Syndone, du progressif à base de claviers

par Bernard Dugué
mercredi 16 juillet 2014

La scène progressive italienne est toujours aussi foisonnante comme en atteste la dernière réalisation de la formation Syndone composée de trois membres, le chanteur Riccardo Ruggeri, le vibraphoniste et compositeur Francesco Pinetti et enfin le leader du groupe, Nik Comoglio, officiant aux claviers et à la composition. Cette formation est axée autour des claviers. Elle ne serait pas efficace sans les autres musiciens invités à compléter le trio de base avec un batteur, un bassiste et une bonne douzaine de participants parmi lesquels on compte John Hackett à la flûte ainsi qu’une harpiste, un quatuor de cordes et pas mal de cuivres. De quoi rendre plus dense et riche ce concept album intitulé « Odysséas » et présenté dans une pochette cartonnée de très belle facture avec comme toujours dans le prog une illustration sophistiquée et une notice détaillée avec les paroles en italien assorties d’une traduction anglaise.

On ne peut évoquer Syndone sans présenter la figure centrale du trio, Nik Comoglio, architecte de formation né en 1962 qui se prit de passion pour la musique, étudiant le piano et la composition avec deux maîtres italiens, puis se lançant dans la réalisation de pièces musicales destinées au cinéma. C’est en 1992 que Syndone est formé. Deux albums sont sortis tandis que le groupe se défait au bout de trois ans. Nik poursuit ses expériences musicales, participant à d’innombrables projets, autant aux claviers qu’à la composition, auteur notamment d’un opéra post-moderne. C’est dans les années 2010 que Syndone reprend du service avec de nouvelles intentions et des musiciens avertis. Odysséas est le troisième CD enregistré par Syndone seconde formule. Un disque indispensable pour tous les amateurs de rock progressif raffiné et basé sur les claviers. Les arrangements sont soignés au point de dépasser en qualité les excellentes productions réalisées par les ancêtres du prog symphonique comme ELP.

L’écoute du disque est fort agréable, avec des influences seventies qui ne trompent pas et d’ailleurs, cette intention est clairement affichée si l’on en croit la dizaine d’instruments vintage annoncés dans la notice. Comoglio est un musicien classique dans l’âme mais il exerce son art pour la bonne cause du progressif inspiré par la grande époque, celle des seventies. On reconnaîtra aisément les orgues Hammond, les minimoog, les synthés Roland. Le principe du concept album est lui aussi emprunté à cette époque si riche et déterminante pour la rock musique. Cette musique est une invitation à voyager, comme le précise Ruggieri dans la présentation de l’histoire d’Ulysse, rappelant que nous sommes tous des voyageurs et que le voyage est la destination elle-même.

Les ambiances sont symphoniques, avec quelques relents jazzy, bluesy et un chanteur à la voix rocailleuse qui s’insère parfaitement dans cette atmosphère légère où les notes de vibraphone semblent s’envoler pour planer sur les nappes de synthés exécutées par Comoglio. Les cuivres appuient le style bluesy mais sans entacher la facture progressive qui se décline diversement tout au long de ces quelques treize pièces musicales. Une incursion orientalisante est tentée et réalisée avec subtilité. Suivie par une ambiance inspirée par le jazz contemporain mais ce qui ressort en général, c’est un style qui rappelle l’école de Canterbury et parfois, Morgan, un groupe dont l’album paru en 1972 est devenu mythique. C’est flagrant lorsqu’on écoute les derniers morceaux. A se demander si Nik Comoglio ne serait pas le Morgan Fischer italien. Avec des notes étincelantes semblant se détacher des claviers pour s’envoler dans un ciel baroque. Un disque à ne pas rater pour agrémenter un apéro le soir face au soleil couchant. Un album tout en subtilités, sans agressivité, et que l’on découvre à chaque écoute et qui s’impose aux oreilles du mélomane.

 


Lire l'article complet, et les commentaires