Photo : numérique ou argentique, tel est le hic

par Christian Le Meut
vendredi 31 mars 2006

Il y a désormais deux façons de prendre des photos : soit avec un appareil numérique, soit avec un appareil argentique. De plus en plus de gens optent pour le numérique, et il ne se vend quasiment plus d’appareils photo argentiques aujourd’hui. Les deux types d’appareils font des photos de qualité, mais le numérique serait plus pratique. Il permet de voir tout de suite les photos que l’on vient de faire et d’effacer les photos ratées, les moches, les floues, les mal éclairées...

Autrefois, il fallait faire développer et tirer toutes les photos, et payer même les photos ratées... Fini, ce temps-là... Pourtant, les photos ratées avaient parfois du bon. Ainsi, je me souviens de photos de course de vélo. Il y a une trentaine d’années, mon frère participait à des courses de vélos, et il lui arrivait même d’en gagner. Ainsi tous les dimanches, ou presque, mes parents l’accompagnaient. Un dimanche, justement, mon frère gagna une course avec deux de ses coéquipiers de l’équipe de l’Arsenal de Lorient. Voici les trois compères sur le podium, habillés pareillement d’un short noir et d’un maillot vert et blanc. Et ma mère de prendre cette photo historique, mais, mystère du cadrage, elle ne prit que les trois paires de jambes. Depuis ce temps-là, nous cherchons, à chaque fois que nous les regardons, lesquelles pourraient bien être celles de mon frère.

Finies donc, les photos bizarres, ratées, floues : elles n’ont plus aucune chance de passer la censure numérique. Ni de nous faire rire...

Pratique, le numérique ?


En 2004, j’avais organisé une grande fête pour mon anniversaire. Des amis et membres de ma famille avaient pris des photos, mais j’ai dû attendre un an pour qu’ils me les gravent sur CD et pour que je puisse les faire tirer sur papier.

Un de mes copains d’enfance tient un magasin de photos à Hennebont. Son métier a beaucoup changé ces dernières années : le développement et le tirage des pellicules est en pleine régression, et les gens ne viennent pas pour autant faire développer leurs photos numériques, elles restent dans les ordinateurs. Pourtant, le prix n’est pas cher, “20 centimes d’euro le tirage”, dit-il.

Pratique, le numérique ? Peut-être, mais je constate qu’on ne voit plus les photos. Il y a quelques années encore elles circulaient, les gens se les montraient, certaines finissaient dans des albums qu’on prenait plaisir à regarder de temps en temps. D’autres encore étaient agrandies, encadrées aux murs... Bien sûr, cela se fait encore, mais manifestement moins, car le passage au numérique a fait régresser la circulation des photos. Et les imprimer soi-même quand on a un ordinateur coûte très cher...

Des magasins fermés par milliers...
L’industrie de la pellicule s’effondre et, avec elle, des usines ferment, et des milliers de gens se retrouvent sans emploi. “Ces dernières années 3000 magasins de photo sur 8000 ont fermé, et mille devraient fermer cette année encore”, dit mon ami photographe. Lui continue à travailler grâce aux photos de mariage et aux photos scolaires. “Mais le tirage papier des photos reprend au Japon et aux États-Unis”, dit-il. Les gens se rendent compte qu’ils n’ont pas de photos papier du petit dernier, ou des événements familiaux récents... L’écran ne peut remplacer complètement le papier.

Car à quoi cela sert-il de prendre des photos, si c’est pour qu’elles restent cachées et enfermées dans des ordinateurs ? Elles n’y servent à rien, sauf à se faire oublier, ce qui serait dommage. La photo, toutes les photos, contribuent à notre mémoire individuelle et collective, et au lien social. Il serait dommage que de seules évolutions techniques nuisent à sa diffusion. Car si le numérique est une avancée technique à certains points de vue (et peut-être écologique, car moins polluant), est-il pour autant un progrès ? Pas pour tout le monde...

Christian Le Meut


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