L’Honneur de Thomas Piketty

par fatizo
dimanche 4 janvier 2015

En refusant la « promotion du 1er janvier » de la Légion d’honneur, Thomas Piketty a donné de quoi se nourrir aux médias en mal d’actualité politique à cette période de l’année. 

L’économiste français a déclaré : « Je viens d’apprendre que j’étais proposé pour la Légion d’honneur. Je refuse cette nomination car je ne pense pas que ce soit le rôle d’un gouvernement de décider qui est honorable », et d’ajouter : « Ils feraient bien de se consacrer à la relance de la croissance en France et en Europe. »

Thomas Piketty s’en prend régulièrement au Président de la République sur la non tenue de sa promesse de campagne concernant la grande réforme fiscale avec une plus grande progressivité de l’impôt, un projet soutenu par l’économiste.

Par ailleurs, l’économiste s’en prend à l’hypocrisie des dirigeants français, qui passent leur temps à critiquer l’Allemagne alors que la faute est partagée. En effet, avec le nouveau traité négocié sous Sarkozy et ratifié sous Hollande entre la France et l’Allemagne, l’Europe du Sud est prise à la gorge. Pour celui qui a vendu plus d’1,5 million d’exemplaires de son dernier ouvrage, il faudrait investir massivement dans la formation, l’innovation et les technologies vertes ; mutualiser les dettes publiques…

Piketty met sur le même plan l’Allemagne et la France, ces deux pays qui en 1945 possédaient une dette publique dépassant 200% du PIB, et qui avaient réussi à la faire baisser à moins de 30% en 1950 par l’intermédiaire de l’inflation et la répudiation. S’ils avaient dû appliquer la méthode actuelle qui veut qu’on dégage des excédents de 1% ou 2% du PIB par an, alors on y serait jamais arrivé, et il aurait été beaucoup plus difficile pour les gouvernements de l’après-guerre d’investir dans la croissance.

Et aujourd’hui ces deux pays exigent aux pays d’Europe du Sud que leur dette publique devra être remboursée en totalité. Faites ce que je dis, pas ce que j’ai fait.

Face aux dirigeants actuels qui continuent obstinément avec des solutions qui nous conduisent dans le mur, Thomas Piketty voit trois tableaux se dessiner.

Tout d’abord une nouvelle crise financière avec les conséquences que l’on n’ose imaginer. Il y a aussi le risque de la montée de la droite nationaliste et de ses vieux démons.

Mais l’économiste souhaite que les dirigeants européens actuels aient l’intelligence de discuter avec des mouvements politiques comme Podemos en Espagne ou Syriza en Grèce. Pour Piketty il faudrait travailler avec eux pour formuler les contours d’une refondation démocratique de l’UE, sinon…

Par ce coup d’éclat, très rare dans le milieu des économistes, Thomas Piketty aura réussi à faire parler de lui dans notre pays bien plus que s’il avait accepté sa belle récompense. Cela démontre aussi son indépendance au contraire d’un Elie Cohen qui dénonce la « médiocrité » de ce geste. Il faut dire que ce dernier est bien dans le moule idéologique qui a conduit le monde où il en est aujourd’hui.

Mais il va sans dire que les médias vont très vite passer à autre chose car il ne faudrait pas trop mettre en lumière un économiste qui ne pense pas comme il faut, qui ne dit pas aux français qu’ils doivent accepter les réformes et faire des sacrifices pendant que les riches sont de plus en plus riches.

Ca risquerait de faire de l’ombre à Elie Cohen et ses amis qui passent en boucle sur les plateaux de télévisions pour asséner un discours qui n’est autre qu’un mensonge répété dix mille fois pour qu’il devienne une vérité.


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