Fin d’un marchand de journaux...

par Emin Bernar
jeudi 9 novembre 2006

Place Charles Michels à Paris 15e, la maison de la presse, qui jouxtait le Mac Donald et le centre commercial et faisait face au café, aux banques et au tabac, vient de fermer ses portes... définitivement.

Cette maison de la presse, la plus grande du quartier, s’est installée il y a une bonne vingtaine d’années. Elle était devenue une sorte d’institution. C’est avec stupeur que les habitants la découvrent close. En vitrine, une page dactylographiée annonce qu’elle ne rouvrira pas après la restructuration du centre commercial, et explique sobrement les raisons de cette fermeture qui annoncerait celle de beaucoup d’autres lieux semblables à Paris : le grand nombre de titres distribués, qui pour une grande part n’étaient pas vendus, ce qui entraînait un problème de trésorerie entre le moment où il fallait avancer les fonds et celui où on récupérait le prix des invendus ; et plus encore une charge de travail excessive pour le personnel, des semaines de deux fois 35 heures ! Enfin la concurrence occasionnée par ces abonnements à prix réduits que les journaux et magazines nous proposent, en bénéficiant des avantages accordés par les pouvoirs publics en termes de tarifs postaux.

Apparente contradiction : on a pu lire par ailleurs (Le Monde du 1er novembre) que le nombre de kiosques a recommencé à augmenter à Paris et qu’aux dires du président du CSMP (Conseil supérieur des messageries de presse), "l’objectif pour 2010 est d’atteindre 33 000 points de vente traditionnels, de proximité, soit environ 5000 de plus qu’aujourd’hui".

Alors pourquoi cette amertume ? La fin de "notre" marchand de journaux sera peut-être l’occasion, pour le tabac en face, d’ouvrir un "coin" presse, histoire de compléter la recette de ces jeux de hasard qui entraînent la dépendance, et de compenser la baisse des ventes de ces produits qui "nuisent gravement à la santé" ! Et il nous restera toujours ces piles du journal Métro, devant la station Charles Michels, devant la boulangerie, devant... Et puis "notre City marché", à deux pas, a ouvert un rayon presse et librairie où chacun, chacune peut lire tranquillement la presse magazine "peuple" et le dernier roman ésotérique à succès...

Mais pourra-t-on encore lire et acheter la presse de province, Le Populaire du centre, Le Bien public, La Montagne... ? La presse alternative ? Et mon ami turc pourra-t-il acheter Hurriyet ou Sabah... ? Et si justement c’était cette diversité qui allait disparaître en même temps que "notre" marchand de journaux, à la veille du lancement de ce nouveau centre commercial Beaugrenelle, que de généreux investisseurs, ardemment soutenus par la "gauche" parisienne, entendent mettre à notre disposition ?


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