Mercredi, Folle Journée

par Fergus
mercredi 30 janvier 2013

Mercredi, mais aussi les jours suivants, car depuis des années, La Folle Journée s’étire sur 5 jours pour se terminer le dimanche. Comme tous les ans dans les frimas de l’hiver en Pays de Loire, la ville de Nantes et la Cité des Congrès sont au cœur de l’actualité de la musique classique pour le plus grand plaisir des inconditionnels de ce rendez-vous original...

Une chose est sûre, le batteur de rock René Martin n’imaginait pas à quel point son idée de Folle Journée deviendrait un rendez-vous incontournable pour de nombreux mélomanes du Grand Ouest. Le génial Mozart avait été le héros de la première édition, organisée à Nantes en 1995. Après les compositeurs russes en 2012, c’est, dans le cadre d’un évènement baptisé « L’heure exquise », la musique française et espagnole de 1850 à nos jours qui est mise à l’honneur en cette année 2013.

Nul doute qu’avec ses 309 concerts et ses 1800 musiciens au service d’une programmation soignée, cette 19e édition connaîtra le même succès* que les précédents opus, non seulement dans la capitale historique des Ducs de Bretagne, mais également dans les villes de l’Ouest qui prolongeront l’évènement dans le cadre d’une Folle Journée décentralisée**. Un succès avant tout populaire, conformément au pari qu’avait engagé naguère René Martin, lui-même issu d’un milieu modeste : amener à la musique classique des personnes peu habituées à la fréquentation des salles de concert, voire totalement béotiennes.

Disons-le tout net, la plupart des compositeurs concernés par cette édition de la Folle Journée sont peu connus du grand public. Certes, côté français, tout le monde a dans les oreilles le Boléro de Maurice Ravel, mais seuls les amateurs avertis connaissent son concerto pour la main gauche, écrit pour un pianiste manchot. De même, tout le monde a entendu L’apprenti sorcier de Paul Dukas ou la Danse macabre de Camille Saint-Saëns ; en revanche, peu de personnes dans le grand public ont eu accès à leur musique de chambre. Erik Satie également est méconnu, et cela même si sa 1ère gymnopédie est très populaire.

Côté espagnol, c’est la même chose : tout le monde connaît, au moins partiellement, les danses du Tricorne (ici la Jota), ou celles de L’amour sorcier (ici la Danse du feu) de Manuel De Falla. Et il en va de même pour le Concerto d’Aranjuez de Joaquín Rodrigo. Mais il faut bien avouer que le répertoire espagnol classique est fort méconnu, le nom d’Isaac Albéniz n’étant même le plus souvent cité qu’au titre de la parenté de Cécilia Attias ex-Sarkozy avec ce compositeur. Et que dire d’Antonio Soler dont l’œuvre, héritière du style de Domenico Scarlatti, mériterait incontestablement une plus grande notoriété ? Quant à Enrique Granados et Joaquín Turina, inutile de faire un micro-trottoir pour mesurer leur manque quasi-total de notoriété en deça des Pyrénées.

Impossible de citer tous les compositeurs dont les œuvres ont été inscrites au programme de cette Folle Journée 2013. Mais outre les compositeurs déjà mentionnés, il convient d’ajouter notamment les noms de César Franck, André Caplet, Emmanuel Chabrier, Claude Debussy, Vincent d’Indy, Francis Poulenc, Darius Milhaud, Henri Dutilleux, Olivier Messiaen ou Pierre Boulez. Sans oublier évidemment la « star » des scènes d’opéra : Georges Bizet à qui L’Arlésienne (ici la suite n°1) et surtout la très hispanisante Carmen (l’opéra le plus joué dans le monde !) ont apporté une consécration planétaire jamais démentie. Un regret toutefois : qu’une place plus importante n’ait pas été donné au plus espagnol de nos compositeurs, le nordiste Édouard Lalo dont la Symphonie espagnole (fort heureusement programmée à Nantes) est une pure merveille.

Comme l’ont voulu les organisateurs, cette édition de la Folle Journée se focalise particulièrement sur ce qu’ils ont appelé « l’âge d’or de la musique française, des années 1870 aux années 1940 ». Et de fait, jamais dans l’histoire de la musique classique française, il n’y avait eu une telle floraison de talents sur une aussi courte période. Ce rendez-vous nantais nous donne une belle occasion de réécouter ou de découvrir ces œuvres dont, malheureusement, bien peu sont interprétées en concert.

Se rendre à Nantes pour la Folle Journée est de surcroît toujours un plaisir, ne serait-ce que pour partir sur les traces de Lola (Anouk Aimé) en se promenant du côté du théâtre Graslin, en descendant les marches du célèbre passage Pommeraye, ou en allant dîner dans le superbe décor de céramique modern-style de la brasserie La Cigale. Cela dit, l'on peut préférer admirer les façades blanches du château des duc de Bretagne avant d’opter pour un brunch au Lieu Unique, l'ancienne manufacture des célèbres petits-beurre LU devenue un centre culturel branché. Question de goût, comme en musique !

 

En 2012, 152 000 billets ont été vendus, et le taux de remplissage des 284 concerts a atteint 97,2 %

** En 2012, 11 villes du Grand Ouest ont prolongé la Folle Journée, avec au programme 160 concerts pour lesquels 65 000 billets ont été vendus.

 

Accès au site de la Folle Journée 2013


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