Juliette a encore faim !

par Voris : compte fermé
samedi 10 octobre 2009

« Continuez d’écrire, car j’ai faim ! », a lancé à l’assistance Juliette Gréco, après s’être vu décerner la médaille d’or de la Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique, mercredi 7 octobre 2009. Mais cet honneur ne changera rien : Juliette restera toujours sur sa faim. Elle le confirme dans l’émission « Empreintes » diffusée sur France 5 le vendredi 9 octobre : "J’ai faim de l’autre, de tout ce qu’on m’offre. J’ai faim de tout ce que je ne sais pas. Il y a un univers de choses que j’ai loupées. Je partirai sur ma faim. Je ne partirai pas rassasiée."

 
 
La chanteuse Juliette Gréco a consacré sa vie d’artiste à servir les auteurs et elle continue de le faire avec le même goût du risque qu’à ses débuts en chantant aujourd’hui les auteurs de la jeune génération comme Benjamin Biolay, Orly Chap, Olivia Ruiz ou le slammeur Abd Al Malik. Figurent aussi sur le dernier disque de Juliette : Christophe Miossec, Marie Nimier, Brigitte Fontaine ou Adrienne Pauly.
 
Rappelons qu’elle mit le pied à l’étrier à Serge Gainsbourg dont les chances de percer étaient à peu près nulles. En interprétant La Javanaise de ce nouveau venu particulièrement atypique, elle lui permit une grande carrière par la suite. A ce propos Gainsbourg dit ceci "Cette Javanaise, qui fut si incomprise parce que j’y parle javanais, je l’ai écrite pour Juliette Gréco et je lui ai donnée aussitôt son retour des Amériques. Je pense être un auteur privilégié puisqu’elle m’a chanté et je pense qu’il n’y a pas un auteur digne de ce nom ou au moins ayant un tant soit peu de tenue littéraire qui n’ait souhaité écrire pour elle."
 
Avant cela, peu après la Libération, Juliette Greco rencontra Boris Vian qui lui apprit patiemment à sortir de son mutisme et à reprendre confiance. Elle interprétera ses chansons et deviendra la muse des poètes (surtout des surréalistes) et des artistes, la grande figure du Saint-Germain-des-Près de l’après-guerre.
 
A propos de Boris Vian :
 
"Quel être merveilleux ! Qu’il était beau. D’une beauté physique, au premier abord, avec sa peau vert céladon. L’être le plus tendre, le plus doux, le plus attentif que j’ai rencontré. Il avait un cœur énorme. Il dégageait une finesse, une intelligence... et une férocité d’enfant. Je le considérais comme mon grand frère. Il a fait office de psychiatre. Il m’a beaucoup aidé. Efficacement. Je n’avais plus envie de parler depuis l’Occupation. Il m’a rendu la vie après la Libération. Il m’a sorti d’une prison intérieure. La pilule qu’il aurait volontairement omis de prendre le jour de sa mort ? Je n’y crois pas. Il est plutôt mort de rage."
 
source
 
Juliette et le jazz :
 
Dans la même interview, Juliette Gréco dit toute son admiration pour le jazz et les musiciens de jazz. Elle vit pour la première fois Miles Davis grâce à Michelle Vian, la femme de Boris, qui lui fit entrer par les coulisses à la salle Pleyel.
 
60 ans de carrière au service des textes et des auteurs et ce n’est pas fini ! 
 
"Dans tout ce que je chante et dans ma vie, je suis là quelque part. […] Les mots, c’est très grave, pour moi. […] Je ne peux pas mettre dans ma bouche des mots qui ne me plaisent pas. […] Je suis là pour servir. Il y a une belle phrase dans la Bible, qui dit : « Je suis la servante du Seigneur, qu’il me soit fait selon votre parole. » Et moi, mes Seigneurs, ce sont les écrivains et les musiciens. Je suis là pour servir, je suis interprète. […] La chanson est un art particulier, extrêmement difficile (quand c’est bien), contrairement à ce qu’on peut croire. Il faut écrire une pièce de théâtre ou un roman en 2 minutes ½ / 3 minutes et c’est un exercice extraordinaire. C’est grave, une chanson. Ça va dans les oreilles de tout le monde, ça se promène dans la rue, ça traverse la mer, c’est important une chanson, ça accompagne votre vie… […] Les poètes, les musiciens, ils ont besoin d’interprètes. Ils ne sont pas toujours les meilleurs interprètes de leurs œuvres, ce n’est pas vrai. Quelquefois, nous, interprètes, nous trouvons des choses qu’ils n’ont pas entendues, d’eux-mêmes…"
 
Juliette Gréco fait partie des rares interprètes français dont le succès à l’étranger ne se dément pas. Depuis plusieurs décennies, elle fait des tournées aux Etats-Unis, au Japon, en Allemagne ou au Brésil. Son compositeur (et époux depuis 1989), Gérard Jouannest, toujours à ses côtés, s’efface discrètement derrière l’égérie de la chanson française.
 
 

 
"Déshabillez-moi"
 

 
"Parlez-moi d’amour"
 
 
"Les amours perdues" de Serge Gainsbourg
 

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