Le Rap Francais, une musique en total déclin

par King Al Batar
jeudi 13 août 2009

Ce mouvement musical, qui a vu le jour au début de années 90 en France, est un des styles musical qui fait vendre le plus aujourd’hui. Souvent critiqué pour sa pauvreté musicale ou textuelle, et l’agressivité des propos tenus, il reste néanmoins un mouvement artistique à part entière.
Néanmoins, on peut constater que depuis qu’il se vend, il a perdu son âme, et le message contestataire qui le caractérisait il y a 10 ans, n’existe quasiment plus......

Début des années 90, le hip hop est en train de naître dans l’univers bétonné de la proche banlieue parisienne et marseillaise, avec pour fer de lance des groupes comme Suprême NTM (très sulfureux), IAM (plutot comique), Assassin(groupe à fortes revendications politiques). Dignes descendants de Trust et des Béruriers noirs, les albums qui paraissent alors à cette époque, sont très souvent revendicateurs d’un malaise social, et autoproduits.
 
Les messages sont clairs : revendication d’un statut de sous prolétaire, absence de patriotisme, haine de la police, ras le bol général, recherche d’argent. Néanmoins la démarche reste artistique et fortement inspirée du rap américain.
 
En 1990 des émeutes à Vaux-en-Velin, banlieue lyonnaise, donnaient déjà un avant goût de l’état de mal-être omniprésent dans les quartiers difficiles.
 
Les albums se vendent plutôt bien en Ile-de-France, commence a se faire reconnaitre dans les cités, mais aucun morceau ne passe à la radio, il faudra attendre 1992 pour entendre le MIA et faire découvrir au grand public ce style musical. Même si auparavant Benny B et d’autres personnalités ridicules avaient sorti des maxis peu crédibles....
 
Puis vers 1994 tout se bouscule, la sortie du film la Haine, le deuxième album des NTM, "1993 j’appuie sur la gâchette" fait parler de lui, en mal bien sûr, surtout à cause d’un morceau "Police" particulièrement violent à l’encontre des petits hommes bleus, et du morceau éponyme de l’album dont le clip sera interdit très rapidement, il s’agit d’une lettre de suicide.
 
En 1995 sort le film La Haine, qui propulse le malaise des banlieues sur les marches du festival de Cannes, le troisième album des NTM sort, avec un morceaux très en avance sur son temps : "Qu’est-ce qu’on attend ?" (pour foutre le feu)..... La réponse 10 ans après !!! D’autres morceaux, plus cool sortiront en maxi afin de promouvoir l’album, notamment " La Fièvre " qui s’est très bien vendu.
 
Jusqu’à cette époque, le rap n’était pas considéré comme une musique, tout au plus un beuglement de sauvageons urbains, pour la plupart des français d’origine africaine, dont le département ne se situe pas en périphérie de Paris.
 
Ce qui n’empêche pas de nombreux et nouveaux groupes ou artistes de produire des albums également : Fabe, Ministère Amer, la Cliqua etc....
 
1996 marque un tournant dans le rap français, c’est l’année du renouveau, le début de l’âge d’or de cette musique. De nombreux groupes plus jeunes que les groupe phares émergent, la majeure partie est talentueuse et communique un message plus jeune, peut-être encore plus violent. C’est également l’année de la reconnaissance nationale de ce style musical (type victoire de la musique, disques d’ors, etc......)
 
La FF, Arsenik, un collectif composé de plusieurs groupes s’appelant Time Bomb violente la bande fm, Oxmo, Pitt Bacardi, 113, Mafia k’1fry et bien d’autres sortent un album pendant cette année là. On voit aussi un groupe qui se distingue par la clarté dans ses revendications et la violence de ses propos : Ideal J.
 
Durant les 3 années qui suivirent, le nombres d’album qui sortent est impressionnant, d’autant qu’il sont tous de qualités. Il faut dire que la Loi Toubon, obligeant les radios françaises à diffuser un quota de musique francophone, en 1995, a fait un heureux : Skyrock. En réponse à cette loi, la radio a décidé de cracher au visage du gouvernement, en ne diffusant plus que du rap français. On aurait pu croire que cette démarche de Skyrock, allait dans le même sens que les rappeurs, mais c’était sans compter sur l’avidité de ses dirigeants, qui ont surtout perçu le potentiel commercial de cette musique.
 
Certains pensent que la qualités des albums de l’époque provient de l’envie de vendre des disques, grâce à la radiodiffusion, de la rage de réussite. A l’image d’un boxeur qui dispute son premier championnat du monde.....
 
Si l’on regarde de plus près les textes qui composent cette musique, ils sont d’une rare violence, on peut entendre un morceaux d’Ideal J à la radio qui fait froid dans le dos : "Pour une poignée de Dollars". dans ce morceau, l’auteur raconte qu’il est au commissariat après avoir agressé une personne au distributeur de billet, et qu’il n’en a rien à foutre. Il explique que le manque d’argent fait faire n’importe quoi au jeune, et ce dans un langage on ne peut plus clair : "ma foi, il vaut mieux un petit chez soi qu’un grand chez les autres... Nous on a plus le choix : on veut un grand chez nous, chez les autres", ou encore " me demander ce que je ferais pour une poignée de dollars, c’est demander à Chirac ce qu’il ferait pour conserver le pouvoir". D’autres textes d’autres groupes sont particulièrement crus, misogynes, apatrides, et incitent à la rébellion. Des messages auxquels nous n’adhérons pas forcément mais qui traduisent un malaise, et d’autre part qui sont destinés à ceux qui les écoutent. Malgré la violence très présente dans cette musique, elle passe toujours à la radio et personne n’en est interpellé.
 
Et puis arriva le fric....... Cette musique commença à vraiment très bien se vendre, à partir de 2000. L’album de Lunatic, sorti cette même année et peut-être le dernier album vraiment sincère de cette époque. Les rappeurs délaissent leurs revendications pour vendre des disques car le public du rap a changé, il s’est démocratisé. La province, les gosses du 16ème se mettent à acheter des albums de rap. La violence qu’ils contiennent donne un côté exotique qui doit, de toute évidence, exciter le petit bourgeois.
 
Certainement le premier rappeur à avoir compris cela, Booba décide de surfer sur cette vague et de ne faire que des albums dont les textes sont très violents, mais sans aucun sens, ni revendications. Il faut faire peur à son public, mais pas l’insulter. Voila en gros l’état d’esprit qui se dégage de son message. De nos jours une rappeuse comme Diam’s vend plus d’album aux gosses de 14 ans de province qu’aux enfants de cités. Cette musique perd son âme et ce qui en sort aujourd’hui ne représente plus rien. Quand on a connu le Rap à sa source, on ne peut que regretter l’époque bénie des années 1996.
 
C’est surprenant mais j’ai l’impression qu’on a donné la parole à cette musique, on l’a diffusée pour qu’elle perde son message, l’appât du gain ayant transformé le rappeur-boxeur avec l’oeil du tigre, en boxeur embourgeoisé qui ne fait plus rien de bon....
 
Ce qui me surprend encore plus c’est qu’aujourd’hui un gosse comme Orelsan, qui sort un texte effectivement misogyne, est victime de toutes les invectives, mais c’est loin d’être le pire des raps.... J’ai l’impression qu’aujourd’hui on peut dire des conneries, tant qu’elles n’ont pas de sens, mais dès lors qu’elles en ont un...... Alors qu’il y a dix ans à peine on pouvait dire tout et n’importe quoi sur la bande FM.
 
Peut-être qu’on a toujours du mal à accepter qu’un petit blanc dise les mêmes conneries que n’importe quel renoi ou reubeu de cité......
 
 

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