Vers la France de Berlusconi ?

par Vierasouto
mardi 24 avril 2007

Après le soutien officiel de Berlusconi à Sarkozy, est-il encore possible d’accepter de subir le second tour comme une fatalité ?

Berlusconi soutient Sarkozy, il l’a annoncé aujourd’hui. A Dijon pour le premier meeting du candidat de l’UMP après le premier tour, c’est Enrico Macias qui s’y colle, donnant du Sarko trémolo en grattant sa guitare, moment pathétique d’un chanteur has been qui a trouvé sa ferme des célébrités. Mais ce n’est pas tout, Judas Besson est l’invité d’honneur, l’accolade entre les deux hommes sur scène donne un moment d’émotion piquant entre deux adeptes de la trahison, sauf que l’invité est nouveau dans l’exercice, ne se rendant même pas compte du ridicule de sa démarche, enfoui dans ses rancunes à régler ses comptes. Au premier rang, les ralliés UDF à qui Sarkozy va donner du Jean-Louis, du Gilles, tout le long du meeting, « oui, Jean-Louis, j’avais dit que je ne le dirais pas mais racaille... », il persiste et signe, ultime provocation, luxe que peut s’offrir le candidat quasiment interdit de se rendre en banlieue, riche de ses 31% de suffrages lepénisés pour un bon tiers. le thème supposé du discours est « Pourquoi tant de haine ? », traduit dans la version pourquoi j’ai toujours raison. Entre les assistés qui ne doivent pas gagner plus que les travailleurs et les assistés qui devraient faire des travaux d’intérêt public, le droit de grève qui n’est pas celui de prendre en otage un pays, les patrons voyous et les juges d’Outreau sont offerts au public en pâture, les puissants doivent payer aussi... On ressort même l’interdiction des golden parachutes annoncée in extremis vendredi dernier avant minuit comme une conviction de toujours. Ovation...

Pendant ce temps, Ségolène et la France présidente tiennent meeting à Valence ; elle vient de déclarer avoir laissé un message sur le répondeur de Bayrou avant de parler aux journalistes de son ouverture au centre ; elle avait laissé entendre rue de Solférino, à une heure du matin au retour de Melle, qu’elle n’appartenait plus désormais aux seuls militants socialistes. D’aucuns ont critiqué son discours tardif, un peu crispé. Depuis le début de la campagne, on s’intéresse davantage aux tailleurs blancs et au brushing nickel de Ségolène qu’à son programme. Elle réfléchit, elle lit son texte, en deux mots, elle n’est pas comédienne comme Sarko ou Tapie. Préfère-t-on Sarko déguisé en cow-boy à cheval en Camargue traînant cinquante journalistes à ses trousses ou jouant Tom Cruise dans sa voiture après les résultats dimanche soir pour regagner la rue d’Enghien ? Les deux candidats, inféodés à l’image dans une société narcissique, l’ont payé des 19% de votes pour Bayrou, candidat « normal », qu’on dirait par comparaison presque « à l’ancienne » ne posant pas dans Gala en famille, ne faisant ni son footing au cap Ferret avec les photographes à ses basques ni du bateau sur l’île de beauté avec Clavier, le Bronzé 3.

J’ai hésité à proposer cet article à AVox, d’ailleurs, il n’est pas encore envoyé, accepté... Car je ne suis en rien spécialiste en politique, je ne le prétends pas, mais comme des millions de Français, j’observe, je me fais une idée, j’espère, je bous, je suis en colère. Les résultats d’hier m’ont consternée : est-ce tellement différent d’avril 2002 que Le Pen ait obtenu 11% des voix et au moins 10% aussi dans la valise des 31% de voix de Sarkozy ? La France est-elle devenue définitivement xénophobe, pire, lépenisée presque à son insu ? La seule différence, c’est le vote utile des socialistes pour alléger leur conscience de s’être éparpillés en privant Jospin de la finale 2002. Et ensuite ? Pour ces raisons, j’ai voté pour François Bayrou, pour éviter à Ségolène Royal d’aller au casse-pipe au second tour, et, surtout, pour parer au plus urgent : ni Le Pen ni Sarkozy, un « Le Pen light » comme l’a qualifié Marine Le Pen elle-même hier soir, non sans une certaine lucidité. Que faire aujourd’hui pour éviter le pire ? Comment convaincre les électeurs de Bayrou que ce n’est pas la priorité aujourd’hui de se vexer qu’on ne les considère pas suffisamment, qu’on ne les caresse pas dans le sens du poil, mais lequel ? Tout ça ne les consolera pas de cinq années de tyrannie à venir, un vote blanc équivalant à un chèque en blanc au candidat de l’UMP. A quoi bon bouder quand c’est pour couper la branche sur laquelle on est assis ? Il faut voter, on se vexera en différé, plus tard...


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