« Rencontre à Castel Gandolfo » Jean-Paul II & Antoine Vitez au La Bruyère
par Theothea.com
jeudi 7 avril 2016
Avec cette discussion impromptue entre Jean-Paul II et Antoine Vitez, Jean-Philippe Mestre inaugure d’un genre théâtral différencié qui pourrait fort bien se décliner à l’occasion d’autres rencontres partiellement virtuelles ou non, mais forcément favorables à l’échange respectable d’opinions.
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En l’occurrence, en témoin et observateur fortuit, le journaliste lyonnais eut l’idée de poursuivre la conversation informelle relativement brève ayant effectivement eu lieu entre le Pape et l’homme de Théâtre, à la suite d’une représentation privée du « Mystère de la charité de Jeanne d’Arc » de Charles Peguy donnée, dans la résidence d’été pontificale de Castel Gandolfo fin juillet 1988, par la Comédie Française dont Vitez était devenu le récent administrateur.
En s’appuyant sur des propos écrits ou énoncés oralement par les deux débatteurs en d’autres circonstances, l’auteur-éditorialiste pouvait ainsi susciter une véritable réflexion à deux voix sur des sujets thématiques socioculturels voire théologiques, philosophiques et même politiques.
Bref, en inventant le prolongement de leur pensée associative mais bel et bien avérée, celui-ci allait pouvoir mettre en place un exposé contradictoire de points de vue légitimes mais souvent radicalement opposés, à commencer par ceux de la croyance en Dieu ou de la vie éternelle…
Dans la mise en espace a minima, sur fond bleu azur, du plateau du La Bruyère, il nous a semblé que la prise de parole fonctionnait davantage à la manière d’une interview de Jean-Paul II par Antoine Vitez plutôt que d’idées s’entrechoquant spontanément au gré d’une prise de parole à tour de rôle.
De l’écoute globale de cet entretien oral pouvait ressortir l’impression que le metteur en scène, attaché à l’idéologie communiste, avait le désir de questionner et même de tester le représentant du pouvoir religieux en le poussant dans ses retranchements ou convictions et que le Pape lui, de par sa fonction d’autorité et de représentation, se sentait en obligation mais aussi en satisfaction de répondre dans une empathie bienveillante mais assumant et même justifiant toute l’histoire de l’Eglise.
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Rien de plus normal d’ailleurs, car ainsi les deux hommes s’affichaient dans leurs positions sociétales respectives :
L’homme de théâtre interroge le monde ! L’homme d’église répond à l’attente de l’humanité en proie au doute !
Dans cette perspective, Jean-Philippe Mestre est resté très précautionneux de n’être que le porte-parole des prises de position publiques respectives de l’un et l’autre interlocuteur.
Au demeurant sur les planches du La Bruyère, c’est un texte de haute volée que Bernard Lanneau et Michel Bompoil se partagent dans la responsabilité incarnée de le faire vivre depuis l’intérieur de sa pensée dialectique évoluant en temps réel.
Sans pour autant jargonner, la réflexion duelle s’y trouve confortée dans sa relation aisée à la contradiction permettant ainsi au spectateur d’être réceptif aux thèses et antithèses avec le même bonheur équitable.
Loin de toute imitation qui serait, avec évidence, contre performante, les deux comédiens sont excellents dans l’incarnation symbolique de la défense conceptuelle de la pensée laïque face à la pensée religieuse.
Se présentant quasiment comme un cas d’école voire, en exemple, significatif d’un argumentaire contradictoire ambitieux, ce débat quasi mystique dans les jardins de Castel Gondolfo pourrait s’afficher comme le surgissement du verbe originel dans son affirmation partagée du « Sacré ».
En tout cas, ce genre théâtral innovant est, à lui seul, une voie dramaturgique à suivre car, pourvu qu’il soit fondé, il est à même d’élever l’entendement et l’âme du poète.
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JEAN-PAUL II - ANTOINE VITEZ Rencontre à CASTEL GANDOLFO - **.. Theothea.com - de Jean-Philippe Mestre - mise en scène Pascal Vittiello - avec Bernard Lanneau & Michel Bompoil - Théâtre La Bruyère