« Laissez-moi » dit par Claire Chazal sur les planches du Petit Théâtre de Paris
par Theothea.com
jeudi 12 avril 2007
Dimanche 20h00, Claire Chazal présente comme à l’accoutumée son journal télévisé ; mardi 19h00, s’asseyant sur une chaise à l’avant-scène du Petit Théâtre de Paris où dans le halo mordoré que capte si bien son visage de trois-quarts, elle lit sur un grand cahier d’écolier le recueil des lettres laissées en 1930 par Marcelle Sauvageot emportée à l’âge de trente ans par une pleurésie.
Rupture d’image et interrogation sur la pérennité de la relation amoureuse vont se confronter dans une mise en abîme où l’une parle de l’autre, sans se départir du quant-à-soi qui jaugerait l’autre des pieds à la tête à l’aune de son double médiatique.
Et pourtant rien n’est tout à fait similaire au reflet cathodique, si ce n’est la chevelure blonde dégagée par inadvertance derrière l’oreille, si ce n’est le regard qui se lance de biais dans l’angle mort de la phrase qui chute.
Claire Chazal, pieds nus ôtés de leurs chaussures à hauts talons se positionne au gré des réglages lumière signés Gaëlle De Malglaive dans des postures enrobées tout de marron chic, trahissant la volonté d’Anne Rotenberg de ne pas mettre en scène l’émotion inhérente à la rupture d’affection catalysée par la longue maladie.
Le ton de la journaliste lançant les sujets d’actualité par raffales s’efface alors au profit d’une mélopée qui, de missives en temps épistolaires, se fraie les pauses d’un questionnement à haute voix sur l’amour en balance avec l’amitié à peu de frais.
En réactivité aux élégances dont l’amant se départit avec aisance, point de plainte aiguisée par une petite musique lancinante mais la revendication d’une quête d’absolu que seule l’aimée délaissée pourra mener de front avec la mort qui se profile.
La lectrice se love au sein de la dignité affirmée dans le réconfort d’une écriture au féminin pluriel ; Claire empoigne Marcelle pour en témoigner les stigmates d’un orgueil décliné dans la langue des confidences, celle que Truffaut ou Rohmer reprendraient aisément à leurs comptes cinéphiliques en psalmodiant la voix off du récitant.
« No man, no cry » murmurerait l’écho en mâles de reconnaissance : Voilà donc une entrée en scène bien réussie devant un rideau de fer resté abaissé permettant de préserver la proximité du témoignage dans l’intimité partagée d’une lecture existentielle.
Visuel affiche © François Damigny
LAISSEZ MOI - ** Theothea.com - de Marcelle Sauvageot - Conception artistique : Anne Rotenberg - avec Claire Chazal - Petit Théâtre de Paris -