Toute société inclut le principe répressif du bannissement. Ce bannissement n’est tout compte fait que très rarement utilisé chez les Sioux ou les Hmongs alors qu’il l’est très couramment dans nos sociétés modernes.
Si une société ne bannit vraiment qu’une personne sur un million, chaque isolé percevra son isolement irréductible, ne se sentira associé à personne et s’enterrera tout seul dans un coin perdu.
Si une société bannit à tour de bras (Cf. ’prison valley’) et souvent même a priori, ses bannis ressentent qu’ils ne sont pas seuls, se regroupent parfois en meutes associales voire antisociales et même s’ils restent solitaires, ils vont se venger en croyant représenter un groupe. Les bannis se voyant rejetés par le corps social ne croient plus au regroupement sauf au regroupement entre extrêmistes rancuniers.
Tant que les armes sont de type couteau, les bannis ne peuvent se venger qu’avec des couteaux. L’Histoire des sociétés est pleine de cas du genre.
Mais quand les armes deviennent des virus, des poisons, des mitrailleuses ou des bombes...la société paye extrêmement cher le bannissement d’un seul et sa méthode pourtant très traditionnelle ressort absurde.
En 1800, un banni français ne pouvait encore tuer qu’au couteau et commettait donc un meutre aveugle unique. 1 victime aveugle sur 30 millions de Français.
Aujourd’hui, un banni furieux peut tuer 100 personnes sur 60 millions soit 50 fois plus. Ce qui correspond à une récidive meutrière x 50 immédiate.
Il serait donc temps de réaliser que le principe du bannissement est contre productif.
J’ignore en quel endroit James Holmes a été exclu.
Mais je connais assez le cas de Richard Durn. En gros, alors que sur le plan familial il était déjà à la limite de l’anormalité (norme= centre du troupeau), il s’est retrouvé à constater qu’en dépit de ses diplômes (peut-être trop fumeux, pas assez vendables) il ne trouvait qu’un emploi de pion. Il a trouvé ça très injuste et cette impasse s’ajoutant à d’autres plus familiales auront formé un ensemble d’obstacles irréductibles lui donnant l’impression que les gens se liguaient contre lui. Il avait l’impression que l’obtention ou non d’un emploi ad hoc ne dépendait que de la volonté des recruteurs et que ces derniers le repoussaient systématiquement. N’ayant plus rien à perdre, il a tiré dans le tas.
Nous savons qu’il y a tout autour de nous des milliers de Richard Durn désespérés. Nous savons qu’à ces cas s’ajoutent encore celui de ceux qui sont exclus par leur origine et qu’il s’y ajoute encore ceux qui sont exclus suite à condamnations officielle en bonne et due forme. Ca fait une masse énorme de gens pétris de rancoeur.
Mais que ressort-il de la vox populi globale ? Le silence au mieux, la stigmatisation et la réclamation de plus d’exclusion encore au pire : « DSK, il faut le pendre par les couilles »
Or il y a des milliers de gens se sentant in petto une communauté de sort, de destin ou de turpitude avec DSK. Tous ces gens entendent ce qui se dit sur DSK et ressentent qu’il existe une haine latente contre eux. Et alors qu’ils n’étaient que des inconscients ou des irresponsables, que des profiteurs ou des manipulateurs, ils basculent dans la contre haine en haïssant à leur tour. Généralement ils restent solitaires mais parfois ils se regroupent eux aussi, parfois sans se connaître profondément entre eux, parfois ne se reconnaissant entre eux qu’en leur haine commune envers la société et on doit s’attendre à voir surgir des flash attacks mortelles organisées par le biais de SMS par tous nos bannis. 1000 victimes aveugles alors.
Et si d’aventure on en revenait aux condamnations officielles à mort, cette manière radicale de traiter les déviances provoquera des haines encore plus radicales. Ce ne seront pas ceux que nous aurons électrocutés qui accompliront des vengeances aveugles mais tous ceux qui se verrons potentiellement électrocutables et ils seront bien plus nombreux.
Il serait grand temps de distinguer entre les abus que les uns les autres nous commettons et les haines qui ne surgissent que du bannissement. Nous devrions cesser de fabriquer des haines en poliçant constamment nos abus ou perversions par l’exclusion.
Comme Erasme l’avait déjà dit pendant l’Inquisition, il faut, si l’on veut convertir quelqu’un, ne procéder que de dialectique, que de raisonnements et de persuasion par l’exemple de la douceur, non par le bûcher ou le pilori.