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Commentaire de easy

sur L'impasse comme horizon


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easy easy 20 août 2012 10:13

Vous ne craignez pas la discussion, vous l’aimez. C’est rare.

Depuis les temps préhistoriques, ceux qui ne mangeaient que des pommes se sont vus proposer des poires (pour moins cher, pour plus cher). Depuis les temps préhistoriques entre un fruit abîmé et un tout beau, les hommes ont fait des choix. Ils ont développé leur sens de la préférence. L’homme aurait la particularité dans le règne animal, de résonner, de procéder de tambours, de miroirs, d’échos, de répétition, de vibrations pour amplifier ses émotions et leur impact sur les autres, disons pour faire partager ses sentiments et émotions ou pour les collectiviser 

Les animaux aussi procèdent de mises en résonance, d’hystéries, mais bon, ils ne fabriquent pas d’outils, pas de tambours, pas de trompettes, pas de néons clignotants.

Depuis la nuit des temps, l’homme a donc choisi et fait résonner ses préférences avec les autres, il a publié ses goûts. Bien que chacun soit allé à vendre ses préférences et qu’il aurait pu en résulter une neutralisation des effets, il y a eu des consensus autour de certains outils ou produits qui ont alors émergé de manière significative. (En Amérique latine, va savoir pourquoi, alors que certains avaient proposé la roue, elle n’a pas été retenue et n’a joué aucun rôle dans le transport). En dépit du succès de certaines propositions prométhéennes, l’espace du choix s’est élargi en même temps que le principe même du choix s’est imposé comme une nécessité voire une essence particulièrement humaine.
Il ne pouvait s’ensuivre qu’une frénésie vers la plus belle des pommes donc vers le concept de richesse qualitative. Or le saut n’est pas énorme de la richesse qualitative à la richesse quantitative. Ramener deux sanglier c’est mieux qu’un. 

Mais l’absence de frigo et les saisons ont obligé les hommes à ne pas ramener 50 sangliers d’un seul coup. Il y a eu bien des éléments qui ont freiné l’hybris de la richesse. Du coup, dans le même temps que les hommes ont cherché les moyens de contourner les empêchements en cultivant, en arrosant, en irriguant, en élevant (sorte de frigo vivant), ils ont cherché d’autres sortes de richesses, qui ne dépendaient plus que l’eux-mêmes, la musique, la danse, la verbe, le dessin, la bravoure, le talent et la fiabilité.

Car la promesse est un élément très caractéristique de l’homme « Prête moi ton arc, je ramènerai du gibier pour nous deux ». La puissance et les effets de l’engagement ont été considérables. « Suivez-moi jusqu’à Babylone et vous reviendrez couverts d’or »
 
La promesse existe un peu chez les animaux. Les loups qui participent à une attaque semblent se promettre un peu. Mais c’est très faible. Il y en a qui ont participé à l’attaque et qui se retrouvent sans rien à bouffer pendant que des fainéants se sont gavés.

C’est la promesse comprise dans toutes ses dimensions qui font la culture du maïs, qui font l’élevage des poulets, qui font les filets de pêche. Encore une fois, les animaux aussi ont ce sens du futur gras lorsqu’ils se mettent à l’affût pendant des heures, même en solitaires. Même une araignée a le sens du futur gras.
Mais chez l’homme ce sens est très développé et le crédit dans tous les sens du terme ne pouvait que devenir capital de ses relations, y compris avec soi-même. « J’ai confiance en moi, j’y parviendrai »

Il ne pouvait en découler qu’une concurrence à qui serait le plus crédible, à qui assumerait le mieux ses promesses, à qui livrerait le mieux le futur gras.
Il ne pouvait en découler qu’une capitalisation personnelle du crédit qui nous était accordé. Celui qui avait régulièrement honoré ses engagement capitalisait de la confiance et attirait davantage à lui.

Il ne pouvait en découler que l’émergence de chef et d’une hiérarchie. Et tout cela sur toutes les formes de richesses tant matérielles que spirituelles


C’est dans ce contexte créditiste qu’apparaissent des anomalies.
Car une fois qu’une hiérarchie s’est vue accorder du crédit et des moyens d’agir selon son inspiration, elle s’est trouvée puissante, isolée de la masse qui lui avait livré ses réserves par une armée et a pu réprimer les révoltes de ceux qui disaient ne pas s’y retrouver.

A partir d’un certain cap de puissance acquise par le crédit, cette puissance, au lieu d’aller exclusivement à fabriquer du futur gras, ce qui n’est pas facile, se consacre à mater les réclamations.
Un colonisateur déboule en Indochine en promettant un futur gras. Au vu de ses moyens et de ses beaux discours la population indigène est tenté d’y croire et elle se retrouve finalement à engraisser non pas un prométhée mais un tyran. Et d’en appeler alors à un autre prometteur, puis un autre et de retomber constamment de Charybde en Scylla. Et quand je dis prometteur, je ne réifie pas, c’est absolument vrai que les chefs promettent la Lune, sinon de notre vivant, du moins après notre mort. Et il est absolument vrai qu’ils se protègent des réclamations par une armée ou un système policier.


Lorsque vous allez vite vers la gentrification, vous nous invitez à focaliser sur le fait que des gentry entreprennent une valorisation d’un espace concret donc fini. Vous nous empêchez alors de voir que ces gentry sont eux-mêmes et comme tout le monde, pris dans un système très hiérarchisé où la puissance offerte à l’Etat par la voie des taxes, réprime infiniment plus qu’elle ne livre de futur gras.

Alors qu’à la base chacun ne prêtait son arc à un prometteur que s’il en avait envie, on en est venu à prêter son arc, qu’on le veuille ou non.
Par le jeu des taxes et impôts et par le jeu de l’anonymat administratif, chacun se retrouve à participer à un principe autrefois rentable pour chacun mais qui est devenu, depuis Clovis, complètement perverti.

Il n’aurait pas fallu accepter le principe du crédit ou de la confiance en relais. « Confie-moi un arc et Paul te donnera une part de bouffe »

Pierre aurait dû ne confier son arc qu’à une personne qu’il verrait ne chasser que pour eux deux. Jamais à un système complexe situé en dehors de son contrôle.
Les systèmes d’échange à niveau de villages sont sains, au-delà c’est la porte ouverte à tous les abus.



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