Banlieue : campagne en sursis, à voir absolument samedi 28 juin !
par Zora la Rousse
samedi 28 juin 2008
Ce samedi 28 juin de 10h à 18h, c’est portes-ouvertes dans les jardins ouvriers de Saint-Ouen, entrée 21 rue des Bateliers, à 5 minutes à pieds du métro mairie de Saint-Ouen et à côté du magasin Leroy Merlin.
Ces 3 hectares de verdure bucolique (album photos ici), cultivés depuis 1922, à portée de métro de Paname, dont je vous avais déjà parlé en septembre 2007 (cf. chronique Agoravox), sont un coin de campagne inattendu de Seine-Saint-Denis, à découvrir absolument : d’ordinaire il est fermé au public (en dehors des jardiniers).
La cinquantaine de potagers-fleuris (sur 100 à l’origine), actuellement en sursis, est sans doute condamnée à disparaître, au mieux à déménager, dans le cadre de la ZAC Docks de Saint-Ouen.
Le futur parc de 12 hectares incluant l’actuel Parc du Château (jardin public Abel Mézières) devrait comporter des jardins familiaux, toutefois aucun engagement officiel de la mairie ne précise à ce jour, s’il s’agira des actuels jardins ouvriers, et pas d’un alignement d’abris de jardin Playmobil avec des arbres de Barbie.
Regardez ces photos prises en mai 2005 et en septembre 2007, appréciez cette ballade verdoyante et bucolique : Paris semble si loin ! Réfléchissez, ne serait-ce qu’une minute. Le sort encore incertain des jardins ouvriers de Saint-Ouen souleve différentes questions :
- Quelle est vôtre/nôtre définition de ce qui doit être conservé au titre du patrimoine ? Que voulons-nous laisser demain à nos enfants ?
- De quels types d’espace verts avons-nous besoin/envie pour mieux vivre (supporter) la ville ?
- Quels rapports souhaitons-nous entretenir avec la nature, pour nous-même et les générations futures ?
- Comment conserver le patrimoine et rester en phase avec les évolutions de la société ?
Qu’est-ce qui dans une ville permet à chacun de se tourner vers l’avenir, tout en s’appropriant le passé ? - Où commence le patrimoine ? Ainsi le classement ZPPAUP des Puces de Saint-Ouen pour leur ambiance et patrimoine paysager prouve que ce ne sont pas seulement les bâtiments qui font l’atmosphère d’une ville.
- Comment faire perdurer les jardins ouvriers, en les ouvrant au plus grand nombre, dans un esprit de partage des savoirs et de convivialité ?
Quasiment 3 ans après le grand pique-nique, que différentes associations audoniennes avaient organisé lors des Journées du Patrimoine 2005, pour sensibiliser les médias et faire pression sur le promoteur Nexity et la mairie, les jardins et les jardiniers sont en effet toujours en sursis.
62 jardins ont été maintenus grâce la mobilisation citoyenne, puis médiatique (cf. revue de presse ici, incluant 2 blondes qui ont bien poussé depuis…) qui a fait pression sur la mairie de Saint-Ouen pour interférer auprès du promoteur Nexity.
62 jardins, bouffée d’oxygène, lieu magique, poétique et totalement irréel aux portes de Paris. L’accès est désormais autorisé aux seuls jardiniers et à leurs proches, sauf en cas d’autorisation spéciale du propriétaire « privé » Nexity, comme ce samedi 28 juin 2008, à l’occasion du Printemps de l’environnement et du développement durable, organisé par la mairie de Saint-Ouen.
C’est le drame et l’incompréhension, d’autant plus qu’une partie de ces jardins sont situés sur une zone non-constructible inscrite « réserve espaces verts » au Plan local d’urbanisme (PLU) par la municipalité PC-PS, que ces jardins, mais aussi les 2 terrains de foot, les tennis ont toujours été accessibles.
Les jardins ouvriers de Saint-Ouen ont été créés en 1922 pour fournir un appoint alimentaire, éviter de s’attarder dans les bars, mais surtout procurer la bouffée d’oxygène indispensable pour tenir le rythme de l’usine.
Hasards de l’histoire, ces 100 parcelles de potagers fleuris ont d’abord appartenu pendant plusieurs siècles à des Seigneurs, plutôt qu’à des ouvriers.
De 1880 à 1914, la princesse de Beauvau-Craon, fille de la comtesse du Cayla et héritière du château, loue le parc à une société hippique qui le transforme en hippodrome.
En 1917, une partie des terrains de l’hippodrome et du parc du Château sont vendus à la société Thomson-Houston qui découpe le parc en terrains de sport, en jardins et y construit des ateliers.
C’est l’époque du paternalisme industriel : l’entreprise propose aux ouvriers de disposer d’une parcelle de 150 à 200m2 à cultiver, pour améliorer l’ordinaire et s’y retrouver en famille le dimanche, loin des logements exigus et inconfortables.
On accédait autrefois aux jardins, soit par l’arrière de l’actuel parc du château (jardin public Abel Mézières). Après la grille verte, sur le côté gauche, il fallait enjamber la clôture, puis caler ses pieds sur des marches aménagées par les jardiniers et traverser la voie feré désaffectée. Soit par l’entrée principale 21 rue des Bateliers.
En mai 2006, le promoteur Nexity, nouveau propriétaire privé de ces 20 hectares situés sur le futur quartier des Docks de Saint-Ouen, a clôturé le site pour en interdire l’accès, jusqu’ici ouvert depuis 1922.
Des botanistes et ornithologues se sont même déplacés pour évaluer la richesse de cette faune (pies, rouges-gorges, merles, …) et flore (figuier, radis, salades, cerises, vignes…).
L’ensemble constitue d’ailleurs selon eux « un biotope riche et unique à moins de 4 km de Paris ».
@suivre donc.
© rédactionnel ZoralaRousse 93 pour chroniquesmabanlieue.com.
Infos pratiques
Entrée des jardins : 21 rue des Bateliers. N’ayez pas peur de traverser la zone en travaux, les jardins se trouvent derrière.
Association des Jardins Ouvriers de Saint-Ouen (Areva-Alstom)
125 avenue Gabriel Péri - 93400 Saint-Ouen – Tél. : 06 73 08 39 82
jardinsouvriersdesaintouen@voila.fr - jardinsouvriersdesaintouen.com