Les Naufragés du fol espoir s’embarquent au Théâtre du Soleil

par Theothea.com
lundi 22 mars 2010

Ariane Mnouchkine livre ici son œuvre majeure, car ce « fol espoir » agit comme une dernière volonté de donner sens à l’humanité.

A travers la métaphore du cinéma et du spectacle vivant qui s’unissent pour ne former qu’un seul et même art, c’est la perspective fondatrice du Théâtre du Soleil qui vient se projeter sur la toile d’un imaginaire en quête de mémoire signifiante :

Quoi de mieux, en effet, que le cinéma pour refaire le parcours de l’enthousiasme initial jusqu’à la réalisation, 45 années plus tard, d’un spectacle total embrassant le projet de la compagnie à installer l’utopie collective au fronton de la passion ?

C’est ainsi qu’à la Cartoucherie, plus de trente comédiens pour plus de cent rôles déferlent, quatre heures durant, à travers les ouragans du Pacifique et les tempêtes de neige en terres australes, alors qu’en fait, tous s’activent dans le grenier d’une guinguette en bord de Marne, à faire surgir l’idéal à partir du simulacre.

Ces naufragés du fol espoir ont été réunis par Jean La Palette (Maurice Durosier) bien décidé, avec le soutien de sa sœur Gabrielle (Juliana Carneiro de Cunha), à mettre ses convictions socialistes et toute son énergie militante à réaliser un film retraçant l’épopée d’un contrat social égalitaire exporté aux confins de la Terre de Feu avec l’assentiment de ses primo occupants, une tribu d’Indiens.

Scène après scène cinématographique, Hélène Cixous, se référant à un livre de Jules Verne, « Les naufragés du Jonathan », remanié de manière posthume par Michel, le fils du romancier visionnaire, organise en une double perspective, la progression des migrants sur leur coquille de noix, en proie aux intempéries de toute nature dans les mers du sud, pendant que de manière concomitante, se perçoit la montée des signes avant-coureurs d’un conflit mondial.

C’est ainsi que de juin à août 1914, le cabaret du Fol espoir aura vibré de tous les trucages et autres effets burlesques dont le cinéma muet fut l’inventeur artisanal, pendant que les nations modernes, gonflées à bloc avec leur pléthore de découvertes scientifiques, s’essayaient à un excès d’optimisme illimité face au progrès prédisant l’avenir radieux.

Cependant la première guerre mondiale a, bel et bien, effectué ses ravages ; le deuxième conflit planétaire n’a lui-même pas été, de reste, pour participer au désastre ; alors que penser de la nature humaine, tenant en elle-même les clés de sa survie ou de son autodestruction ?

« E la nave va » avec « les naufragés du fol espoir » semble répondre l’allégorie Fellinienne stigmatisant la menace d’un monde sordide dont, à la suite de ces S.O.S. dramatiques en des tableaux poignants, il serait urgent de sauver les âmes.

A contrario de toute mystification, cette création du Théâtre du Soleil est inspiré par l’élan universel à relier les êtres humains entre eux, avec l’objectif fédérateur de ne pas laisser prise au pire pouvoir de nuisance, celui de la ségrégation.

Face à la postérité, et même si elle ne dispose, pas plus que quiconque, de la panacée, Ariane Mnouchkine n’a, d’ores et déjà, rien à regretter, car elle aura, non seulement tout essayé, à la mesure de son ambition socio-artistique, mais de surcroît, elle aura su, en permanence, garder le cap éthique en ne transigeant jamais avec l’humanisme.

Exemplaire !…

photo © Cat.S / Theothea.com 

LES NAUFRAGES DU FOL ESPOIR - **** Theothea.com - de Hélène Cixous - sur une proposition d’ Ariane Mnouchkine - avec Eve Doe-Bruce, Juliana Carnheiro de Cuna, Astrid Grant, Olivia Corsini, Paula Giusti, Alice Milléquant, Dominique Jambert, Pauline Poignand, Marjolaine Larranaga, Ana amella Dosse, Judit Jancso, Aline Borsari, Frédérique Voruz, Jean-Jacques Lemêtre, Maurice Durozier, Duccio Bellugi-Vannuccini, Serge Nicolaï, Sébastien Brottet-Michel, Sylvain Jailloux, Andreas Simma, Seear Kohi, Armand Saribekyan, Vijayan Pannikkaveettil, Samir Abdul Jabbar Saed, Vincent Mangado, Sébastien Bonneau, Maixence Bauduin, Jean-Sébastien Merle & Seietsu Onochi - Théâtre du Soleil

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