(Tout, absolument tout ce que l’homme traite, n’est que comédie)
Concernant plus précisément le CV, certes.
Mais dans une société idéaliste, le produit consommé doit être idéal.
On fantasme à ce point d’idéalisme à toutes les étapes du produit qu’on idéalise les conditions d’extraction du métal dont est constitué notre gourmette, qu’on idéalise les conditions d’élevage et de mise à mort des poulets dont on mange les nuggets, qu’on idéalise les personnels du restaurant du Palais Royal.
Il y a bien entendu contradiction entre le fait que chacun se sait bien imparfait et le fait qu’il tienne à ce que tous les employés de l’athanor qui lui livre les trésors dont il se gave soient parfaits.
Cette contradiction n’est pas bien gérée.
Elle est vaguement gérée de la manière suivante
Tant que je suis à la recherche d’emploi, je proteste contre l’idéalisme.Dès que je suis employé, je suis plutôt idéal puisque reconnu comme tel par une entreprise qui n’a recruté que des gens merveilleux. Je tiens à cette étiquette et je vais donc me montrer exigeant en n’acceptant pas que des pouilleux soient acceptés à mes côtés.
Je ne pense pas qu’il y ait une solution (je crois que la comédie est indispensable, mais c’est un autre sujet)
Je peux seulement constater que l’idéalisme déjà très, très élevé sous Louis XIV, a débouché sur une version plus populiste grâce à l’industrialisation et la démocratisation-scolarisation de tous.
C’est désormais madame Michu qui est exigeante parce qu’elle le vaut bien.
Plus exactement la classe smicard, Lidl, ne l’est pas pas trop.
Mais dès 2xSMIC, ça devient intransigeant
Se montrer intransigeant sur la qualité définit en retour sa classe, son autorité
Heureusement, chacun se retrouvant devant le fait du CV bidonné, chacun sait au fond de lui la comédie. Mais pour tenir hors de l’eau, il faut jouer le jeu et chacun le joue.
Ce n’est que quand on est extirpé d’une voiture en feu qu’on ne pense pas à demander à son sauveteur s’il connaît Deleuze.