UBIK

par Kindred
lundi 21 janvier 2013

A ma connaissance, trois romans de Dick ont été portés à l’écran sous les titres de Blade Runner, Confessions d’un barjot et A Scanner Darkly. J’ai eu vent de projets d’adapter pour le cinéma ou la télévision Le Maître du Haut-Château. En attendant, avec peut-être un peu d’appréhension, la prochaine adaptation d’un de ses romans, on peut lire et relire A rebrousse-temps, Les clans de la Lune Alphane et, bien sûr, Ubik.

1- Petit résumé

« A 3h30 du matin, la nuit du 5 juin 1992, le principal télépathe du système solaire disparut de la carte dans les bureaux de Runciter Associates à New York. »

Ubik est un des plus célèbres romans de Philip K. Dick, et celui dont il n’est pas nécessaire de traduire le titre. Science fiction ou anticipation ? En 1969, quand on situe l’action en 1992, on peut parler d’une légère anticipation.

Pour le résumer (mais c’est une ambition démesurée), on pourrait dire que deux histoires se suivent :

1ère histoire : Runciter Associates est une société de protection d’un type particulier. Elle défend l’intimité de ses clients contre les intrusions des télépathes et des précognitifs. Le patron de la société, Glen Runciter, s’entretient régulièrement de ses affaires avec sa défunnte épouse, Ella, qui repose dans un tube cryogénique, maintenue en semi-vie, dans un moratorium suisse. Joe Chip est le recruteur testeur de la société ; en outre, il est fauché et paumé. Un rabatteur lui présente une jeune fille dont les pouvoirs anti-psy vont se révéler surprenants et inquiétants tout à la fois. Elle s’appelle Pat Conley « pas plus de dix sept ans d’allure, mince et la peau cuivrée, de grands yeux noirs. Bon Dieu, pensa-t-il, elle est belle ».

Elle est engagée par Runciter, sur les conseils de Joe Chip qui tient pourtant à la surveiller tout particulièrement. Elle participe à une mystérieuse mission sur la Lune, en compagnie de Runciter, de Joe Chip et de dix autres neutralisateurs. Cette mission s’avère être un piège. Une bombe explose au chapitre 6 et tue Runciter.

Ce pourrait être une nouvelle de science fiction qui finit mal.

2ème histoire : Glen Runciter a été tué par l’explosion. Joe Chip prend la direction de l’équipe. Il décide de ramener le corps de Runciter sur la Terre, afin de l’installer dans le moratorium suisse, près de sa femme. Cependant de curieux incidents surviennent. Des cigarettes vieillissent brutalement. L’argent devient inutilisable. Joe Chip retrouve à New York les restes de l’équipe. Une discussion s’engage entre les survivants sur les phénomènes dont ils sont les victimes.

« Ce sont deux processus qui vont dans des directions opposées. D’un côté un éloignement, quelque chose qui cesse d’exister. De l’autre l’apparition d’une chose qui n’existait pas auparavant. »

Avec un des survivants, Joe Chip se rend à Baltimore pour vérifier la réalité de ces phénomènes. Un message de Runciter qu’ils trouvent dans les toilettes leur apprend la vérité : il est vivant, lui, et ce sont eux, tous, qui sont morts. Le survivant qui accompagne Joe Chip en donne la démonstration en disparaissant à son tour.

2- Petit commentaire : Le mal-héros

« Comme chaque fois qu’il en avait l’occasion, Joe jeta un long regard pénétrant sur la fille dont, s’il avait pu se le permettre, il aurait voulu faire sa maîtresse, ou mieux sa femme. Il paraissait impossible que Wendy Wright ait jamais pu être faite de sang et d’organes comme les autres humains. A proximité d’elle, il se faisait l’effet d’un singe difforme, graisseux, suant et vulgaire, à l’estomac bruyant et au souffle asthmatique. »

Ce genre de réflexion est fréquent dans les romans de Dick. L’auteur met beaucoup de lui dans ces personnages à qui il arrive des histoires. Généralement, il y a au moins deux histoires : une histoire de science fiction et une histoire de la vie quotidienne.

L’histoire de science-fiction, c’est généralement un léger décalage avec la réalité présente, une histoire située dans un futur assez proche (1992 pour Ubik). On est loin des sagas galactiques genre Herbert ou Asimov. Ca rappelle plutôt l’irruption du fantastique ou du merveilleux (selon la façon de voir les choses) dans les romans de Franz Kafka ou les nouvelles de Marcel Aymé.

J’ai le sentiment que ces trois désespérés avaient le même sens de l’humour.

Sur Wikiped, un article entier est consacré à Ubik. Intéressant, même si le site émet des réserves. Peut-être même ; parce que le site émet des réserves.

« L’« anti-héros » principal est « Joe Chip », employé de la société de Runciter. Bon technicien (il « mesure » le « talent » des « anti-psis », quel métier !). Joe Chip est bien payé, mais il est complètement immature : il boit trop, il fait alors des dépenses inconsidérées et il n'a jamais un sou. Son appartement est un taudis. Pat, la très jeune et belle mutante aux cheveux noirs[3] qu’on conduit chez lui pour qu’il effectue des mesures sur son « anti-talent »  : « Je n’ai jamais vu un logement aussi encombré de cochonneries. Vous n’avez pas de maîtresse ? ». Les dialogues entre ces personnages sont rapides et percutants et ils auraient pu être ceux d’un film mis en scène par Woody Allen lors de sa très brillante période new-yorkaise (Annie Hall). Et Dick nous emmène (nous égare ?) sur différentes « branches temporelles » : dans l’une, Joe Chip est le célibataire raté que le roman nous présente d’abord ; dans une autre branche celui-ci a épousé Pat qui a mis de l’ordre dans sa vie. Sur quelle branche le roman va-t-il se déployer ? »

http://fr.wikipedia.org/wiki/Ubik

Je parlerais de mal-héros plutôt que d’anti-héros. Toujours confronté à deux types de femmes : une femme tendre et maternelle ; et une femme plus tranchante, un peu fatale. Dans Ubik, Wendy Wright et Pat Conley.

« Vous dites des âneries, coupa Pat Conley d’une voix perçante. Runciter est mort ou il ne l’est pas ¸Nous sommes morts ou nous ne le sommes pas ? Vous racontez une chose et ensuite une autre. Vous ne pouvez pas être rationnel. »

http://www.philipkdick.com/aa_intro-fr.html


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