Nicolas Cage, rien que pour vos cheveux !
par Vincent Delaury
mercredi 10 septembre 2008
Bangkok Dangerous (EU, 2008, 1 h 38), un film d’Oxide et Danny Pang : des noms métissés et bariolés qui ne s’inventent pas ! A l’image du film. Quant à Nicolas Cage, rien que pour ses cheveux, il vaut le déplacement ! Peut-être pas jusqu’à Bangkok, n’exagérons rien, mais jusqu’à, pourquoi pas, une salle de cinéma dans votre coin.
Eh oui, s’il y a bien un acteur ébouriffant absolument passionnant à suivre (acteur original et attachant malgré un certain nombre de casseroles récentes à son actif !) pour ses coupes de cheveux délirantes – entre autres – c’est bien… Nicolas Cage ! Ce mec-là, avec ses délires de chevelures improbables, bat à plate couture les fanfreluches et les désordres capillaires de n’importe quel PPDA, Michou et autres Orlando. Quelques exemples, dans son tout dernier, Bangkok Dangerous (2008, cf. photo 1, affiche du film), sorti le 27 août, nous retrouvons, comme le dit la catchline de l’affiche française, « un homme, une cible, une seule chance », tout un programme quoi !, mais nous avons, aussi et surtout, un parc d’attraction d’importance : un Joe/Cage, excusez du peu, doté d’un joker imparable, à savoir une coiffure pas piquée des hannetons – le voilà orné d’une coiffe à l’inquiétante étrangeté, une sorte de mix entre la chevelure lyrico-ondulée de l’explosif Little Big Tom, style La Cruisière s’amuse, dans Mission Impossible 2 et les tifs hirsutes de l’homme-mouche dans The Fly de Cronenberg – bref, un trip thaï haut en couleur et quelque peu tiré par les cheveux ! Autre exemple : dans l’un de ses derniers en date, Next (2007, photo 2), il joue Cris Johnson qui a le don de voir quelques minutes dans le futur et surtout, pendant tout le film, il se trimballe avec des cheveux longs style le dernier des romantiques façon « Elle en jette ma coupe, hein ?! », du genre ténébreux transalpin, mélancomique, un peu à la Travolta et, face à cette chevelure ubuesque qui fait perruque à 200 %, et un peu « fofolle » il faut bien le dire, il est alors difficile de ne pas se rappeler les moumoutes, les permanentes et les possibilités d’une île à trois touffes de palmiers sur le caillou qui font également qu’on s’attache au grand Nicolas, notre Crazy Dog numéro 1 – et… grand dans tous les sens du terme puisqu’il mesure, selon la presse people, un bon mètre 85. Bon, c’est une superstar XXL, mais lui aussi, visiblement, il a des problèmes avec ses tifs du fait d’une tonsure qui ne cesse de s’étendre, inexorablement, et, ce Chauve qui peut, style gilet-serpillière façon Le Père Noël est une ordure ou paillasson rouquin en fin de vie, ça le rend sympathique en diable, si loin, si proche ! Précisons qu’ici, on aurait pu s’intéresser également, entre autres, à l’espèce d’abat-jour à franges old school que porte l’inénarrable Christopher Lambert dans le nanar poilant Vercingétorix (2001) ou bien à Colin Farrell, un poil mieux coiffé, dont le blond platine dans Alexandre (2005) a des faux-airs de Danièle Gilbert – pas de bol pour eux. Eh oui, il a fallu choisir, et on a donc opté, en dernier ressort, pour le problème capillaire extra-cinématographique du cas Gage !
Echantillons : dans Les Ailes de l’enfer (1996, photo 3), Cage annonçait ni plus ni moins la coiffure arborée par Philippe Lucas (Rahan is alive !), l’ex-entraîneur de Laure Manaudou, avec ses cheveux gras mouillés lorgnant vers la bonne grosse motte de beurre fermier ! Dans cette production survitaminée labellisée Bruckheimer, souvenons-nous, Cage – action heros pyrotechnique – portait la barbe rasée et les cheveux longs, malgré un fort début de calvitie (des cheveux en chute libre ?). Sans aucun doute, ce sont ses extensions qui assuraient la foirade totale de cette coiffure-blockbuster, trop épaisse pour être honnête : on voyait les manques manifestes sur le haut du crâne, moins garni, too much le truc ! Plutôt zarbie aussi sa coiffure de « moine » pervers dans l’opéra balistique de John Woo (Volte/Face, 1996, photo 4) : Castor Troy, terroriste fou carburant à la Red Bull, halluciné et hallucinogène, a une chevelure nette et courte de psychopathe puissance 100 000 volts, ce qui lui donne un air de dandy britannique qui ne lui va pas si mal(e). Pour autant, le côté décoloré et dégradé sur l’ensemble lui donne un air de benêt irrésistible ! En fait, à chaque fil(m), Cage se distingue par ses proliférations ou, au contraire, rétentions capillaires. On vient d’évoquer les plus charismatiques, les plus magnétiques, voire électriques !, mais on n’est pas près d’oublier non plus, bien au contraire, les shampouineuses, les calamiteuses – du genre sa coiffure de Playmobil à l’Ouest, avec ses tifs raides comme des baguettes de tambour battant, dans Ghost Rider (2007, photo 5), sa moustache de preux sapeur-pompier new-yorkais qui aime la Danse des canards et les magasins But, style « individu comme toi et moi, quoi », dans le stone World Trade Center (2006, photo 6), sa permanente frisée, à la limite du cramoisi, dans Adaptation (2001, Spike Jonze), sa mèche fraîche et folle (d’ambulancier new-yorkais) qui lui tombe sur les yeux – histoire de cacher sa calvitie gagnant du terrain ! – dans le décoiffant A tombeau ouvert (1998, Scorsese), son bouc trop épais par rapport à son crâne glabre à la Rue Barbare dans Kiss of Death (1994, photo 7) ou encore, last but not least, son brushing du genre choucroute peroxydée eighties, à en rendre jaloux Michel Polnareff himself, dans Peggy Sue s’est mariée (Coppola, 1987, photo 8). Cette bizarrerie touffue, style ado prolongé, scout toujours, et jeune premier tout propret, le faisait ressembler à un caniche (ou un cocker, au choix) passé dans une machine à laver – sa pire coupe selon moi. Et sa meilleure, soit dit en passant, est selon moi sa coiffure palmier période Arizona Junior (1987, Coen, photo 9).
Alors, après tout, qu’importe le flacon de coiffeur (mort ? en prison ?) déversé sur la tête de Cage, pourvu qu’on ait l’ivresse encore longtemps devant ses moumoutes, ses couleurs, ses balayages, ses crinières et autres postiches surréalistes ! Et qu’on se questionne à bâtons rompus, ad libitum, pour savoir s’il y a imposture ou non : vrai ou faux ? Naturel ou mise en plis ? Le permanent(é) Nicolas Cage – il tourne beaucoup ! – vaut au moins le détour pour ça : ses incongruités capillaires cinéfoutraques élevées au rang d’art mineur ! Perso, moi, je le verrai bien avec une coupe au cordeau à
la Fabien Barthez dans un remake de Kojak, pas vous ?! Oui, je l’avoue, qu’il s’appelle Smokey, Vincent, Johnny, Bill Firpo, Enrico Silvestri, Nicolas Coppola, Sailor, Little Junior Brown, Jack Campbell, Capitaine Corelli, Castor Troy, Benjamin Gates ou Joe, je me prononce définitivement POUR les tignasses, enflures et autres pompes capillaires de Nicolas Cage. Quand il joue dans un tout petit film, même médiocre (comme son Bangkok Dangerous), eh bien on peut toujours, nous spectateurs-cinéphiles (ou phages) souvent soucieux des détails qui font mouche, se rattacher, à l’insu de son plein gré, à ses cheveux abracadabrantesques et, rien que pour ça, ça en vaut la peine, et le peigne, … parce qu’il le vaut bien – oui, au fond, soyons fair-play, aware, ce mec a plein d’idées dans l’hair !
Ah oui, à propos, je ne suis pas le seul à m’intéresser à l’évolution filmographique capillaire de Nicolas Gage – qui, peut-être un jour, fera l’objet d’une thèse en fac cinéma & arts du spectacle ! –, Première s’était déjà penché dessus il y a quelque temps (cf. Les Délits capillaires de Nicolas Cage) et, tout dernièrement, Léo Soesanto des Inrocks (n° 664, page 24) écrivait ceci, en parlant de Benoît Magimel, alias Daniel 1 et Daniel 25, dans le dernier Houellebecq (La Possibilité d’une île) : « (…) Magimel se rapproche surtout d’un acteur américain dont chaque rôle est un ébahissement capillaire : Nicolas Cage, maltraité par un escroc qui ne sait toujours pas s’il est coiffeur ou perruquier. » Excellent ! Au fond, le meilleur effet spécial de cet acteur, c’est sa… coiffure ! N’y allons pas par quatre chemins et évitons de couper les cheveux en quatre, j’apprécie beaucoup le talent de Cage (né le 7 janvier 1964 à Long Beach, Californie*) et ce petit papier, tombant ici un peu comme un cheveu sur la soupe, n’avait que pour seul intérêt de vous faire quelque peu sourire, et en aucun cas de vous donner des cheveux blancs. Mission accomplie ? (Et affaire à suivre donc !) Au fait, en ce qui vous concerne, avez-vous une coupe préférée pour Nicolas Cage ? NB : plusieurs réponses sont possibles et, n’oubliez pas, à chacun ses rêves de coiffures. Par exemple, dans Rien que pour vos cheveux de Dennis Dugan, Zohan (Adam Sandler), agent du Mossad reconverti en coiffeur pour le 3e âge, rêve de devenir coiffeur pour rendre le monde « doux et soyeux » comme le houmous, oh yeah !
* Bien sûr, il serait vain de limiter Cage à ses coiffures, on compte quand même, dans sa filmographie pour le moins éclectique (avec à la clé une capillarité narrative indéniable !), une pléiade de bons films (Birdy, Rusty James, Cotton Club, Peggie Sue s’est mariée, Arizona Junior, Sailor & Lula, Kiss of Death, Leaving Las Vegas, Volte/Face, Snake Eyes, Bringing out the Dead, Windtalkers, les messagers du vent, Lord of War…) et on attend, avec quelque impatience, le prochain Polanski (The Ghost) et le prochain Herzog (remake de Bad Lieutenant).