S’approprier toute notre histoire !

par CHALOT
mercredi 17 août 2011

De plus en plus d'auteurs se réapproprient des pages d'histoire souvent niées ou enfouies.

C'est un mouvement qui touche notre Hexagone avec notamment la guerre d'Algérie et aussi Outre Atlantique pour tout ce qui concerne le 19 ème siècle et au-delà.

Rien ne doit être masqué....

C'est ainsi que Rachel Duprée nous offre comme premier roman une histoire humaine dramatique et superbe vécue par les premiers fermiers noirs des Badlands.

« L'histoire très ordinaire

de Rachel Dupree »

roman d'Ann Weisgarber

Éditions Belfond

Avril 2011

7 €

347 pages

 

Un courage et une obstination hors normes !

Un siècle après l'abolition de l'esclavage aux États Unis, le racisme reste présent...

L'auteure ouvre une page d'histoire oubliée ou méconnue : la conquête de l'ouest est terminée, les dernières tribus indiennes ont rendu les armes, place à l'exploitation agricole des immenses terres sauvages...

Rachel, cuisinière salariée à Chicago et Isaac, ex soldat partent pour domestiquer les terres ingrates des Badlands dans le Dakota du sud.

Que d'obstacles en face d'eux : la sécheresse, l'isolement, les coyotes qui rôdent et aussi le regard que les fermiers blancs portent sur eux, ces noirs venus d'ailleurs !

Le président Lincoln n'avait-il donné la possibilité à tous les hommes libres de pouvoir cultiver quatre-vingts hectares de terre ?

Il avait compris « l'importance que revêtait la terre pour les Noirs. Leur offrir l'opportunité de devenir propriétaire, c'était réaliser un rêve dont ils tireraient leur fierté. »

Mais il y en a de plus égaux que d'autres , certains récupèrent des terres riches et prometteuses alors que d'autres, sans appuis ou parce qu'ils sont noirs ne peuvent acquérir que ce qui reste.

Le lecteur est tout de suite conquis par ce roman, par l'atmosphère, la description des éléments et de l'immensité des terres, la volonté farouche de cette femme d'accompagner son mari, de travailler dur mais pas à n'importe quel prix.

C'est une femme volontaire et authentiquement féministe, dans l'acception pleine du qualificatif.

Ce roman est réaliste et non idéaliste...Les noirs dans l'armée ont participé comme les blancs aux exactions contre les indiens et eux aussi comme Isaac méprisent les indiens considérés comme des sous - hommes.

Le racisme est bien malheureusement, la chose de l'homme la mieux partagée.

Nous sommes en 1917 avec un double drame : le départ des jeunes hommes pour combattre en Europe et les « émeutes raciales » à East St Louis en Illinois avec les assassinats et lynchages subis par les noirs.

Rachel travaille dur, souffre pour elle, pour ses enfants, ne comprenant pas un mari qui continue à acheter des terres alors qu'il n'a rien et souffrant du malheur qui touche son autre famille restée là bas en ville dans les horreurs de la haine raciale.

Elle connaît les pensées secrètes de son mari qui semble lui dire :

« Les gens attendent à me voir abandonner, ils pensent que j'ai eu les yeux plus gros que le ventre. Aucun nègre, pas même Isaac DuPree, n'est assez tenace pour résister à ça. Mais ils se trompent. Et je vais leur montrer. »

Jean-François Chalot


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