Dédicace
par C’est Nabum
jeudi 21 septembre 2017
Une pensée sincère pour chacun.
Avec un nouveau livre, voici revenu le temps des dédicaces. Curieusement, moi qui n’ai jamais réclamé cette petite signature assortie le plus souvent d’un joyeux gribouillis qu’octroient dédaigneusement les vedettes de l’édition, je pensais que j’allais détester la chose, me sentir sous la contrainte d’une obligation et d’un enthousiasme feint. Je me trompais lourdement et pris de plus en plus plaisir à rédiger de longs messages personnalisés.
Il faut bien admettre que je ne suis pas surchargé de demandes, ce qui explique sans doute que compte tenu de la rareté de la chose, je prenne mon temps et un malin plaisir à démontrer que ma plume n’est pas vaine. Je laisse glisser le stylo sur la page blanche que j’aime à remplir d’une écriture pas toujours très lisible, sans doute à l’imitation des plus grands.
Un mot ne me suffit pas. Il me faut à chaque fois développer un argument, une évocation, une anecdote ou bien un rapprochement entre le livre et le réel, qui me place en symbiose avec celui ou celle qui se trouve en face de moi et qui vient de me faire l’immense honneur d’un achat. On peut qualifier cela d’orgueil ou bien de prétention, de pédantisme ou encore de logorrhée verbale, je n’en ai cure. Je laisse les malotrus à leurs sempiternelles railleries et goûte pleinement à ce merveilleux plaisir de ces quelques minutes secrètes.
L’acheteur est en face de vous. Il vous a fait le cadeau de réclamer votre livre. Un petit échange a eu lieu. Dans mon cas, souvent je lui demande sa relation à la Loire. Quelques mots suffisent pour trouver l’angle d’attaque. Puis le silence se fait, l’auteur glisse son stylo sur la page blanche. L’autre en face, regarde sans pouvoir déchiffrer ce qui prend forme devant lui. C’est toujours un peu long avec moi. Je n’aime pas les formules toutes faites, les mots creux et les simples remerciements. J’ai envie de toucher celui qui achète, de lui prouver à quel point il m’a honoré par ce geste essentiel.
Puis, la signature apposée, je m’efforce de ne point oublier la date sans laquelle un écrit, ne cesse de me répéter La Malice, n’a pas de valeur. Je tends le livre à son acquéreur. Certains se jettent immédiatement sur la dédicace, d’autres ferment en disant qu’ils la liront chez eux, dans le secret de l’intime. Ceux-là me privent sans le savoir d’un sourire et d’une réplique qui touche au cœur. Qu’importe puisque c’est d’abord pour eux que j’ai rédigé ces quelques lignes.
D’autres me réclament de lire à haute-voix le petit commentaire qui leur est destiné. C’est dans doute qu’ils veulent retrouver la voix du conteur, le rythme de son phrasé qui se confond parfois à celui de son écrit. C’est alors un bonheur renouvelé, une jubilation que de donner à entendre à ceux qui sont à proximité, cette offrande supplémentaire que je viens d’accorder.
Prétention, orgueil, fatuité du prosateur. Je veux bien toutes ces critiques et bien d’autres encore. J’ai au moins le mérite de la franchise sans me soucier de ces jugements à l’emporte-pièce qui proviennent de gens qui jamais n'achèteront un de mes ouvrages. Alors ils peuvent médire, je ne m’en soucie guère.
Je dédicace pour le bonheur du partage, pour que mon nouvel ami puisse pénétrer immédiatement dans mon univers, qu’il s’y sente chez lui. Le livre aura alors une toute autre signification pour lui, un parfum différent, un je ne sais quoi qui en fait un objet unique. Il ne peut en être autrement avec cet étrange don de soi que constitue un roman. D’autant que celui-ci a été écrit à quatre mains et que ma collègue viendra elle aussi donner un peu d’elle-même à cet acheteur qui nous a reconnus.
Si vous voulez nous faire plaisir, si vous aimez les paraphes originaux, n’hésitez pas un seul instant, commandez-nous notre Règlement de Conte sur la Loire. Nous nous ferons un malin plaisir à noircir une page blanche en début de roman pour que votre exemplaire devienne unique et magnifique.
Autographement vôtre.