Pas d’invitation au Sénat pour la chômarde !

par Eric Lombard
jeudi 12 juin 2008

Quand le Sénat se penche sur les politiques de lutte contre l’exclusion et la pauvreté, il auditionne large, mais ne convie pas de pauvres. Qui alors parle au nom des pauvres ?
Cet article est un volet de l’enquête participative : Quelle place pour les pauvres en France ?
 

Les questions
Comment participer ?
Où en est l’enquête ?
Les contributions

Ils font rarement la une, mais les sénateurs travaillent. Discrètement, mais en toute transparence, la mission commune d’Information sur les politiques de lutte contre l’exclusion et la pauvreté lancée en janvier 2008 travaille même sérieusement. Ces sénateurs qui se réunissent toutes les semaines depuis quatre mois ont déjà auditionné de nombreuses personnes-clefs. Leur but : faire un bilan des politiques de lutte contre l’exclusion et la pauvreté, menées depuis 1988 (date de la création du RMI), faire des propositions de réorientation de la législation et des politiques mises en oeuvre, et mener une réflexion d’ensemble sur l’organisation institutionnelle du secteur de l’insertion.

On le voit, les sénateurs se préparent à débattre des conclusions du Grenelle de l’insertion, présentées le 23 mai 2008, mais souhaitent également "élargir le débat à certaines idées actuellement en réflexion, telles que l’individualisation du RMI ou la création d’un revenu minimum d’existence".

Commençons par observer qui les sénateurs ont auditionné. Le panel est large :

Les pauvres pas conviés

Les membres de la mission sénatoriale n’en ont pas auditionnés, pas plus qu’ils n’ont été à leur rencontre sur le terrain, dans les squats, dans la rue, dans les ateliers d’insertion... Ce n’est pas encore rentré dans les mœurs. Rencontrer des personnalités qui ont des solutions, oui, écouter ceux ou celles qui ont les problèmes, non ! Quand Martin Hirsch (Haut Commissaire aux Solidarités actives contre la pauvreté) a voulu imposer la démarche, il s’est heurté, de la part des travailleurs sociaux comme des élus, à des arguments tels que : "On ne peut pas le faire. Ce sont des gens fragiles. Il faut une longue préparation. Cela va les déstabiliser." (La Chômarde et le haut commissaire, p. 55)


Qui les représente ?

Au total, ce sont 21 personnes représentant 13 associations ou fédérations d’associations qui ont été investies du rôle de parler des pauvres et qui se sont succédées au Sénat :

La lecture des comptes-rendus d’auditions révèle d’abord l’étendue du travail accompli par les associations, la grande diversité de leurs approches et la connaissance qu’elles ont de la pauvreté, connaissance extrêmement directe quand les permanents font la démarche de vivre auprès des gens qu’ils aident.

Ces associations ont en commun de répondre de manière innovante à des besoins non couverts par la collectivité, ou qui n’étaient pas couverts à l’époque de leur création. Elles agissent dans les domaines de l’alimentaire, du logement, de la santé, du travail, de l’éducation …, certaines étant plus spécialisées que d’autres. Toutes font de l’accueil ou de l’accompagnement, certaines ne faisant que cela.

La plupart, et en particulier les fédérations, mènent une réflexion de fond avec la volonté de contribuer à l’élaboration des politiques de lutte contre la pauvreté et l’exclusion. Le collectif ALERTE, créé par l’UNIOPSS, a ainsi abouti en décembre 2007 à un accord avec les partenaires sociaux dont l’objectif principal est l’accès de toutes les personnes en situation de précarité à un emploi permettant de vivre dignement. ATD Quart-Monde, qui a une connaissance en profondeur de la pauvreté, a un siège au Conseil économique et social et vient de gagner une bataille auprès du Conseil de l’Europe pour non-respect par l’Etat français de ses engagements européens en matière de logement.

Elles ont également un rôle essentiel de veille, étant aux premières loges pour repérer l’émergence de nouvelles pauvretés ou de nouvelles problématiques et d’en alerter la société. Ainsi, Droits d’urgence, association réunissant 350 avocats et juristes bénévoles ainsi que des salariés à temps plein spécialisés dans l’accès au droit, souligne la vulnérabilité grandissante des personnes âgées à la pauvreté.

Questions

Comment participer ?

Cette enquête participative n’est pas un forum, au sens habituel du terme. Il ne s’agit pas de débattre entre vous, mais d’apporter des informations précises et documentées ou des témoignages relatifs aux questions posées. Je les étudierai, chercherai à les vérifier, à les recouper et à les confronter à d’autres informations que je pourrai aller recueillir auprès de personnes compétentes, comme cela se fait dans toute enquête journalistique.

Au fur et à mesure de la remontée des informations, je mettrai à jour une présentation synthétique de vos contributions et de mon propre travail d’enquête, vous permettant de suivre la progression de l’enquête et de mieux vous repérer dans la masse des contributions déjà reçues.
Une synthèse sera publiée en fin de course, synthèse qui pourra elle-même être critiquée ou complétée.

Le principe des enquêtes participatives a été présenté en juillet 2007 par Carlo Revelli. Il ne change pas, mais les méthodes évoluent, en tenant compte de l’expérience de la première enquête sur les vaccinations et de celle acquise sur hyperdebat.net.

Pour contribuer à l’enquête, cliquez sur "Ecrire un commentaire". Si vous n’êtes pas encore enregistré sur Agoravox, il vous sera demandé de le faire.

Quelques règles rédactionnelles :

Où en est l’enquête ?

Cette section est une tentative de présentation synthétique de vos contributions et de mon propre travail d’enquête. Je la compléterai au fur et à mesure de la progression de l’enquête.

Comment faire participer les pauvres aux décisions qui les concernent alors qu’ils ne sont pas ou peu organisés ? Sur quels critères sélectionner leurs représentants ?

Les associations auditionnées par le Sénat vous semblent-elles posséder une légitimité pour parler au nom des pauvres ? Sinon, pourquoi ?

Quelles autres associations auraient dû être consultées ?

Martin Hirsch dit que "L’organisation des associations en groupes de pression a des progrès à faire" ("La chômarde et le haut-commissaire" p223). Quels progrès doivent être faits ?

Les médias relaient-ils suffisamment et correctement la réalité vécue des pauvres ? l’action des associations ?




Lire l'article complet, et les commentaires