Fantasmes et Tourments en Sologne

par C’est Nabum
lundi 25 janvier 2016

Lire pour le plaisir du désir

Quelques évidences …

Les éditions du jeu de l'Oie viennent de sortir des sentiers battus en s'enfonçant dans les sous-bois de notre belle Sologne et les bosquets ombrageux de l'inconscient. La chose ne serait pas surprenante s'il s'agissait d'un recueil de photographies ; on sait l'attachement de Christian Beaudin aux beaux clichés animaliers. Seul un beau mâle arbore fièrement ses bois en couverture de ce livre !

Non, ce roman nous conduit ailleurs, nous prend par le cœur pour aller à la découverte des tourments d'une journaliste, veuve et esseulée. Elle n'a sans doute pas fait le deuil de son époux, même si, après le tumulte des premières années, la routine et la maternité ont eu raison des grands désirs d'alors. Marie, l'héroïne, se console en tenant hardiment le courrier du cœur d'un journal local : la dame ayant le sens de la formule sans tabou ni mots qui déparent.

C'est pourtant à un étrange dérapage auquel nous allons assister. En rendre compte serait ici dévoiler ce qui doit se découvrir ; les préliminaires sont toujours essentiels et Marie me conseillerait de ne pas bouder votre plaisir en ouvrant trop de pistes. L'imaginaire doit se laisser caresser en douceur par la fébrile imagination de l'auteure, une ancienne journaliste radio qui fit alors les délices des auditeurs en mal de confidences intimes.

Car c'est bien là que résida ma grande surprise avec ma fierté de vieux solitaire de la plume. Comment une jeune femme, mère de famille a-t-elle osé se lancer dans l'aventure du récit fripon, de la littérature légère ? Quand je fis sa rencontre lors du lancement de son livre, je ne pus m'empêcher de lui poser la question qui me brûlait les lèvres.

Elle fit quelques pirouettes prétendant que Marie n'était pas Nadine, qu'il y avait un jeu d'ombres et de lumières dans ce récit qui n'était pas autobiographique. Je m'amusai de ces délicatesses d'écrivain, sachant que rien n'est jamais aussi simple quand on couche sur le papier des mots qui ne viennent jamais de nulle part. J'avais hâte de lire le roman pour débusquer la dame, la faire sortir de ce bois enveloppé des brumes de Sologne.

Je fus pris au piège d'un récit fort bien troussé. On ne pouvait s'attendre à mieux dans ce genre que je qualifierais de libertin bien plus qu'érotique. Je pense que ce dernier qualificatif ne sert pas un livre qui aborde tout en nuance le désir féminin. Il est, à ce titre, un excellent guide pour des béotiens de mon espèce, rustauds aux gros sabots, qui n'ont jamais rien compris au mystère du plaisir de la femme.

J'avoue ne pas en savoir plus à la sortie d'un suspens qui me poussa à garder ce livre sur ma table de chevet au risque de me mettre en situation scabreuse vis-à-vis de mon épouse. Fort heureusement, il n'y resta pas longtemps : le livre fut avalé si vite que les interrogations n'eurent pas le temps de me mettre en défaut. Le style est allègre, le récit cavale entre la Sologne et Orléans, toiles de fond du thriller.

Je sais par ailleurs que beaucoup de femmes prirent, elles aussi, grand plaisir à plonger dans les péripéties aventureuses de Marie.Cette dernière est soumise à un mystère qui ne ne cesse de s'épaissir au fil des pages. Elle est en danger ; nous le percevons, nous vivons avec elle la monté de l'angoisse, nous partageons ses craintes, sans pour autant deviner le dénouement de l'aventure. Le désir et la peur sont imbriqués ; les scènes plus légères étant entièrement au service du propos et de l'inquiétude qui ne cesse de croître.

Pour un coup d'essai c'est un coup de maître. On perçoit que la dame aime le roman policier ; elle en domine les codes et la structure me laisse admiratif. Moi qui ne me sens pas le courage d'aborder la longueur d'un roman, je découvre ici une néophyte qui réussit parfaitement ce défi. Je ne peux que lui tirer mon chapeau et vous inviter à repousser vos préjugés pour oser la lecture de ce joli roman fripon à la langue bien tenue si je peux avancer ce commentaire sans risquer de remarques scabreuses.

Vous pouvez vous lancer comme moi à la recherche de l'auteure. Je ne sais si ce livre fut pour elle thérapie ou bien jeu, provocation ou bien espièglerie. Toujours est-il qu'il est réussi et qu'il donne envie de faire la connaissance de la dame. Je suppose que ses collègues de bureau vont la regarder d'une drôle de manière désormais. Fort heureusement, je sais que la dame reste droit dans ses bottes puisqu'elle qui vit dans notre si belle Sologne !

Élogieusement sien.


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