« Le goût des merveilles » : une superbe ode à la différence

par Fergus
mercredi 23 décembre 2015

Ce film, réussi à tous points de vue, met en scène, au cœur des paysages de la Drôme provençale, l’improbable rencontre d’une arboricultrice confrontée à des difficultés économiques et d’un homme au comportement déroutant, atteint du syndrome d’Asperger. Superbe !

Virginie Efira et Benjamin Lavernhe (Photo Allociné)

 

Dans un article intitulé Mary, Max et le syndrome d’Asperger (2010), j’avais abordé le cas de ces « Aspies » confrontés à des difficultés de vie qu’accentuent souvent la défiance à leur égard et les situations de stress liées à leur hypersensibilité aux agressions sonores et lumineuses. Le film d’animation Mary et Max, réalisé par l’australien Adam Eliott, lui-même atteint du syndrome d’Asperger, était à cet égard une très belle et très poétique illustration de ces difficultés par le biais de la relation épistolaire entre une petite fille australienne disgracieuse et un quarantenaire new yorkais bougon et obèse. Sur le même thème, impossible d’oublier cet autre film remarquable qui reste gravé dans la mémoire de tous ceux qui ont eu la chance de le voir : Rain man de Barry Levinson, dans lequel Dustin Hoffman – oscarisé pour son rôle dans ce film – se révèle impressionnant de réalisme dans la peau d’un autiste surdoué.

Le goût des merveilles d’Éric Besnard aborde le sujet d’une manière différente. Tout commence par la rencontre accidentelle – au propre comme au figuré – entre un homme au comportement étrange et une veuve encore jeune qui, pour garder sa maison et élever ses deux enfants, tente de sauver la ferme arboricole qu’exploitait son mari. Tout sépare cette femme, déterminée malgré les revers bancaires à pérenniser l’exploitation de son défunt mari, et cet homme si bizarre dont les fulgurances intellectuelles sont aussi spectaculaires que sa faculté à se perdre dans la contemplation d’un fétu végétal ou celle des nuages qui, dans sa tête, prennent la forme de nombres premiers. Virginie Efira, dans le rôle de l’arboricultrice, et Benjamin Lavernhe, dans celui de l’Aspie, sont formidables d’un bout à l’autre du film. Et les seconds rôles sont à l’unisson de cette réussite, à commencer par celui du vieux libraire tenu par Hervé Pierre, sociétaire de la Comédie Française comme Benjamin Lavernhe.

Le goût des merveilles est une superbe comédie dramatique qui, de manière élégante, met en scène l’incertitude de l’avenir qui pèse sur les deux personnages centraux, tout en alliant une poésie omniprésente à de belles touches d’humour. Tourné dans les séduisants et lumineux paysages de la Drôme provençale, du côté de Nyons, Mirabel et Piégon, ce film est une magnifique ode à la différence, une bouffée d’air frais dans une actualité plutôt sombre. Il est aussi une alternative sympathique et bienvenue à la déferlante de Star Wars. Et tant pis si, en quittant la salle, il nous manque au palais le goût des beignets, ces « merveilles » drômoises dont le héros se régale.


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