Pourquoi le nouveau film sur la vie de Simone Veil mérite d’être vu

par Lucia Gangale
samedi 26 novembre 2022

Voici la traduction française de mon article paru dans l'hebdomadaire italien Noi Donne.

Je suis allée voir le film "Simone, le voyage du siècle", du réalisateur Olivier Dahan et je suis contente. Je dois dire que je suis très heureuse de l’avoir vu : il y a longtemps que je n’avais pas été aussi ému dans une salle de cinéma.

Confortablement assise dans cette grande salle d’un coin de la province française, j’ai apprécié le film, qui dure 2.20 minutes mais qui ne m’ennuie pas un instant, en maintenant un rythme soutenu du début à la fin de l’histoire, qui est celle de Simone Veil (née Jacob), magistrate et femme politique française, icône de l'histoire républicaine de la France, première présidente du Parlement européen en 1979.

Je suis également heureuse d’y être allée sans avoir voulu lire aucun commentaire ou recueillir aucune opinion qui pourrait déformer ma perception personnelle de ce que j’ai vu. Dans la salle, il y avait beaucoup de gens qui ont suivi attentivement le film et qui, à la fin, ont salué la fin du spectacle par un chaleureux applaudissement d'approbation. Parce que le film est vraiment beau. A la sortie de la salle, il y avait un silence étrange. Le film de Dahan dépeint avec réalisme la vie dans les camps de concentration dans lesquels Simone a été internée avec sa famille d'origine juive. Ce sont des images fortes et dures, mais Veil a parlé de cette cruauté à de nombreuses reprises dans ses interviews et déclarations. Elle en a parlé surtout à propos de la dignité dont les internés étaient privés par leurs bourreaux. Et il est donc très particulier que dans le film, le réalisateur ait décidé de montrer (ce qui est rare dans les films sur le sujet) le sadisme des femmes qui faisaient office de prisonnières dans ces camps. 

Le film est basé sur l'autobiographie que Veil a écrite tard dans sa vie. Il s'agit d'un voyage à travers l'histoire extraordinaire de cette femme. Elle commence par ses années heureuses et insouciantes dans sa ville natale, Nice, dans un environnement familial serein et vivant composé de ses frères, de sa jeune mère douce et aimante, de son père républicain convaincu et de la foi de sa famille dans la valeur de la laïcité. On voit ensuite la Veil mûre, engagée dans ses batailles politiques en faveur d’un traitement digne des prisonniers des prisons et dans la légalisation de l’avortement, pour mettre un terme à la plaie de l’avortement clandestin, qui coûtait la vie à de très nombreuses femmes françaises. La "loi Veil" sur l’interruption volontaire de grossesse est adoptée en 1974, alors qu’elle est ministre de la Santé. Puis on passe à l'évocation de son mariage avec Antoine Veil, un haut fonctionnaire français (un juif qui a échappé de justesse à la déportation), la naissance de leurs trois enfants, les furieuses querelles conjugales car Simone veut faire des études pour devenir magistrat contre l'avis de son mari.

Dans le film, Simone Veil est assise dans le jardin et écrit les mémoires de sa vie. Ce vécu lui revient à l’esprit, avec toutes les choses belles et imprévisibles qui lui sont arrivées et avec ses drames inénarrables. Le premier est que presque toute sa famille a été exterminée dans les camps de concentration, dont elle s’est sauvée avec sa sœur. Il lui fallut trente ans pour raconter l’histoire de l’enfer d’Auschwitz, dans lequel elle fut déportée alors qu’elle n’avait que seize ans.

Au final, Simone se souvient qu'elle s'est battue pour la justice et la dignité des êtres humains pour honorer sa mère, une femme exceptionnelle. 

Dans la scène finale, Veil est devant les pierres tombales du Mémorial de Paris sur lesquelles sont gravés les noms de tous les Français morts dans les camps nazis. Sa vie a été consacrée à l’engagement pour une Europe unie, une construction qui, dans les intentions de Veil, devait mettre un frein à la résurgence du totalitarisme et servir la paix et la justice entre les peuples. Un grand rêve qu'elle a vu se réaliser et qui a été trahi dans une large mesure depuis sa naissance jusqu'à aujourd'hui.

Je trouve que ce film a une valeur historique et politique indéniable, j'espère donc qu'il arrivera bientôt en Italie et qu'il sera projeté dans les écoles, les universités et tous les lieux de culture.


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