Denis Robert, du réel à la fiction...
par Melting Actu
vendredi 23 février 2007
De sa mise en examen dans le dossier Clearstream à son exposition parisienne « Dominations » (1), Denis Robert fait le lien entre sa réalité judiciaire et une nouvelle forme d’engagement artistique : le Kombart !
Après un dépôt de plainte émanant du Premier ministre français en juin 2006, le journaliste Denis Robert revient au coeur de l’actualité judiciaire avec une mise en examen dans l’affaire Clearstream. Cette chambre de compensation internationale bancaire basée au Luxembourg, en quelque sorte une gigantesque banque des banques à l’échelle internationale, a été éclaboussée par les multiples enquêtes de Denis Robert dévoilant des mécanismes occultes extrêmement troublants...
En effet, la mise en examen du journaliste-enquêteur pour « recel d’abus de confiance » concerne l’utilisation de documents transmis par Florian Bourges. Inculpé pour « vol et abus de confiance », cet ex-consultant chez Clearstream avait détecté, à l’occasion d’un audit pour société Arthur Andersen, des anomalies dans l’empire Clearstream. Clear(-)stream reposait pourtant à l’origine sur une idée limpide : celle de stocker les titres bancaires en un même lieu et de permettre leur transaction virtuelle ; ainsi les banques bénéficiaient d’un substantiel gain de temps et de sécurité. Pour D. Robert, il apparaissait au fil de l’enquête qu’une partie des clients Clearstream se révélaient être des sociétés parfois extrêmement troubles. De la même façon, les effacements de données informatiques liées à ces transactions cachées semblaient devenir l’outil privilégié pour blanchiment d’argent et autres délits de haute finance !
« Fusible » préféré de l’affaire Clearstream avec des dizaines de plaintes à son encontre, D. Robert voit dans sa mise en examen une diversion aux auditions des ministres de Villepin et Alliot-Marie. Une pétition apparue sur Internet, « Nous sommes tous des receleurs » (à l’adresse http://www.tousdesreceleurs.com et voir également http://lesoutien.blogspot.com ), lui témoigne un fort soutien des professionnels du journalisme comme du grand public.
Initiée par Frank Eskenazi (producteur) et Gilles Cayatte (réalisateur), l’action de soutien « Nous sommes tous des receleurs » ramène à une autre actualité passée au second plan du Lorrain Denis Robert : la sortie, courant octobre, d’un DVD réunissant quatre de ses films avec, en bonus, une « interview-vérité » réalisée par Pierre Siankowski.
Dans ce coffret, en plus de ses deux films sur l’affaire Clearstream (dont un en parallèle avec l’entreprise Daewoo-Lorraine), figurent deux autres films moins connus, Le cahier, galerie poignante de rencontres avec des SDF de Metz (en lien avec l’ouvrage Portrait de groupe avant démolition) et aussi son film sans doute le plus personnel : Histoire clandestine de ma région. Ce film coproduit et coréalisé par les initiateurs de la pétition constitue une œuvre d’art engagée et ironique, à la frontière entre reportage et film d’art et d’essai : une passerelle vers l’univers de l’artiste et sa relation au réel...
En effet, qui mieux que D. Robert peut créer d’authentiques « fictions du réel », reposant à la fois sur des enquêtes très rigoureuses et sur un détachement et une distance lui permettant une transition subtile entre ces deux univers... C’est le cas son roman paru en 2005, La domination du monde, où un journaliste menacé propose à un ami de mener à sa place une enquête sur une mystérieuse multinationale... Ce rapport entre fiction et réel s’exprime aussi pleinement cette fois dans la rupture avec Histoire clandestine de ma région, réalisé en caméra DV et mêlant des commentaires « voix off » de Denis Robert avec des faits et évènements réels de la région et de ses dirigeants...
Art de la transition entre réalité et fiction encore, dans son roman Le bonheur, (2002), un de ses plus grands succès commerciaux, traduit dans dix-sept pays, où l’auteur nous fait voyager, à travers un carnet croisé d’une histoire adultère, dans l’univers de l’expérimentation sexuelle et du lâcher prise...
Denis Robert expérimente aussi le domaine de la création graphique avec la parution du recueil Domination en octobre 2006, né d’une collaboration étroite avec le peintre Lorrain Philippe Pasquier, un mélange de textes et de visuels inspirés entre autres par une mise en perspective du fonctionnement de la haute finance internationale et de la détresse des dominés et autres démunis... L’ouvrage a précédé une exposition en janvier 2007 dans la galerie parisienne « la B.A.N.K » (1) et qui sera la première oeuvre d’un nouveau courant créé par les deux auteurs : le Kombart !
L’actualité très chargée de Denis Robert ramène autant à la parution d’un recueil d’articles, de chroniques et reportages intitulé : Au cœur de l’affaire Villemin, qu’à sa participation à un projet collectif de reprise du journal Libération où il exerça douze ans dans le service Société.
Si vous voulez savoir aujourd’hui comment s’occupe l’auteur prolixe, sachez qu’après la parution de pas moins de cinq ouvrages en 2006 et la préparation de son exposition, il travaille sur un nouveau roman à paraître début 2007 et aussi à l’écriture d’une série pour la télévision.
(1) Exposition « Dominations », Denis Robert et Philippe Pasquet, a eu lieu jusqu’au 27 janvier 2007dans la galerie la B.A.N.K 42, rue Volta - 75003 Paris. http://www.bankgalerie.com .
Voir des visuels de l’expo. à : http://www.melting-actu.com/article-5240523.html