Toy Story 3 ou l’apothéose du film d’animation

par Bruno R.
vendredi 16 juillet 2010

Mercredi 14 juillet 2010 est sorti Toy Story 3, le dernier volet d’une trilogie qui a débuté en 1995 et qui a amorcé l’avènement du film d’animation. Produit par Pixar, le nouveau film de Lee Unkrich est, à l’image des précédentes oeuvres du géant américain, une réussite indéniable.

C’est toujours la même chanson. A chaque nouveau Pixar, l’éternelle question refait encore et toujours son apparition : le nouveau Pixar sera-t-il aussi bon que le précédent ? Car, depuis 1995 et le premier Toy Story, la société californienne ne cesse d’épater, film après film, les yeux émerveillés des éternels enfants du monde entier. Se sont ainsi succédés, au fil des années, des films qui s’apparentent à de véritables chefs d’œuvres : Monstres et cie, Ratatouille, Wall-e ou encore Là-haut, pour ne citer qu’eux, sont ainsi devenus des œuvres aussi classiques que Le roi lion ou La petite sirène, notamment grâce à une narration toujours exemplaire. La transition au numérique et au film d’animation 3D était ainsi assurée avec un brio indéniable et une certaine insolence.

Le studio revient donc en cet été 2010 avec la suite de sa série phare : le fameux Toy Story 3. Près de huit ans après le second volet, l’attente était énorme et cette suite, à la fois risquée mais tellement évidente, fait, une fois de plus, honneur aux précédentes productions Disney. Un chef d’œuvre.

Un florilège de pixels cinématographiques.

La recette du succès de la firme américaine est finalement assez simple. En premier lieu, tous ses films disposent de personnages plus attachants et plus charismatiques les uns que les autres. C’est donc avec une joie intense que nous retrouvons, avec ce Toy Story 3, les éternels jouets vivants que sont Woody, Buzz, monsieur Patate et leurs compagnons.

Vient ensuite un scénario simple mais terriblement efficace. Andy, l’enfant disposant de ces jouets, a maintenant grandi et doit faire face à l’imminent départ pour l’Université. L’heure est donc grave pour Woody et ses acolytes : pour éviter le cimetière des jouets, à savoir la poubelle, ces derniers doivent rapidement trouver une solution.

Derrière ce scénario assez simple et plutôt classique, la narration de ce Toy Story 3 est d’une exemplarité à toutes épreuves. Alternant avec brio et efficacité les scènes émouvantes, d’action et humoristiques, le film propose un équilibre tout simplement parfait et ne pourra jamais ennuyer le spectateur. On rigolera aisément face au caractère androgyne de Ken, nouveau venu dans la troupe. On s’émouvra facilement face à l’humanisme et à l’incroyable solidarité de ces jouets vivants et respirant la bonne humeur. Et on s’extasiera devant les nombreuses scènes d’action, toujours bien rythmées et parfaitement chronométrées. Quelle excellence !
 

Finalement, Toy Story 3 est cinématographiquement parfait, notamment grâce à une technique époustouflante. Car le bond technologique depuis le premier volet est extraordinaire. Les visages sont fins et vivants, les animations sont époustouflantes et le nombre d’objets affichés à l’écran est considérable. Que dire aussi de ces incroyables jeux de lumières, notamment durant la dernière partie du film, qui étonnent par leur authenticité et leur réalisme. Cette extrême personnification de ces jouets est donc d’une réussite parfaite, et articule ainsi toute la colonne vertébrale de ce Toy Story 3 qui s’apparente à un véritable concentré d’humour et d’émotion. Les musiques sont, bien entendu, pas en reste. Tout comme les plans, qui semblent être tirés d’une véritable caméra, tant leur exactitude impose le plus grand des respects. Bref, Toy Story 3 dispose tout simplement d’un univers vivant.
 
Le culte du chef

Mais ce qui caractérise aussi toutes les œuvres de Pixar est leur succulente double lecture. On se souvient aisément du message fort et poignant de Wall-e, qui alertait sur la dérive industrielle. Tout comme l’interrogation existentialiste de Là-haut, fort émouvant, qui questionnait sur la vie et la mort. Des thèmes souvent durs, forts et complexes proposés dans des films avant tout destinés aux enfants ? Là est le véritable tour de force de Pixar et de ses scénaristes : savoir amener de véritables questionnements philosophiques à travers un tourbillon de pixel ravageurs et édulcorés. Bien entendu, Toy Story 3 ne déroge pas à la règle. L’essence même du scénario est en effet existentialiste : les protagonistes font la connaissance et l’appréhension de l’oubli et de la mort, symbolisée par la poubelle et les déchets. Leur combat, tout au long du film, est d’une intensité émotionnelle comme rarement vue dans un film d’animation. Leur solidarité, aux antipodes de l’individualisme américain, est digne de l’éclat de couleurs que leur plastique renvoie.
 


Mais l’éclat de génie de ce Toy Story 3 est l’incroyable maturité de sa problématique sur la question des régimes totalitaires. Car, aussi étonnant que cela puisse paraître, Toy Story 3 propose une vision alarmiste de l’abus gouvernemental en particulier et de l’autorité en général. A travers le personnage de Lotso, cet ourson en peluche rose parfumé à la fraise, le régime stalinien de la garderie, où vont atterrir Woody et ses amis, est parfaitement décrié. Torture, interrogatoire, culte du chef, tous les ingrédients du parfait régime totalitaire sont abordés avec une justesse exemplaire pour un film d’animation.

Parfaitement réalisé, disposant d’un rythme extraordinaire et réussissant le pari d’être à la fois adulte et enfantin, Toy Story 3 est un florilège de réussites. Les maitres Pixar ont une nouvelle fois encore frappé et montrent, par la même occasion, qu’ils savent sans cesse se renouveler et enchainer des projets d’envergure. Qui s’en plaindra ? Peut-être un certain ogre vert, qui commence sérieusement à accuser le coup.
 
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