvés, comme les nationaux, à courir après le camion de la mort avec obligation d’abattre le chauffeur pour en finir. Il est fort probable que du 12, du bête 12, disponible pour tout chasseur ou licencié de tir aurait évité l’assassinat de 80 êtres humains.

Et voilà, on a près de 200 000 hommes de la force publiques équipés avec un pistolet économique (mais des balles hors de prix….), joli, discret, puissant mais inadapté, inconfortable, dangereux pour les passants et inefficace dans une situation d’arrêt. C’est dingue comme ça peut rassurer.


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