1944 : récit de la Bataille de Marseille
par NewsofMarseille
lundi 4 juin 2012
Sauf à en connaître l’histoire, qui pourrait s’imaginer en voyant la ville aujourd’hui, que Marseille fut jadis le théâtre d’une véritable bataille entre les forces de l’Axe et les Alliés ? Combien de jeunes Marseillais connaissent cette histoire qui est aussi la leur ? Nous allons faire de notre mieux pour combler ce vide regrettable, car cette page de la Seconde Guerre Mondiale est passionnante et nous touche de près.
CONTEXTE
FORCES EN PRÉSENCE
On compte près de 400 000 soldats alliés engagés dans l’opération de débarquement. Les Américains de la VIIème armée US sont commandés par le Général Patch. Les Français, quant à eux sont commandés par le Général De Lattre De Tassigny qui a rejoint les Forces Françaises Libres après s’être évadé d’une prison de Riom, où il avait été jeté pour avoir refusé des directives du gouvernement de Vichy. La 3ème Division d’Infanterie Algérienne est commandée par le Général de Monsabert qui s’est illustré en Italie et qui va jouer un rôle clé dans la bataille qui s’annonce à Marseille. Nous ne détaillerons pas les différentes divisions engagées, mais au total ce sont près de 230 000 Français qui participent à la libération de leur pays par le sud.
Chez les Allemands, c’est le 244ème Division qui a la charge de défendre Marseille, appuyée par la Kriegsmarine et des artilleurs de la Luftwaffe, l’armée de l’air. Ces 20 000 soldats sont commandés par le Général Schaeffer. Depuis le début de l’occupation de la Zone Sud fin 1942, les Allemands se sont employés à fortifier la côte méditerranéenne, coulant des milliers de tonnes de béton armé pour construire bunkers, murs de protections, divers abris pour artillerie et PC fortifiés.
LA BATAILLE
Les combats vont durer quatre jours, jusqu’au 20 août, alors que De Lattre et Monsabert se décident à venir en aide aux résistants en difficulté. A 11 heures ce jour là, les Régiments de Tabors Marocains dépassent Cuges-les-Pins et le Col de l’Ange, près de Gémenos. De leur côté, les Juifs de Marseille sont appelés par leurs représentants à occuper l’immeuble situé au 49 du Cours Pierre Puget : le Haut Commissariat aux Questions Juives dont ils s’empressent de vider les dossiers par les fenêtres. Un parfum de liberté commence à flotter sur la ville, pourtant il va encore falloir huit longues journées de rudes combats pour venir à bout de l’ennemi. A la Capelette, les traminots érigent des barricades en renversant des wagons et combattent l’ennemi. La Préfecture est prise par les résistants qui parviennent à repousser les contre-attaques visant à reprendre ce point fort du centre-ville. Les divisions françaises encerclent la ville par le Nord mais aussi par le Sud en passant par Cassis, Carpiagne, et bientôt Luminy. Les Allemands se battent vaillamment et tuent de nombreux combattants dont les armes ne pèsent pas lourd face à leurs imposantes mitrailleuses. Des combattants français dont l’enthousiasme les pousse trop souvent à l’imprudence…
Le 22 août 1944, le Général Schaeffer reçoit l’ordre de détruire le port de Marseille, ce qui est entrepris immédiatement en dépit des pressions extérieures, notamment du Consul d’Espagne qui attire l’attention de Schaeffer sur le sort de la population civile. Il obtient toutefois la préservation de l’aqueduc de Roquefavour qui alimente la ville en eau. Les quais sont dynamités dans un vacarme terrible et le fameux Pont Transbordeur s’effondre dans les eaux du Vieux-Port, rejoignant les 200 navires coulés à cette occasion pour gêner au maximum la logistique des américains.
Le lendemain, les combats se poursuivent sur les hauteurs de la cité : de nombreux morts sont à déplorer au Merlan, mais les Tabors Marocains poursuivent leur avancée sur les collines de Septèmes et Saint-Antoine. Le même jour, les blindés alliés atteignent les Cinq-Avenues et la Canebière. Mais n’allez pas penser que cela est synonyme de victoire ! En effet, les Allemands sont repliés sur leurs points d’appui, et chaque batterie d’artillerie constitue une poche de résistance, on en retrouve dans toute la ville.
Le 26 août, c’est le Parc Borély qui est repris, 1 200 soldats ennemis se rendent après de sanglants corps-à-corps. Au Nord de la ville, les combats se poursuivent, et le Colonel allemand Von Hanstein demande au commandant français d’envoyer une ambulance pour secourir ses soldats blessés. Le Français accepte généreusement. Dans le camp allemand, certains soldats et officiers discutent entre eux de l’utilité ou non de résister jusqu’à la mort, et parfois se rendent en dépit des ordres de leur hiérarchie. Les Américains prêtent main forte aux Français en noyant les bunkers du Frioul sous un déluge de feu. L’aviation, la marine et même l’infanterie ont raison de cette position stratégique d’où les Allemands bombardaient la ville. Aux Goudes les Français n’ont même pas besoin de lancer leur attaque sur le Fort Napoléon, un émissaire allemand les informant de leur reddition pour le lendemain. Mais le Fort Saint Nicolas ne se rendra pas aussi facilement. Son commandant accepte tout juste de laisser évacuer les civils réfugiés dans le tunnel du Carénage en contrebas de l’Abbaye Saint-Victor. Pourtant les occupants du fort se rendront peu après aux Tirailleurs du 11ème Goum, originaires de l’Atlas.
Le 28 août, Schaeffer est dans une situation désespérée, et avec l’accord de tous ses officiers, il passe outre l’ordre de son führer en négociant sa capitulation avec le Général de Monsabert. C’est l’explosion de joie dans la ville. Le lendemain les troupes victorieuses défilent fièrement sur le Quai des Belges devant une foule en délire qui goûte enfin à la liberté retrouvée.
BILAN
Pierre SCHWEITZER
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