Atterrissage d’urgence à Limoges

par Gil Genappe
mercredi 27 août 2008

Décidément, la piste de l’aéroport de Limoges s’abonne à la ballade irlandaise. Pour la deuxième fois en quelques mois, elle reçoit en catastrophe un avion Ryanair en perdition.

Lundi soir, un avion de Ryanair assurant la liaison Bristol-Gérone a dû se poser en catastrophe sur la piste de Limoges, après avoir subi une importante dépressurisation de cabine survenue pour une raison encore inconnue. Une bonne vingtaine de passagers ont dû être hospitalisés, essentiellement pour des problèmes auditifs survenus pendant la descente vertigineuse amorcée par l’appareil, les masques à oxygène étant apparemment défectueux. C’est en tout cas ce qui ressort du témoignage de l’explorateur arctique Pen Hadow[1] (notre photo), dont le fils a été admis à l’hôpital de Limoges. Dans l’interview qu’il a donnée au Telegraph, il explique avoir entendu un bruit « assourdissant et énervant » avant que la cabine ne soit plongée dans un froid de canard. Les passagers ont eu peur de mourir, d’autant que l’avion s’est mis à plonger, qu’ils n’ont reçu aucune information de la part de l’équipage et que certains masques à oxygène ne fonctionnaient pas.

Masques à oxygène défectueux
“Il était clair que ce n’était pas un problème de moteur”, a raconté Hadow. « Il y a eu une brutale chute de la température accompagnée d’une forte entrée d’air glacial. J’ai pensé qu’il y avait peut-être un trou dans la carlingue, comme si on avait ouvert la porte arrière de l’avion !
Les masques à oxygène sont tombés et j’en ai immédiatement mis un à mon fils qui était comme pétrifié. L’avion a piqué et a dû descendre, selon mon estimation, de 10 000 à 2 500 mètres d’altitude en 5 minutes. A l’évidence, il y a eu une dépressurisation, mais nous n’avons reçu aucune indication de l’équipage. » Il a ajouté : « Mon masque n’était pas relié à l’oxygène, celui de mon fils non plus. Il haletait. La dame assise à côté de moi n’allait pas mieux. De mon siège, je pouvais voir une vingtaine de masques et seuls quelques-uns fonctionnaient. Les membres d’équipage semblaient ne pas savoir que faire. »

Les femmes et les enfants après


Le son de cloche du côté chez Ryanair était quelque peu différent. Michael O’Leary a défendu son équipage et affirmé que les masques à oxygène étaient opérationnels. Apparemment, il était mieux renseigné que les passagers… « Les masques fonctionnaient parfaitement et les procédures de sécurité ont été respectées », a-t-il déclaré à la BBC. Peut-être, mais lesquelles ? Il y a là de quoi relancer la polémique survenue il y a deux ans, lorsque la chaîne privée irlandaise Channel 4 (relayée par Canal +) avait diffusé un documentaire sur la formation des équipages (« Caught Napping »[2]), laissant apparaître que l’accent était mis davantage sur les techniques de vente à bord que sur les consignes de sécurité. M. O’Leary a encore déclaré qu’il était impossible à l’équipage de faire une annonce dès lors que le règlement leur enjoint de porter un masque à oxygène en cas de dépressurisation. Les leurs fonctionnaient donc ? Et n’avaient-ils pas à se préoccuper en priorité du fonctionnement de ceux des passagers ? Dans son style inimitable, O’Leary a poursuivi sur le ton de la lapalissade : « L’équipage ne peut pas faire d’annonce quand il porte un masque à oxygène, mais comme les passagers l’ont confirmé, ils en ont fait une dès lors qu’ils sont redescendus à 2 500 mètres et qu’ils ont pu les ôter. »

"Ils ont cru mourir"
Pen Hadow, qui n’a rien d’un poltron, raconte encore que les passagers étaient en état de choc. « C’était à ce point effrayant que beaucoup de gens ont cru qu’ils allaient mourir.
D’autant qu’à l’atterrissage à Limoges, il y avait des voitures de pompiers tous les 400 mètres le long de la piste. » Un autre avion de Ryanair a rallié Limoges à 3 h 30 du matin pour embarquer les naufragés vers Gérone, mais plusieurs, toujours sous le choc, ont refusé de monter à bord. Ils ont été acheminés vers Barcelone par d’autres moyens.



[1] Premier homme à avoir rallié le Canada au pôle Nord en solitaire, en 2003.

[2] http://www.youtube.com/watch?v=ZkKPirksymQ


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