Nage avec les rats !
par politzer
lundi 7 juillet 2025
Nettoyer l'urine des chiens ou celle des rats ?
Les trottoirs parisiens croulent sous les crottes et l’urine, mais Hidalgo préfère nettoyer un bout de Seine à Paris. Le slalom matinal entre crottes de chiens, relents d’urine et déchets épars est un sport national. Pourtant, pendant que les trottoirs crient misère, Anne Hidalgo a une obsession : transformer un bout de Seine en piscine olympique. Pour 1,4 milliard d’euros, la mairie a dépollué quelques kilomètres du fleuve, juste à temps pour que les athlètes des JO 2024 puissent y nager sans (trop) craindre la gastro. Mais à quel prix, et pour qui ? Un plongeon à 1,4 milliard. Le « Plan Baignade », lancé en 2015, avait un objectif ambitieux : rendre la Seine et la Marne baignables pour les JO 2024, avec en prime trois sites de baignade publics dès 2025. Résultat ? Un investissement colossal de 1,4 milliard d’euros, dont 700 millions pris en charge par l’État. Des bassins d’orage géants, comme celui d’Austerlitz (50 000 m³, l’équivalent de 20 piscines olympiques), ont été construits pour limiter les rejets d’eaux usées lors des pluies. Des péniches ont été raccordées au tout-à-l’égout, et des stations d’épuration modernisées. Le 17 juillet 2024, Hidalgo elle-même a plongé dans la Seine, accompagnée du préfet et de Tony Estanguet, pour prouver que le pari était gagné.
Mais ce « succès » a un goût amer. D’abord, la Seine reste capricieuse : dès qu’il pleut (comme hier et aujourd’hui) , les niveaux de bactéries fécales (Escherichia coli, entérocoques) grimpent, rendant la baignade risquée. En août 2024, des épreuves de triathlon ont même été reportées pour raisons sanitaires. Ensuite, le projet ne concerne qu’une portion limitée du fleuve, autour des ponts Alexandre III et de l’Alma, là où les caméras des JO étaient braquées. Pour les Parisiens, l’accès à une Seine « baignable » reste un rêve lointain, réservé à quelques spots triés sur le volet.
Pendant ce temps, les trottoirs suffoquent. Pendant que la Seine se refaisait une beauté, les rues de Paris continuaient de crouler sous les déchets. Chaque jour, 2 900 km de trottoirs sont balayés et 3 000 tonnes de déchets collectés par 6 900 agents municipaux. Pourtant, les plaintes pour insalubrité pleuvent. L’application DansMaRue enregistre environ 2 000 signalements quotidiens : crottes de chiens, urine, encombrants abandonnés. Les corbeilles de rue, vidées jusqu’à trois fois par jour, ne suffisent pas face à l’incivisme et au tourisme de masse. Les quais de la Seine eux-mêmes, nettoyés chaque semaine, ne sont pas épargnés par les détritus.
Le budget de la propreté à Paris ? Difficile à chiffrer précisément, mais il est éclipsé par les 1,4 milliard de la Seine. Les Parisiens, eux, se demandent pourquoi leurs impôts financent un projet de prestige alors que leurs chaussures collent au bitume. « On dirait que la mairie veut une vitrine propre pour les touristes, mais oublie ceux qui vivent ici », lâche Robert, habitant du 6e arrondissement, en esquivant une flaque suspecte. Un choix de priorités contesté Hidalgo défend son projet comme un « héritage » pour Paris : une Seine plus propre, un écosystème revitalisé (34 espèces de poissons – on peut les consommer ou c’est pour le chat ?) contre 2 il y a 40 ans), et des baignades publiques à l’horizon 2025( ?). Les JO ont servi d’accélérateur, forçant des travaux d’assainissement nécessaires depuis des décennies. Mais à quel coût ? Sur X, les critiques fusent : « 1,4 milliard pour qu’Hidalgo fasse un plouf de 3 minutes devant les caméras », ironise un utilisateur. D’autres dénoncent une « gabegie » pour les « bobos parisiens », pointant des départements, notamment outre-mer, privés d’eau potable.
Rachida Dati, adversaire politique d’Hidalgo, n’a pas mâché ses mots : « 1,4 milliard pour une Seine qui n’est toujours pas baignable, franchement… » Même des écologistes, comme ceux interrogés par Reporterre, doutent du caractère « vert » du projet, critiquant des infrastructures coûteuses et pas toujours efficaces face aux aléas climatiques.
Et maintenant ? Le pari d’Hidalgo est à moitié gagné : les JO ont eu lieu, les athlètes ont nagé (parfois), et la Seine est moins polluée qu’avant. Mais pour les Parisiens, le contraste est saisissant. Pendant que la mairie rêve de baignades estivales, les trottoirs restent un parcours du combattant. Alors, nage avec les rats ou balaye les rues ? Peut-être qu’un meilleur équilibre entre prestige et quotidien rendrait Paris plus vivable pour tous.