De la Marseillaise à la Parisienne

par olivier cabanel
mardi 31 décembre 2013

L’hiver n’est pas en principe une saison propice à la cueillette des fruits, et pourtant ce serait oublier tous ces arbres fruitiers qui nous proposent, même tard dans la saison, des fruits délicieux : kakis, nèfles, et bien sûr les figues, fruit idéal pour préparer des chutneys qui accompagneront avec bonheur nos repas de fêtes.

Contrairement à une idée reçue, le figuier, de la famille des moracées, ne produit pas de fruits, mais plus précisément un réceptacle charnu appelé synconium, lequel contient des fleurs, comestible à maturité, et contrairement à une autre idée reçue, il n’y a pas qu’une seule figue, mais au moins 250 espèces de figues différentes, le figuier ayant l’originalité de nous proposer, pour certaines espèces, ses fruits à deux reprises, dans la même année.

Il y a trois types de figuiers, le figuier commun, le San Pedro, et le Smyrne, la première catégorie donnant des fruits unifères ou bifères, la deuxième, uniquement bifères, et la dernière des fruits unifères. lien

Les variétés dites bifères donnent 2 récoltes par an, la première ce sont les figues fleurs, en juin juillet, donnant généralement de gros fruits, et représentant un ¼ de la récolte annuelle, et la seconde a partir d’aout, produisant des fruits plus petits, mais plus sucrés, et plus savoureux.

Quant aux variétés unifères, elles ne produisent qu’une seule récolte, à l’automne.

Il existe donc des figuiers males, et des figuiers femelles, le figuier male (caprifiguier) donnant des fruits immangeables

On peut aussi les classer par la couleur avec 3 groupes bien distincts : les blanches ou vertes, les grises ou rouges, et les noires ou violettes foncées. lien

Le figuier pousse à l’abri du vent, aime la chaleur, s’accommodant des sols pauvres, et s’il aime l’eau, il ne lui en faut pas trop non plus.

De la Ronde de Bordeaux, à la Goutte d’Or, en passant par la Marseillaise, la Dalmatie , la Brunswick, la Banane (Smyrne) la Blanche d’Argenteuil, l’Angélique, (ou Madeleine) au subtil gout de miel, la Bellone, la sucre vert, etc…on a l’embarras du choix, et il y a même une figue qui, depuis décembre 2011 bénéficie de l’appellation d’origine contrôlée, , celle de Solliès, petite ville du Var. lien

Cette figue, issue de la variété Bourjassotte, appelée aussi La Parisienne, est ronde, en forme de goutte d’eau écrasée, de couleur violette à noire nervurée, ferme et souple à la fois, charnue et elle pousse dans la vallée du Gapeau se consommant jusqu’à la mi-novembre. lien

Le séchage de la figue peut se pratiquer de plusieurs manières, tout en sachant que les figues violettes et noires se prêtent moins au séchage.

Autrefois, ceux qui faisaient sécher les figues avaient une pratique originale : ils piquaient les figues sur des branches de paliure, (ou arnavet en provençal) petit arbuste épineux, ces branches étant accrochées aux volets de bois des fenêtres, ce qui permettait le séchage en plein soleil, et, le soir, lorsque le soleil se couchait, on refermait les volets, mettant ainsi les figues à l’abri de l’humidité de la nuit.

Le paliure, dont les fruits récoltés à la fin de l’automne sont comestibles, serait, selon la légende, cet arbre dont les branches avaient servi à confectionner la fameuse couronne d’épine du Christ. lien

Aujourd’hui beaucoup ont abandonné les vieilles coutumes, et si certains mettent encore les figues à sécher sur des canisses, beaucoup utilisent plus simplement des cagettes en plastique, éliminant jour après jour les fruits qui se mettraient à moisir, ou surir. lien

Pour choisir les figues, il y a quelques précautions à prendre, il faut bien observer l’œil (l’ostiole), il doit être bien formé. alors qu'un dépôt marron est suspect, signalant une maturité trop avancée, une goutte transparente est signe d’une maturité parfaite.

La peau ne doit pas être fripée, preuve d’une carence hygrométrique, par contre la présence de zébrures est bon signe : les anciens disaient que les figues « écrites » étaient les meilleures.

Si certains préfèrent les consommer avec leur peau, d’autres poussent le raffinement à les éplucher, en enlevant la peau par lambeaux à partir du pétiole, laissant apparaitre alors une peau bien blanche.

Il ne faut pas les laver, seulement les essuyer, l’eau pénétrant à l’intérieur causerait en quelques heures des dégâts importants.

A part sa consommation en dessert, autant en confiture, que fraîche, elle sert aussi à préparer de délicieux chutneys, (15 recettes à découvrir ici) afin d’accompagner un pot-au-feu, un foie gras (recette ici), des coquilles st Jacques (en brochettes), et d’une manière générale toutes les viandes blanches, mais on peut aussi s’en servir pour farcir les volailles, accompagner le jambon de parme, ou utiliser son jus pour aromatiser les yaourts, ou napper une tarte. lien

On peut aussi préparer des figues fraiches avec du fromage de chèvre : on parsème quelques herbes de Provence, et on les passe au four quelques minutes pour proposer une entrée plus qu’originale.

Le top est peut être d’utiliser les figues confites (recette) pour accompagner un plat salé…une figue évidée et farcie de foie gras peut en bluffer plus d’un. D’autres utilisations sur ce lien.

Découvrez ici les figues confites au romarin.

Par contre, lorsque la figue n’est pas à maturité, son lait blanc peut être utilisé pour faire disparaitre les verrues aussi bien que le lait jaune de la chélidoine. lien

En effet, la figue est bonne pour la santé, et ses vitamines A permettent de lutter contre le vieillissement.

On y trouve aussi des vitamines C, P et B, et sa consommation protège les vaisseaux sanguins et les voies respiratoires, aidant les convalescents à retrouver la forme.

La figue est aussi recommandée à ceux qui sont en surpoids, et sa richesse en fer la fait conseiller aux femmes enceintes.

Elle est aussi connue pour soigner la toux, voire servir en cosmétiques pour faire des shampoings, des crèmes antirides.

On peut confectionner un masque en mélangeant 2 ou 3 Figues fraiches avec 3 cuillères à café de fécule de pomme de terre et quelques gouttes de jus de citron. lien

Un auteur, André Hardellet, allait un peu plus loin comparant le sexe féminin à une figue, lorsqu’il écrivait sous le pseudo de Steve Masson : « ses cuisses bien écartées, la figue au soleil, mûre, juteuse, en sueur, fondue et confondue dans le rut de Messidor  »…

Un autre ajoutait «  fille d’hôte et figues de chemin, si elles ne sont pas goûtées le soir, le sont le matin  », car la figue est aussi l’occasion de décliner des dictons, des proverbes, comme par exemple l’expression « mi-figue mi raisin », qui marque l’hésitation entre la déception et le mécontentement, une sorte de désappointement…elle aurait pour origine la pratique des corinthiens, qui alors qu’ils pratiquaient la vente des raisins secs, du même nom, dissimulaient dans les colis des figues sèches. lien

Un proverbe espagnol affirme : « où il y a des figues, il y a des amis » mais comme dit mon vieil ami africain : « la figue ne tombe jamais en plein dans la bouche ».

L’image illustrant l’article provient de « visoflora.com »

Merci aux internautes de leur aide précieuse

Olivier Cabanel

Articles anciens

L’huile de l’arbre

Un article à la noix

A table avec les sauvages

A table avec les insectes


Lire l'article complet, et les commentaires