La macronie, faussaire de statistiques

par Laurent Herblay
samedi 1er juin 2024

Normalement, ce sont les régimes autoritaires, ou les démocraties pas entièrement fonctionnelles qui cèdent à ce genre de manœuvre, qui reposent sur un déséquilibre des pouvoirs, un rapport à la réalité très distant, et des médias trop complaisants avec le pouvoir. Malheureusement, c’est une pratique à laquelle l’exécutif cède de plus en plus avec deux nouveaux exemples cette semaine.

 

Maquiller les échecs en succès

Voilà presque dix ans qu’une des plus grosses manipulations a été réalisée, quand Macron était à Bercy. Son président s’était engagé à « inverser la courbe du chômage ». Mais cette inversion tardant, le gouvernement avait alors choisi de bidouiller la communication sur les statistiques du chômage. Auparavant, les choses étaient simples : le nombre de chômeurs était directement issu des statistiques de Pôle Emploi, communiquées en valeur absolue et en pourcentage de la population active. Mais les socialistes avaient alors repéré qu’il existait un comptage par sondage du BIT utilisé ailleurs, qui donnait un taux de chômage inférieur. En effet, il suffit de formuler les questions d’une manière habile pour diminuer apparemment le nombre de demandeurs d’emplois… La mention du BIT donne un côté sérieux et permet de valoriser la possibilité d’avoir des chiffres comparables avec ceux des autres pays.

Mais à quoi bon comparer avec les autres pays une mauvaise statistique alors que nous en avons une bien plus fiable, le comptage de Pôle Emploi ? Comme par hasard, le chiffre du BIT est un quart plus bas que le dénombrement mensuel… Pire, une note de l’INSEE, qui défendait pourtant officiellement la méthode du BIT, révélait au détour d’un paragraphe que même le dénombrement mensuel de Pôle Emploi passe à côté de près d’un demi-million de chômeurs, tant les réformes finissent par retirer toute motivation à se déclarer pour des demandeurs d’emplois qui n’ont plus d’allocations… Le 7,5% du BIT passe à 10% selon le dénombrement de Pôle Emploi sur la seule catégorie A, et plus de 11% avec ceux qui ne prennent plus la peine de se déclarer. Et comme par hasard, le sondage du BIT évolue plus bien favorablement que les recensements : baisse de 30% depuis fin 2015, contre une baisse de 20%, pour les demandeurs d’emploi de catégories A et 6% seulement pour le total des demandeurs d’emplois de catégories A à C

Bien évidemment, la plupart des médias reprennent en boucle les statistiques gouvernementales, ne voyant pas, ou feignant de ne pas voir, le hiatus entre les 3 millions de demandeurs d’emplois de la pourtant très restrictive catégorie A et les seulement 2,25 millions du sondage miraculeux du BIT, qui efface au moins un quart des chômeurs. Seuls quelques médias faisant bien leur travail, comme Fakir, ou Elucid et rappellent ce problème que tout journaliste digne de ce nom devrait opposer à un membre du gouvernement qu’il interviewe. Cette manipulation ayant bien foncitonné, l’exécutif est allé pêcher dans un baromètre une statistique sur l’attractivité de la France, mesurée en nombre de projets, et non en montants investis ou nombre d’emplois créés. La ficelle devenant un peu grosse, même France 2 tempère l’enthousiasme de l’exécutif en rappelant que les projets créent 10 fois moins d’emplois en France qu’en Espagne…

Mais la manipulation fonctionnant, l’exécutif a décidé d’accélérer la manipualtion des statistiques. Comme le rapporte les Echos, Bercy a ainsi concocté une nouvelle méthode de mesure des créations d’emplois industriels en France, qui indique que l’industrie aurait créé des emplois plus tôt et plus fortement que ne l’indiquent les statistiques de l’INSEE ! La réalité n’est pas conforme aux objectifs de Macron et Le Maire ? Rien de plus simple : il suffit de maquiller les statistiques pour leur faire dire ce qui arrange cet exécutif dont la politique est un fiasco dans presque tous les domaines…Et pour finir, le Canard Enchainé a révélé cette semaine que le ministre de l’Agriculture manipule l’indice qui mesure les quantités de pesticides pulverisés dans les champs pour s’exonérer de l’objectif d’une baisse de 50% d’ici à 2030, objectif déjà repoussé. Mais jusqu’où iront les manipulations de ce gouvernemnet de faussaires ?

Ce qui est totalement révoltant, c’est la facilité avec laquelle Macron et son équipe peuvent écumer les plateaux sans jamais être questionnés sur la réalité de leur échec (effrayant sur l’insécurité), ni sur leurs manipulations. La plupart des grands médias ne font pas leur travail et se contentent de relayer servilement la communication d’un exécutif, quand ils ne cherchent pas à créer un « moment » artificiel. Et il semble qu’il ne faut pas compter sur Bardella et le RN pour dénoncer cela…


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