« La Traversée de Paris » au multiple de Francis Huster

par Theothea.com
lundi 26 octobre 2009

Dans la lignée contemporaine du stand-up, Francis Huster défend, seul contre les ombres de la collaboration et de l’antisémitisme, la kyrielle de personnages jalonnant autour de Jambier, Martin et Grandgil, le texte original de Marcel Aymé extrait du « Chemin des écoliers » et de « La Traversée de Paris » (cf. film éponyme de Claude Autant-Lara en 56 avec Gabin, Bourvil & De Funès).

Pour mettre en perspective sa performance au Théâtre des Bouffes Parisiens, l’acteur invite les spectateurs à le rejoindre un quart d’heure avant la représentation, afin d’expliciter sa démarche, visant à rendre à l’Auteur ce qui appartient au Citoyen, Marcel Aymé.

En effet, Huster, vingt ans auparavant, en créant les « Justes » de Camus, a fait la promesse à Jean-Louis Barrault de réhabiliter la mémoire de Marcel Aymé dont la destinée semblait, après avoir été expurgée, devoir cantonner celui-ci au rôle exclusif d’écrivain pour la jeunesse.

En portant, ainsi, sur scène, la version brute des écrits de Marcel Aymé, Huster justifie son intention de démonter le manichéisme entourant cette époque pour montrer que la tendance au bien et au mal peut coexister en une même identité mais qu’en revanche, l’aspiration à la justice se doit de dépasser cette contradiction.

Oui, Marcel Aymé était un écrivain de droite comparable à Ferdinand Céline, mais, à ceci près, que ni collabo, ni vichyste, il sut dénoncer les camps d’extermination dès 1942.

Le message décodé est ainsi transmis et bien reçu par le public présent.

Francis Huster peut, donc, endosser la multiplicité idéologique des rôles en passant d’une seconde à l’autre, en leurs contraires. L’exploit est à la mesure de l’avant-scène que le comédien parcourt par le haut et par le bas, soixante-quinze minutes durant, non sans avoir signifié, ce soir-là, en poussant le paradoxe dans ses retranchements :

« La sonnerie du téléphone portable ne peut me déconcentrer des réglages de ma scénographie. En cas d’oubli d’extinction, n’attrapez pas d’infarctus, neutralisez la, tranquillement »

Pour compléter brillamment l’antithèse, il termine sa causerie en faisant part de son agacement vis-à-vis des acteurs qui, lors des premiers rappels, se croient obligés de faire mine de revenir de l’au-delà, alors que, quelques instants auparavant, leurs rôles mouraient sur scène.

Pour Huster, l’objectif recherché est, alors, de convaincre les spectateurs, qui n’en demandent, peut-être, pas tant, qu’il est possible de passer d’un registre à l’autre en permanence, tout en restant toujours soi-même.

19h00. L’artiste est fin prêt à jouer dans l’excellence de son immense talent.

photo © Muriel Huster 

LA TRAVERSEE DE PARIS - *** Theothea.com - de Marcel Aymé - mise en scène : Francis Huster - avec Francis Huster - Théâtre des Bouffes Parisiens

 


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