« Le repas des Fauves » en appât pour Les Molières 2011
par Theothea.com
vendredi 15 avril 2011
Avec quatre nominations aux Molières 2011, voici des fauves qui se tailleraient volontiers la part du Lion lors de la remise des trophées.
En effet, depuis septembre l’affiche du Théâtre Michel n’en finit pas de faire enfler la rumeur du « must » en phase empathique avec la saison en cours.
Tirée d’une nouvelle de Vahé Katcha, la création de Julien Sibre succède au film de Christian-Jaque en 1964 avec notamment Francis Blanche & Claude Rich au générique.
Il aura fallu, au comédien-réalisateur, près de cinq années pour en finaliser l’adaptation théâtrale sans tête d’affiche mais avec la conviction que la thématique universelle du cas de conscience en serait la vedette consensuelle.
Souper d’anniversaire entre amis lors de l’occupation allemande en 1942 ; ni vraiment résistants, ni foncièrement collabos, de simples parisiens cherchant à vivre leur vie quotidienne le moins mal possible en fonction du contexte international.
Soudain tout bascule : deux soldats allemands sont abattus dans la rue, en bas de l’immeuble. Mesure immédiate de représailles : deux otages par appartement devront être fusillés. Mais régime de faveur paradoxale pour la bande des sept, celle-ci aura la liberté de choisir et de remettre, après le dessert, ses deux « volontaires » auto désignés.
Comme on l’imagine aisément, le spectateur va assister à une succession de lâchetés individuelles qui, sous des prétextes de plus ou moins mauvaise foi, vont tenter chacune de sauver leur peau, d’autant plus chèrement que l’amitié initiale va imploser en mille morceaux que, jamais, aucune contrition ne pourrait réparer :
Point brillante l’âme humaine, lorsque la survie de sa carcasse est en question !…
Si donc l’enjeu moral est à la clef d’une désillusion partagée de la scène à la salle, c’est avant tout par sa mise en scène que ce repas des fauves excelle à rendre une atmosphère liant champ et hors champ cinématographique.
En effet, en se référant à des projections postmodernes (« Persépolis » , « Danse avec Bachir » ) et à des leitmotivs musicaux lancinants, le huis clos entre amis semble se disloquer sous la pressions de forces externes occultes mais hyperprésentes sur les planches du Michel.
Comme si le plateau avait convoqué les 360° d’une perception gyroscopique, le spectateur se sent littéralement impliqué et entraîné dans le dilemme du non-choix à assumer et impossible à résoudre pour lui-même, en semblable situation.
Au titre d’une réalisation conceptuellement instinctive, ce repas des fauves mérite donc, pleinement, d’être jeté en pâture aux Molières de la scénographie, de l’adaptation, de la mise en scène et du Théâtre privé, tous réunis en "nominations" pour la bonne cause.
photo DR.
LE REPAS DES FAUVES - ***. Theothea.com - d'après Vahé Katcha - mise en scène : Julien Sibre - avec Cyril Aubin, Olivier Bouana, Pascal Casanova, Stéphanie Hédin, Pierrejean Pagès, Jérémy Prévost, Julien Sibre & Caroline Victoria - Théâtre Michel