« Monsieur X » Pierre Richard fantasmé par Mathilda May à L’Atelier
par Theothea.com
mercredi 15 janvier 2020
"Je veux créer une pièce à sa dimension, un grand spectacle hybride où tout est parlant : le geste bien sûr, mais aussi les images, les objets, la nature, la musique et les sons.
Inspirée par le « personnage » Pierre Richard, j’y invente des rêveries qui se mêlent à la vie de tous les jours. Le monde de Monsieur X devient alors un endroit d’où surgiraient des événements surréalistes ou drôles, magiques ou mystérieux, comme un voyage en impression dans un quotidien qui ne parviendrait pas à en cacher toute l’absurdité."
Ainsi s'exprime, dans ses intentions de création, Mathilda May qui signait ainsi son troisième spectacle en tant qu'auteure - metteuse en scène après "Open Space" & "Le Banquet" qui, précisément, avaient emballé Pierre Richard alors même que celui-ci devenait concomitamment source d'inspiration pour le troisième opus de la réalisatrice.
En effet, cette entente empathique entre Mathilda May & Pierre Richard était devenue, en quelques échanges autour d'un verre, comme un signe de reconnaissance réciproque qui, à cet instant de leurs parcours professionnels respectifs, leur apparaissait avec la pertinence et l'évidence d'un dessein artistique à partager en commun.
Mathilda arriverait dans ce spectacle burlesque avec force matériaux sensoriels qu'elle mettrait au service d'un imaginaire onirique où vidéo, son, lumières, effets spéciaux, costumes, marionnettes, accessoires etc... viendraient supplanter le texte dont, à l'instar des 2 projets précédents, elle ne voudrait s'encombrer au profit d'un univers où seul le borborygme aurait son mot à dire.
En effet, à elle seule Mathilda May a inventé un genre scénographique dont d'illustres prédécesseurs tels Chaplin, Keaton ou Tati ont tour à tour façonné la conceptualisation dans une gestuelle universelle et intemporelle.
Peintre d'un quotidien magnifié par la perception sensitive de son environnement en éveil permanent, l'anti-héros de cette rêverie serait comme le double du comédien qui l'interprète surfant au plus près de sa propre sincérité.
Objets inanimés avez-vous donc une âme ? En fait, la question ne se pose même pas, tout dans ce petit studio sous les combles semble avoir acquis sa marge d'autonomie au point que chaque déplacement de chaise, glissement de tiroir, utilisation de balai, ouverture de robinet, fermeture de verrou... est propice à représentation fantasque, à surgissement sonore, à actualisation de la mémoire, bref, tout fait sens dans cet univers où nous ne pénétrons non par effraction mais sur l'invite d'une main tendue à passer de l'autre côté du miroir, là où effectivement les mots ont abandonné leur codification fallacieuse de lien social.
Place désormais à la magie du ressenti dans le labyrinthe de ses émois contradictoires.
Dans ce placenta originel, Pierre Richard s'avère disponible tel un poisson dans l'eau ayant ainsi trouvé à 84 ans le véritable tempo de sa démarche artistique en pleine adéquation avec son feeling et sa sensibilité émotionnelle.
Cette rencontre avec l'intuition de Mathilda May est tout simplement fabuleuse. Parce que c'était elle, parce que c'était lui !...
Tous ceux qui auront la chance de voir ce spectacle conserveront d'une façon indélébile l'étonnement de découvrir la réalité prosaïque comme une simple illusion d'optique qu'il est urgent de transgresser... pour le salut d'une humanité en reconquête de ses vibrations internes.
Photo 1 © Pauline Maillet
Photos 2 à 4 © Theothea.com
MONSIEUR X - ***. Theothea.com - de & mis en scène Mathilda May - avec Pierre Richard - scénographie Tim Northam - musique Ibrahim Maalouf - Théâtre de l'Atelier